s'avan?ant dans l'intérieur des terres, par le rio Columbia, jusqu'au moment où un aventurier anglais, le docteur McLoughlin jeta, en 1824, les fondements d'une factorerie considérable qui prit le nom de fort Vancouver.
Le fort Vancouver, bati à trente lieues en amont du fleuve, fut compris dans les possessions de la Compagnie de la baie d'Hudson, qui, comme je l'ai dit dans mes précédents ouvrages [6], monopolisa tout le commerce, depuis le 45° de latitude jusqu'au cercle polaire, et de la baie d'Hudson jusqu'au Pacifique.
[Note 6: Voir entre autres la Huronne et les Pieds-Noirs.]
Dès le commencement du siècle, elle déclarait aux Compagnies rivales et aux francs trappeurs une guerre à outrance. Mais, à partir de 1815, elle ne recula devant aucun moyen pour les faire dispara?tre du territoire où elle exer?ait un pouvoir sans contr?le. Le vol, la dévastation et l'assassinat furent impunément perpétrés par ses agents.
Je n'ai pas besoin d'ajouter qu'elle pressurait et décimait les peuplades indiennes.
Ces peuplades étaient et sont encore, sur le versant occidental des montagnes Rocheuses, et le long de la rive orientale de la Colombie, les Têtes-Plates, proprement dites; les Nez-Percés, les Serpents et les Chinouks; le long de la rive septentrionale, les Okanagans, les Nesquallys, les Chinamus, les Clallomes.
Ceux qui vivent à la base des montagnes ressemblent assez par leurs moeurs, leurs usages, leur langue et leur costume à la grande race algonquine répandue entre le versant oriental, le lac Huron et la factorerie d'York, sur la baie d'Hudson [7]. Mais les riverains du Pacifique en diffèrent totalement. Ils portent peu ou point de vêtements, se tatouent le corps, parlent un langage dur et mènent pour la plupart une existence misérable.
[Note 7: Voir la Huronne.]
La famille chinouke reconna?t deux divinités principales, Hias-soch-a-la-ti-yah, le Grand Esprit ou chef suprême, et Scoucoumé, l'Esprit du Mal. A ce dernier elle fait des sacrifices, lui immole des victimes humaines. Sa genèse est étrange. L'homme fut créé par un Dieu, Etalapas. Mais, à l'origine, l'homme était parfait. Le souffle de vie ne l'animait pas. Sa bouche n'était pas divisée, ses yeux étaient fermés, ses pieds et ses mains étaient rigides. C'était, une statue, rien de plus. Le feu prométhéen lui manquait. Un autre dieu, non moins puissant, mais plus charitable qu'Etalapas, eut pitié de ce triste état de l'homme. Il lui ouvrit la bouche et les yeux, insuffla le mouvement dans ses bras et ses jambes, puis il lui apprit à s'en servir pour fabriquer des armes, des filets et toutes les choses nécessaire à son être.
La cosmogonie des Algonquins, par contre, a une analogie si remarquable avec la tradition biblique que, quoiqu'elle s'éloigne de mon sujet, je ne puis résister au désir de la citer.
?Au commencement, disent-ils, il y avait six hommes. Les femmes n'existaient pas alors et les six hommes craignaient que leur race ne s'éteignit avec eux. Ils délibéraient sur les moyens de la perpétuer, quand ils apprirent qu'il y en avait une au ciel.
?On prolongea le conseil et il fut convenu que Hougoaho, l'un d'eux, monterait.
?Ce qui parut d'abord impossible.
?Mais des oiseaux lui prêtèrent le secours de leurs ailes et le portèrent dans les airs.
?Arrivé au ciel, il apprit que la femme avait coutume de venir puiser de l'eau auprès d'un arbre, au pied duquel il attendit qu'elle v?nt.
?Et la voici venir, en effet. Hougoaho cause avec elle et lui fait un présent de graisse d'ours.
?Une femme causeuse qui re?oit des présents n'est pas longtemps victorieuse.
?Celle-ci fut faible dans le ciel même.
?Manitou s'en aper?ut, et, dans sa colère, la précipita en bas. Mais une tortue la re?ut sur son dos, où la loutre et d'autres poissons apportèrent du limon du fond de la mer et formèrent une petite ?le qui s'étendit peu à peu et finit par constituer tout le globe.?
Cette légende, que j'ai souvent entendu raconter sur les bords du Saint-Laurent, je l'abandonne aux commentaires des érudits et reviens aux Chinouks.
Ils sont très-superstitieux, et, comme exemple, je citerai ce fait: ils enlèvent et enterrent le coeur des saumons qu'ils ont pris; cela, probablement, dans le but de se rendre favorable la divinité qui préside aux tribus aquatiques.
Les sorciers jeesuka?ns exercent une grande influence sur leur esprit. Un Chinook tombe-t-il malade, on le place sur des nattes de jonc élevées de quatre ou cinq pieds du sol et entourées par une pente en planche. Deux jeesuka?ns sont mandés. On leur fait force présents pour les déterminer venir. Une fois arrivés, ils montent sur les nattes près du patient, et commencent à psalmodier d'un ton bas et lent une sorte de chant nasal. Chacun d'eux tient à la main un baton long de quatre à cinq pieds, emmailloté dans une peau de serpent, et marque la mesure. Au bout de quelques minutes, la gamme hausse et s'accélère. Les magiciens s'agitent, se démènent comme des énergumènes.
Bient?t le bruit
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