Pièce, qui se donna chez Mr Fouquet.? Sa Majesté, voyant passer Monsieur de S**, dit à Molière: ?Voilà un grand original que vous n'avez point encore copié.? Je n'ai pu savoir absolument si ce fait est véritable; mais j'ai été mieux informé que Mr Ménage de la manière dont cette belle Scène du Chasseur fut faite. Molière n'y a aucune part que pour la versification; car ne connoissant point la chasse, il s'excusa d'y travailler. De sorte qu'une personne, que j'ai des raisons de ne pas nommer, la lui dicta tout entière dans un jardin; et Mr de Molière l'a?ant versifiée, en fit la plus belle Scène de ses Facheux, et le Roi prit beaucoup de plaisir à la voir représenter.
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L'école des Femmes parut en 1662, avec peu de succès; les gens de spectacle furent partagés; les Femmes outragées, à ce qu'elles croyoient, débauchoient autant de beaux esprits qu'elles le pouvoient, pour juger de cette Pièce comme elles en jugeoient. ?Mais que trouvez-vous à redire d'essenciel à cette Pièce?? disoit un Connoisseur à un Courtisan de distinction.--?Ah parbleu! ce que j'y trouve à redire, est plaisant,? s'écria l'homme de Cour! ?Tarte à la crème, morbleu, Tarte à la crème.--Mais, Tarte à la crème, n'est point un défaut,? répondit le bon esprit, ?pour décrier une Pièce comme vous le faites.--Tarte à la crème, est exécrable,? répliqua le Courtisan. ?Tarte à la crème! bon Dieu! avec du sens commun, peut-t-on soutenir une Pièce où l'on ait mis Tarte à la crème?? Cette expression se répétoit par écho parmi tous les petits esprits de la Cour et de la Ville, qui ne se prêtent jamais à rien, et qui incapables de sentir le bon d'un Ouvrage, saisissent un trait foible, pour ataquer un Auteur beaucoup au-dessus de leur portée. Molière, outré à son tour des mauvais jugemens que l'on portoit sur sa pièce, les ramassa, et en fit la Critique de l'école des Femmes, qu'il donna en 1663. Cette pièce fit plaisir au Public: elle étoit du tems, et ingénieusement travaillée.
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L'Impromptu de Versailles, qui fut joué pour la première fois devant le Roi le 14e d'Octobre 1663, et à Paris le 4e de Novembre de la même année, n'est qu'une conversation satirique entre les Comédiens, dans laquelle Molière se donne carrière contre les Courtisans, dont les caractères lui déplaisoient, contre les Comédiens de l'H?tel de Bourgogne, et contre ses ennemis.
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Molière, né avec des moeurs droites, et dont les manières étoient simples et naturelles, souffroit impatiemment le Courtisan empressé, flateur, médisant, inquiet, incommode, faux ami. Il se décha?ne agréablement dans son Impromptu contre ces Messieurs-là, qui ne lui pardonnoient pas dans l'ocasion. Il ataque leur mauvais go?t pour les ouvrages: il tache d'?ter tout crédit au jugement qu'ils fesoient des siens.
Mais il s'atache sur tout à tourner en ridicule une pièce intitulée le Portrait du Peintre, que Mr Boursaut avoit faite contre lui; et à faire voir l'ignorance des Comédiens de l'H?tel de Bourgogne dans la déclamation, en les contrefesant tous si naturellement, qu'on les reconnoissoit dans son jeu. Il épargna le seul Floridor. Il avoit très-grande raison de charger sur leur mauvais go?t. Ils ne savoient aucuns principes de leur art; ils ignoroient même qu'il en e?t. Tout leur jeu ne consistoit que dans une prononciation ampoulée et emphatique, avec laquelle ils récitoient également tous leurs r?les; on n'y reconnoissoit ni mouvemens, ni passion: et cependant les Beauchateau, les Mondori, étoient aplaudis, parce qu'ils fesoient pompeusement ronfler un vers. Molière, qui connoissoit l'action par principes, étoit indigné d'un jeu si mal réglé, et des aplaudissemens que le Public ignorant lui donnoit. De sorte qu'il s'apliquoit à metre ses Acteurs dans le naturel; et avant lui, pour le comique, et avant Mr le Baron, qu'il forma dans le sérieux, comme je le dirai dans la suite, le jeu des Comédiens étoit pito?able pour les personnes qui avoient le go?t délicat; et nous nous appercevons malheureusement que la plupart de ceux qui représentent aujourd'hui, destitués d'étude qui les soutienne dans la connoissance des principes de leur art, commencent à perdre ceux que Molière avoit établis dans sa Troupe.
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La différence de jeu avoit fait na?tre de la jalousie entre les deux Troupes. On alloit à celle de l'H?tel de Bourgogne; les Auteurs Tragiques y portoient presque tous leurs Ouvrages; Molière en étoit faché. De manière qu'a?ant sceu qu'ils dévoient représenter une pièce nouvelle dans deux mois, il se mit en tête d'en avoir une toute prête pour ce tems-là, afin de figurer avec l'ancienne Troupe. Il se souvint qu'un an auparavant un jeune homme lui avoit aporté une pièce intitulée Théagène et Chariclée, qui à la vérité ne valoit rien; mais qui lui avoit fait voir que ce jeune homme
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