La Faute de lAbbe Mouret | Page 3

Emile Zola
bient?t:
- Fr��re Archangias est venu... Il n'aura pas un enfant, �� l'��cole, aujourd'hui. Il est parti comme un coup de vent, pour aller tirer les oreilles �� cette marmaille, dans les vignes... Vous ferez bien de le voir. Je crois qu'il a quelque chose �� vous dire.
L'abb�� Mouret lui imposa silence de la main. Il n'avait plus ouvert les l��vres. Il r��citait les pri��res consacr��es, en prenant le manipule, qu'il baisa, avant de le mettre �� son bras gauche, au- dessous du coude, comme un signe indiquant le travail des bonnes oeuvres, et en croisant sur sa poitrine, apr��s l'avoir ��galement bais��e, l'��tole, symbole de sa dignit�� et de sa puissance. La Teuse dut aider Vincent �� fixer la chasuble, qu'elle attacha �� l'aide de minces cordons, de fa?on �� ce qu'elle ne retombat pas en arri��re.
- Sainte Vierge! j'ai oubli�� les burettes! balbutia-t-elle, se pr��cipitant vers l'armoire. Allons, vite, galopin!
Vincent emplit les burettes, des fioles de verre grossier, tandis qu'elle se hatait de prendre un manuterge propre, dans un tiroir. L'abb�� Mouret, tenant le calice de la main gauche par le noeud, les doigts de la main droite pos��s sur la bourse, salua profond��ment, sans ?ter sa barrette, un Christ de bois noir pendu au-dessus du buffet. L'enfant s'inclina ��galement; puis, passant le premier, tenant les burettes recouvertes du manuterge, il quitta la sacristie, suivi du pr��tre qui marchait les yeux baiss��s, dans une d��votion profonde.

II
L'��glise, vide, ��tait toute blanche, par cette matin��e de mai. La corde, pr��s du confessionnal, pendait de nouveau, immobile. La veilleuse, dans un verre de couleur, br?lait, pareille �� une tache rouge, �� droite du tabernacle, contre le mur. Vincent, apr��s avoir port�� les burettes sur la cr��dence, revint s'agenouiller �� gauche, au bas du degr��, tandis que le pr��tre, ayant salu�� le Saint- Sacrement d'une g��nuflexion sur le pav��, montait �� l'autel et ��talait le corporal, au milieu duquel il pla?ait le calice. Puis, ouvrant le Missel, il redescendit. Une nouvelle g��nuflexion le plia; il se signa �� voix haute, joignit les mains devant la poitrine, commen?a le grand drame divin, d'une face toute pale de foi et d'amour.
- Introibo ad altare Dei.
- Ad Deum qui laetificat juventutem meam, bredouilla Vincent, qui mangea les r��pons de l'antienne et du psaume, le derri��re sur les talons, occup�� �� suivre la Teuse r?dant dans l'��glise.
La vieille servante regardait un des cierges d'un air inquiet. Sa pr��occupation parut redoubler, pendant que le pr��tre, inclin�� profond��ment, les mains jointes de nouveau, r��citait le Confiteor. Elle s'arr��ta, se frappant �� son tour la poitrine, la t��te pench��e, continuant �� guetter le cierge. La voix grave du pr��tre et les balbutiements du servant altern��rent encore pendant un instant.
- Dominus vobiscum.
- Et cum spiritu tuo.
Et le pr��tre, ��largissant les mains, puis les rejoignant, dit avec une componction attendrie:
- Oremus...
La Teuse ne put tenir davantage. Elle passa derri��re l'autel, atteignit le cierge, qu'elle nettoya, du bout de ses ciseaux. Le cierge coulait. Il y avait d��j�� deux grandes larmes de cire perdues. Quand elle revint, rangeant les bancs, s'assurant que les b��nitiers n'��taient pas vides, le pr��tre, mont�� �� l'autel, les mains pos��es au bord de la nappe, priait �� voix basse. Il baisa l'autel.
Derri��re lui, la petite ��glise restait blafarde des paleurs de la matin��e. Le soleil n'��tait encore qu'au ras des tuiles. Les Kyrie, eleison coururent comme un frisson dans cette sorte d'��table, pass��e �� la chaux, au plafond plat, dont on voyait les poutres badigeonn��es. De chaque c?t��, trois hautes fen��tres, �� vitres claires, f��l��es, crev��es pour la plupart, ouvraient des jours d'une crudit�� crayeuse. Le plein air du dehors entrait l�� brutalement, mettant �� nu toute la mis��re du Dieu de ce village perdu. Au fond, au-dessus de la grande porte, qu'on n'ouvrait jamais, et dont des herbes barraient le seuil, une tribune en planches, �� laquelle on montait par une ��chelle de meunier, allait d'une muraille �� l'autre, craquant sous les sabots les jours de f��te. Pr��s de l'��chelle, le confessionnal, aux panneaux disjoints, ��tait peint en jaune citron. En face, �� c?t�� de la petite porte, se trouvait le baptist��re, un ancien b��nitier pos�� sur un pied en ma?onnerie. Puis, �� droite et �� gauche, au milieu, ��taient plaqu��s deux minces autels, entour��s de balustrades de bois. Celui de gauche, consacr�� �� la sainte Vierge, avait une grande M��re de Dieu en platre dor��, portant royalement une couronne d'or ferm��e sur ses cheveux chatains; elle tenait, assis sur son bras gauche, un J��sus, nu et souriant, dont la petite main soulevait le globe ��toil�� du monde; elle marchait au milieu de nuages, avec des t��tes d'anges ail��es sous les pieds. L'autel de droite, o�� se disaient les messes de mort, ��tait surmont�� d'un Christ en carton peint, faisant pendant �� la Vierge; le Christ, de
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