furieuse, dont la face luisante et coutur��e apparut au guichet perc�� dans la muraille par o�� l'on passait les plats du temps de la table d'h?te. Quand elle l'eut referm�� violemment, L��onard Astier murmura: ?Cette fille est d'une impudence!...? au fond, tr��s g��n�� que ce nom de Fage eut ��t�� prononc�� devant sa femme. Et bien s?r qu'en tout autre moment Mme Astier n'aurait pas manqu�� de dire: ?Ah! Ah!... encore ce Fage... encore votre relieur...? et qu'une sc��ne de m��nage e?t suivi, sur laquelle Corentine comptait bien en jetant sa phrase perfide. Mais aujourd'hui il s'agissait de ne pas irriter le ma?tre, de l'amener, au contraire, par d'habiles pr��parations �� ce qu'on voulait de lui; en l'entretenant, par exemple, de la sant�� de Loisillon, le secr��taire perp��tuel de l'Acad��mie, qu'on disait de plus en plus bas. Le poste de Loisillon, son appartement �� l'Institut, devaient revenir �� L��onard Astier comme une compensation �� l'emploi qu'il avait perdu, et quoique li�� de coeur avec ce coll��gue mourant, l'espoir d'un bon traitement, d'un logis a��r��, commode, et quelques autres avantages, enveloppaient cette fin prochaine de perspectives agr��ables dont L��onard avait honte peut-��tre, mais qu'il envisageait na?vement dans l'intimit�� de son m��nage. Eh bien! non, m��me cela ne le d��ridait pas aujourd'hui.
?Pauvre M. Loisillon, sifflait Mme Astier, voil�� que maintenant il ne trouve plus ses mots: Lavaux nous racontait, hier, chez la duchesse, il ne sait plus dire que ?bi... bibelot... bi... bibelot!?--Elle ajouta, pin?ant ses l��vres, son long cou dress��: ?Et il est de la commission du dictionnaire.?
Astier R��hu ne sourcilla pas.
?Le trait a du bon... dit-il en faisant claquer sa machoire, l'air doctoral... Mais j'ai ��crit quelque part dans mon histoire: En France il n'y a que le provisoire qui dure...? Il pronon?ait histoare, provisoare... ?Voil�� dix ans que Loisillon est �� la mort... Il nous enterrera tous.? Il r��p��ta furieux, tirant sur son pain dur: ?tous... tous...?
D��cid��ment, Teyss��dre l'avait tout �� fait mal tourn��.
Alors Mme Astier parla de la grande s��ance des cinq Acad��mies, proche de quelques jours et �� laquelle assisterait le grand-duc L��opold de Finlande. Justement Astier-R��hu, directeur pour ce trimestre, devait pr��sider la s��ance et prononcer le discours d'ouverture avec un compliment �� Son Altesse. Et adroitement interrog�� sur ce discours dont il formait d��j�� le plan, L��onard en indiqua les grandes lignes, une charge �� fond contre l'��cole litt��raire moderne, de solides ��trivi��res donn��es publiquement �� ces b��litres, �� ces babouins!...
Ses larges prunelles de gros mangeur s'allumaient dans sa face carr��e o�� le sang montait sous l'��paisse broussaille des sourcils rest��s d'un noir de houille, en contraste avec le collier de barbe blanche.
?A propos, dit-il brusquement, et mon habit?... l'a-t-on visit��?... Quand je le mis la derni��re fois, pour enterrer Montribot...?
Mais, est-ce que les femmes ne pensent pas �� tout? Mme Astier l'avait soigneusement visit��, le matin m��me, cet habit de c��r��monie. La soie des palmes s'��raillait, la doublure ne tenait plus. Un vieil habit, dam!... qui datait de... Eh! mon Dieu, de sa r��ception... 12 octobre 1866... Le mieux serait de s'en commander un neuf pour la s��ance. Les cinq Acad��mies, une Altesse, tout Paris qui viendrait... On leur devait bien cela.
L��onard se d��fendait mollement, pr��textant de la d��pense trop forte. Avec l'habit, il faudrait renouveler le gilet, tout au moins le gilet, puisque le pantalon ne se porte plus.
?C'est n��cessaire, mon ami.?
Elle insistait. Sans y prendre garde ils devenaient ridicules �� force d'��conomie. Bien des choses autour d'eux vieillissaient; ainsi le meuble de sa chambre... elle en ��tait honteuse, quand une amie entrait ... pour une somme relativement minime...
?Ouais!... quelque sot!...? fit tout bas Astier-R��hu qui empruntait volontiers au r��pertoire classique. Le pli de son front se creusa, fermant comme d'une barre de volet sa face un moment large ouverte. Tant de fois il avait donn�� de quoi solder une facture de modiste, de couturi��re, renouveler des tentures, le linge des armoires, et puis rien n'��tait r��gl�� ni achet��, l'argent filait rue Fortuny chez le mange-tout; maintenant, assez, on ne l'attrapait plus. Il arrondit son dos, baissa les yeux dans son assiette qu'emplissait une tranche ��norme de fromage d'Auvergne, et ne parla plus.
Mme Astier connaissait ce silence t��tu, cette molle r��sistance de balle de coton sit?t qu'entre eux il ��tait question d'argent; mais cette fois, elle s'��tait jur�� de le faire r��pondre.
?Ah! vous vous mettez en boule... On sait ce que ?a veut dire, quand vous faites le h��risson!... Pas d'argent, n'est-ce pas? du tout, du tout, du tout??
Le dos s'arrondissait de plus en plus.
?Vous en trouvez cependant pour M. Fage...?
L��onard Astier tressaillit, redress��, regardant sa femme avec inqui��tude... De l'argent!... lui!... �� M. Fage!...
?Voyons, ?a co?te, vos reliures... continua-t-elle enchant��e de l'avoir forc�� dans ses r��sistances silencieuses, et quel besoin, je vous demande un peu, pour toutes ces paperasses??
Il se rassura. ��videmment
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.