La Bastille | Page 7

Auguste Coeuret
d��sastreuses: 230,000 protestants quitt��rent la France, emportant �� l'��tranger, non seulement, les secrets de notre industrie, mais encore cette intr��pidit��, cette valeur militaire qui fut toujours l'apanage de la France.
Un grand nombre d'entre eux se r��fugi��rent en Allemagne et chaque fois que leurs fils vinrent en France �� la t��te des bataillons prussiens, ils nous firent cruellement payer le s��jour de ces missionnaires bott��s que leurs anc��tres durent loger au nom du roi. Ces missionnaires firent cependant l'admiration de Mme de S��vign��:
?Les Dragons, ��crivait-elle le 28 octobre 1685, ont ��t�� tr��s bons missionnaires,? et en parlant de l'��dit de r��vocation:
?Rien n'est si beau que se qu'il contient; jamais aucun roi n'a fait ni ne fera rien de plus m��morable.?
Et le vieux Le Tellier ne comprit pas qu'il signait un des plus grands malheurs de la France.]
L'un d'eux, Jean Cardel (de Tours) resta dix-neuf ans dans les cachots de Vincennes, charg�� de fers et accabl�� de coups par ordre du gouverneur, le sieur Bernaville, auquel la Reynie (Lieutenant g��n��ral de police) avait recommand�� ce prisonnier: ?Faites tous vos efforts, lui avait-il dit, afin de convertir M. Cardel, pour qui j'ai une consid��ration toute particuli��re.? Bernaville, qui prenait les conseils du p��re Lachaise, j��suite fran?ais, confesseur du roi, traduisit convertir par torturer.
[Illustration: Fig. 13.--Jean Cardel dans son cachot, d'apr��s un dessin des cachots de la Bastille conserv�� au mus��e Carnavalet.]
Transf��r�� �� la Bastille, Cardel y trouva quelque piti�� dans son gouverneur M. de Baisemeaux. Mais sous le gouvernement du sieur Benigne d'Auvergne de Saint-Mars, second�� par son neveu, un soudard du nom de Corb��, le malheureux Cardel fut replong�� dans les fers. Ce martyr y resta en tout trente ann��es.
Son seul crime fut, �� la v��rit��, son continuel refus d'abjurer sa religion!
Saint-Mars le fit enfermer presque nu dans le plus hideux des cachots o��, pendant les crues de la Seine, il resta de longs jours avec de l'eau jusqu'au cou!
Quand on le trouva mort sur sa paille, v��ritable fumier, il ��tait encha?n�� par les reins, par les mains et par les pieds. La cl��mence du gouverneur lui avait, para?t-il, ��pargn�� le carcan qui, �� lui seul, pesait 60 livres!
De telles atrocit��s dignes des ge?liers de la f��odalit�� et des bourreaux de l'inquisition se passent de commentaires.
Il nous suffit de livrer �� la r��probation universelle ceux qui les ex��cut��rent, ceux qui les ont command��es et ceux qui les ont laiss��es faire.
Un seul homme osa tenter d'adoucir les souffrances des prisonniers; malheureusement il resta trop peu de temps au d��partement de Paris. Cet homme de bien, c'��tait le premier pr��sident de la cour des aides, directeur de la librairie, M. Lamoignon de Malesherbes, qui, devenu ministre, eut pour premier souci de visiter les prisons: ?Il en fit sortir tous ceux qui ��taient innocents ainsi que ceux qui, par la longueur de leur captivit�� se trouvaient trop punis et ordonna que des soins d��licats et des attentions touchantes consolassent les infortun��s que leurs d��lits bien constat��s l'emp��chaient de faire ��largir.?
Comme on le voit, par les lettres et r��cits que nous venons de reproduire, le r��gime de la Bastille n'��tait pas ce qu'ont dit certains auteurs, car son histoire serait un long martyrologe.
Tontes ces ignominies, qui commen?aient �� se r��pandre dans le public, jointes �� la tyrannie croissante du pouvoir qui l'opprimait chaque jour davantage, devaient bient?t faire ��clater la juste col��re du peuple.
Jeter bas cette myst��rieuse et lugubre prison, la terreur et la menace de quatre si��cles, fut d��s lors son unique cri, son unique esp��rance!
La prise de la Bastille, par le peuple de Paris, fut donc, outre un acte d'humanit��, une habile mesure strat��gique.

LA PORTE SAINT-ANTOINE
Quand il fut d��cid�� que la porte Saint-Antoine serait report��e en dehors de la forteresse, qui devait ��tre ainsi compl��tement isol��e, on la construisit sur la gauche de la Bastille, en venant de Paris, et en arri��re du foss�� qui prot��geait d��j�� le rempart.
En 1380, elle affectait la forme d'une construction massive, plus haute que large, �� quatre faces. La face qui regardait l'ext��rieur ��tait orn��e de quatre tourelles ou ��chauguettes au-dessus d'une vo?te unique munie d'un pont-levis. Ce dernier reposait sur un pont dormant reliant la porte �� la contrescarpe pr��s de laquelle il ��tait lui-m��me coup�� par un autre pont-levis; entre ces deux ponts-levis, une herse.
[Illustration: Fig. 15.--La Bastille et la porte Saint-Antoine vues du Faubourg vers 1380, d'apr��s un dessin conserv�� au Mus��e Carnavalet.]
En 1573, ce syst��me de ponts fut remplac�� par un seul pont dormant en pierres termin��, du c?t�� du faubourg, par une vaste demi-lune orn��e de statues plac��es aux tournants nord et sud du foss�� ext��rieur. �� cette m��me ��poque, la porte fut transform��e en un magnifique arc de triomphe, sous lequel Henri III passa, le 4 septembre 1573, �� son retour de Pologne; cet arc fut remani�� en 1660.--Plus tard, en 1671,
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