érudits et reviens
aux Chinouks.
Ils sont très-superstitieux, et, comme exemple, je citerai ce fait: ils
enlèvent et enterrent le coeur des saumons qu'ils ont pris; cela,
probablement, dans le but de se rendre favorable la divinité qui préside
aux tribus aquatiques.
Les sorciers jeesukaïns exercent une grande influence sur leur esprit.
Un Chinook tombe-t-il malade, on le place sur des nattes de jonc
élevées de quatre ou cinq pieds du sol et entourées par une pente en
planche. Deux jeesukaïns sont mandés. On leur fait force présents pour
les déterminer venir. Une fois arrivés, ils montent sur les nattes près du
patient, et commencent à psalmodier d'un ton bas et lent une sorte de
chant nasal. Chacun d'eux tient à la main un bâton long de quatre à cinq
pieds, emmailloté dans une peau de serpent, et marque la mesure. Au
bout de quelques minutes, la gamme hausse et s'accélère. Les
magiciens s'agitent, se démènent comme des énergumènes.
Bientôt le bruit devient assourdissant, et se continue jusqu'à ce que les
exorciseurs, trempés de sueur, à court d'haleine, s'affaissent, à moitié
morts, auprès de leur client.
Pendant tout le temps de l'opération, la famille vaque à ses travaux
journaliers comme si de rien n'était.
Un enfant meurt-il, le père s'en prend à la mère et la tue, parce que,
dit-il, elle lui a jeté un sort à sa naissance.
Un touriste canadien, M. Paul Kane, dont la relation a été élégamment
traduite par M. Edouard Delessert, rapporte la tragédie suivante:
Casanov (chef chinouk) perdit son fils unique et l'enterra dans
l'enceinte du fort. Il était mort de consomption, maladie très-commune
chez les Indiens et qui vient sans doute de ce qu'ils sont constamment
exposés aux vicissitudes des saisons. La bière fut faite assez grande
pour contenir tous les objets supposés nécessaires pour son confort
dans le monde des esprits. Le chapelain du fort fit la cérémonie
habituelle; sur la tombe, et Casanov rentra dans sa case où, le soir
même, il attenta à la vie de la mère de son enfant....
C'est une opinion répandue parmi les chefs qu'eux et leurs fils ont trop
d'importance pour mourir d'une manière naturelle; à quelque époque
que l'évènement arrive, ils l'attribuent à la mauvaise influence exercée
par quelque autre individu qu'ils désignent souvent de la manière la
plus capricieuse; le plus souvent ils font tomber leur choix sur les
personnes qui leur sont les plus chères. Cette fois-là, Casanov prit pour
victime la mère affligée, quoique, pendant la maladie de son fils, elle
eut été la plus assidue et la plus dévouée servante, et que, de ses
diverses femmes, elle fut celle qu'il aimât le plus. Mais c'est la croyance
générale des Indiens de l'ouest des montagnes que plus la perte qu'ils
s'infligent à eux-mêmes est grande, plus la manifestation de leur
douleur est agréable à l'âme du défunt. Casanov me fit connaître la
raison intime de son désir de tuer sa femme: elle avait été si bien
l'esclave de son fils, si nécessaire à son bien-être et à son bonheur dans
ce monde, qu'il devait l'envoyer près de lui pour qu'elle l'accompagnât
dans son long voyage, néanmoins, la pauvre mère parvint à s'enfuir
dans les Bois et à se rendre le lendemain au fort Vancouver, où elle
implora protection. Elle se tint, en conséquence, cachée pendant
quelques jours jusqu'à ce que ses parents eussent fixé leur résidence et
la sienne à la pointe Chinouke. En ce même temps, une femme fut
trouvée assassinée dans les bois; on attribue universellement ce meurtre
à Casanov ou à quelqu'un de ses émissaires.
Les Chinouks ne brûlent pas leurs morts, mais ils emplissent les narines
des cadavres d'une espèce de coquillages nommés aïqua, et ils fixent
sur les paupières des bandelettes de grains de verre ou d'étoffe. Le
corps est paré de ses vêtements de fête; puis enveloppé dans des peaux
d'animaux ou des couvertures de laine et enseveli, la face tournée vers
la terre et la tête suivant le cours d'une rivière, dans un canot formé
avec des écorces, élevé sur quatre poteaux et soutenu par des barres
transversales. Des branches d'arbres, lichees autour de ce sépulcre
aérien, supportent tous les ustensiles dont le défunt a fait usage pendant
sa vie. Les cérémonies funèbres se font au milieu des chants des
jeesukaïns et des hurlements des femmes et des parents du mort, qui le
pleurent pendant plusieurs semaines.
Les tombeaux sont sacrés. Malheur à l'imprudent qui toucherait à l'un
des objets qu'ils renferment!
Les Chinouks vivent en famille dans de grandes huttes d'écorce de
cèdre, où les lits sont disposés comme les cadres dans les cabines d'un
navire. Ils ne se vêtissent guère qu'en hiver; alors ils portent un
manteau de peaux de rats musqués ou de veau marin.
Une ceinture (kalaquarté) en filaments d'écorce de cèdre
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