joue avec nous, Comme l'hirondelle A la mer se mêle, Aga?ant de l'aile Le flot en courroux.
C'est la jeune fille, L'enfant du malheur! Quand son regard brille, Adieu la douleur! Son chant nous rassemble; De loin elle semble L'abeille qui tremble Au bout d'une fleur.
Danse, jeune fille, Tu nous rends plus doux. Prends-nous pour famille, Et joue avec nous!
CLAUDE FROLLO, [à part.]
Frémis, jeune fille; Le prêtre est jaloux!
[Claude veut se rapprocher de la Esmeralda, qui se détourne de lui avec une sorte d'effroi.--Entre la procession du pape des fous. Torches, lanternes et musique. On porte au milieu du cortège, sur un brancard couvert de chandelles, Quasimodo, chapé et mitré.]
CHOEUR.
Saluez, clercs de basoche! Hubins, coquillards, cagoux, Saluez tous! il approche. Voici le pape des fous!
CLAUDE FROLLO, [apercevant Quasimodo, s'élance vers lui avec un geste de colère.]
Quasimodo! quel r?le étrange! 0 profanation! Ici, Quasimodo!
QUASIMODO.
Grand Dieu! qu'entends-je?
CLAUDE FROLLO. Ici, te dis-je!
QUASIMODO, [se jetant en bas de la litière.]
Me voici!
CLAUDE FROLLO.
Sois anathème!
QUASIMODO.
Dieu! c'est lui-même!
CLAUDE FROLLO.
Audace extrême!
QUASIMODO.
Instant d'effroi!
CLAUDE FROLLO.
A genoux, tra?tre!
QUASIMODO.
Pardonnez, ma?tre!
CLAUDE FROLLO.
Non, je suis prêtre!
QUASIMODO.
Pardonnez-moi!
[Claude Frollo arrache les ornements pontificaux de Quasimodo et les foule aux pieds. Les truands, sur lesquels Claude jette des regards irrités, commencent à murmurer et se forment en groupes mena?ants autour de lui.]
LES TRUANDS.
Il nous menace, O compagnons! Dans cette place Où nous régnons!
QUASIMODO.
Que veut l'audace De ces larrons? On le menace, Mais nous verrons!
CLAUDE FROLLO.
Impure race! Juifs et larrons! On me menace, Mais nous verrons!
[La colère des truands éclate.]
LES TRUANDS.
Arrête! arrête! arrête! Meure le trouble-fête! Il paiera de sa tête! En vain il se débat!
QUASIMODO.
Qu'on respecte sa tête! Et que chacun s'arrête, Ou je change la fête En un sanglant combat!
CLAUDE FROLLO.
Ce n'est point pour sa tête Que Frollo s'inquiète.
[Il met la main sur la poitrine.]
C'est là qu'est la tempête,: C'est là qu'est le combat!
[Au moment où la fureur des truands est au comble, Clopin Trouillefou parait au fond du théatre.]
CLOPIN.
Qui donc ose attaquer, dans ce repaire infame, L'archidiacre mon seigneur, Et Quasimodo le sonneur De Notre-Dame?
LES TRUANDS, [s'arrêtant.]
C'est Clopin, notre roi!
CLOPIN.
Manants, retirez-vous!
LES TRUANDS.
Il faut obéir!
CLOPIN.
Laissez-nous.
[Les truands se retirent dans les masures. La Cour des miracles reste déserte. Clopin s'approche mystérieusement de Claude.]
SCèNE II
CLAUDE FROLLO, QUASIMODO, CLOPIN TROUILLEFOU.
CLOPIN.
Quel motif vous avait jeté dans cette orgie? Avez-vous, monseigneur, quelque ordre à me donner? Vous êtes mon ma?tre en magie. Parlez; je ferai tout.
CLAUDE. [Il saisit vivement Clopin par le bras et l'attire sur le devant du théatre.]
Je viens tout terminer. écoute.
CLOPIN.
Monseigneur?
CLAUDE FROLLO.
Plus que jamais je l'aime! D'amour et de douleur tu me vois palpitant. Il me la faut cette nuit même.
CLOPIN.
Vous l'allez voir ici passer dans un instant; C'est le chemin de sa demeure.
CLAUDE FROLLO, [à part.]
Oh! l'enfer me saisit!
[Haut.]
Bient?t, dis-tu?
CLOPIN.
Sur l'heure.
CLAUDE FROLLO.
Seule?
CLOPIN.
Seule.
CLAUDE FROLLO.
Il suffit.
CLOPIN.
Attendrez-vous?
CLAUDE FROLLO.
J'attend. Que je l'obtienne ou que je meure!
CLOPIN.
Puis-je vous servir?
CLAUDE FROLLO.
Non.
[Il fait signe à Clopin de s'éloigner, après lui avoir jeté sa bourse. Resté seul avec Quasimodo, il l'amène sur le devant du théatre.]
Viens, j'ai besoin de toi.
QUASIMODO.
C'est bien.
CLAUDE FROLLO.
Pour une chose impie, affreuse, extrême.
QUASIMODO.
Vous êtes mon seigneur.
CLAUDE FROLLO.
Les fers, la mort, la loi, Nous bravons tout.
QUASIMODO.
Comptez sur moi.
CLAUDE FROLLO, [impétueusement.]
J'enlève la fille bohème!
QUASIMODO.
Ma?tre, prenez mon sang--sans me dire pourquoi.
[Sur un signe de Claudo Frollo, il se retire vers le fond du [théatre et laisse son ma?tre sur le devant de la scène.]
CLAUDE FROLLO.
0 ciel! avoir donné ma pensée aux ab?mes, Avoir de la magie essayé tous les crimes,. être tombé plus bas que l'enfer ne descend, Prêtre, à minuit, dans l'ombre épier une femme, Et songer, dans l'état où se trouve mon ame, Que Dieu me regarde à présent!
Eh bien, oui! qu'importe! Le destin m'emporte, Sa main est trop forte, Je cède à sa loi! Mon sort recommence! Le prêtre en démence N'a plus d'espérance Et n'a plus d'effroi! Démon qui m'enivres, Qu'évoquent mes livres, Si tu me la livres, Je me livre à toi! Re?ois sous ton aile Le prêtre infidèle! L'enfer avec elle, C'est mon ciel, à moi!
Viens donc, ? jeune femme! C'est moi qui te réclame! Viens, prends-moi sans retour! Puisqu'un Dieu, puisqu'un ma?tre, Dont le regard pénètre Notre coeur nuit et jour, Exige en son caprice Que le prêtre choisisse Du ciel ou de l'amour!
QUASIMODO, [revenant.]
Ma?tre, l'instant s'approche.
CLAUDE FROLLO.
Oui, l'heure est solennelle; Mon sort se décide, tais-toi.
CLAUDE FROLLO ET QUASIMODO.
La nuit est sombre, J'entends des pas; Quelqu'un dans l'ombre Ne vient-il pas?
[Ils vont écouter au fond du théatre.]
LE GUET, [passant derrière les maisons.]
Paix et vigilance! Ouvrons, loin du bruit, L'oreille au silence Et l'oeil à la nuit.
CLAUDE ET QUASIMODO.
Dans l'ombre on s'avance; Quelqu'un vient sans bruit. Oui, faisons silence; C'est le guet de nuit!
[Le chant s'éloigne.]
QUASIMODO.
Le guet s'en va.
CLAUDE FROLLO.
Notre crainte le suit.
[Claude Frollo et Quasimodo regardent avec anxiété vers la rue par laquelle doit venir la Esmeralda.]
QUASIMODO.
L'amour conseille, L'espoir rend fort Celui qui veille Lorsque tout dort. Je la devine, Je l'entrevoi; Fille divine, Viens sans effroi!
CLAUDE FROLLO.
L'amour
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