�� l'auvergnate; mais la m��re ��tait l�� pour excuser et prot��ger. Astier-R��hu grondait, faisait claquer sa machoire, cette machoire en avant qui lui avait valu le surnom de Crocodilus aux ann��es de professorat; en derni��re menace il parlait de faire sa malle et de s'en retourner planter ses vignes �� Sauvagnat.
?Oh! L��onard, L��onard...? disait Mme Astier doucement narquoise; et il n'en ��tait pas autre chose. Un jour, pourtant, il faillit la boucler pour de bon, sa malle, quand apr��s trois ans d'architecture �� l'��cole des Beaux-Arts, Paul Astier refusa de concourir pour le prix de Rome. Le p��re b��gayait d'indignation: ?Malheureux, mais Rome... tu ne sais donc pas... Rome, c'est l'Institut!? Le gar?on se moquait bien de cela. Ce qu'il voulait, c'��tait la fortune, et l'Institut ne la donnait gu��re, �� preuve son p��re, son grand-p��re et son a?eul le vieux R��hu. Se lancer, brasser des affaires, beaucoup d'affaires, gagner de l'argent tout de suite, voil�� ce qu'il ambitionnait, lui, et pas de palmes sur habit vert!
L��onard Astier suffoquait. Entendre son fils prof��rer de tels blasph��mes, et sa femme, la fille des R��hu, les approuver! Pour le coup, la malle fut descendue du grenier, son ancienne malle de professeur de province, ferr��e de clous, de gonds, comme un portail de temple, et haute et profonde assez pour avoir tenu l'��norme manuscrit de ?Marc-Aur��le,? et tous les r��ves glorieux, les ambitions de l'historien en marche sur l'Acad��mie. Mme Astier eut beau dire, en pin?ant sa bouche: ?Oh! L��onard... L��onard...? rien ne l'emp��cha de la faire sa malle. Pendant deux jours elle encombra le milieu du cabinet, puis elle passa dans l'antichambre d'o�� elle ne bougea plus, chang��e d��finitivement en coffre �� bois.
De fait, pour commencer, Paul Astier triompha; par sa m��re et ses hautes relations mondaines, aussi son habilet�� et sa grace personnelles, il eut vite des travaux qui le mirent en vue. La duchesse Padovani, femme de l'ancien ambassadeur et ministre, lui confiait la restauration de ce merveilleux chateau de Mousseaux-sur-la-Loire, vieille demeure royale rest��e longtemps �� l'abandon et �� laquelle il sut restituer son caract��re avec une adresse, une ing��niosit�� vraiment bien surprenantes chez ce m��diocre ��colier des Beaux-Arts. Mousseaux lui valut le nouvel h?tel de l'ambassade Ottomane; enfin la princesse de Rosen lui confiait le mausol��e du prince Herbert mort tragiquement dans l'exp��dition de Christian d'Illyrie. D��s lors, le jeune homme se crut ma?tre de la fortune; le p��re Astier entra?n�� par sa femme donna quatre-vingt mille francs de ses ��conomies, pour l'achat d'un terrain, rue Fortuny, o�� Paul se fit construire un h?tel, plut?t une aile d'h?tel taill��e dans une ��l��gante maison de rapport, car c'��tait un gar?on pratique, et s'il voulait un h?tel comme tous les artistes chics, il fallait que cet h?tel lui servit des rentes.
Par malheur les maisons de rapport ne se louent pas toujours commod��ment, et le train de vie du jeune architecte, deux chevaux �� l'��curie, l'un de trait, l'autre pour la selle, le cercle, le monde, les rentr��es difficilement faites, tout cela lui ?tait le moyen d'attendre. De plus, le p��re Astier d��clara subitement qu'il ne donnerait rien d��sormais, et tout ce que la m��re put tenter ou dire pour son fils ch��ri se heurta contre cette d��cision irr��vocable, cette r��sistance �� sa volont�� personnelle, jusque-l�� pr��pond��rante dans le m��nage. Ce fut d��s lors une lutte continuelle, la m��re rusant, trafiquant sur la d��pense comme un intendant infid��le, pour ne jamais dire non aux demandes d'argent de son fils, L��onard se m��fiant et se d��fendant, v��rifiant les notes. En cet humiliant d��bat, la femme, plus distingu��e, se lassait la premi��re; et vraiment il fallait que son Paul f?t aux abois pour qu'elle se hasardat �� une nouvelle tentative.
En entrant dans la salle �� manger, longue et triste, �� peine ��clair��e de hautes fen��tres ��troites o�� l'on atteignait par deux marches--avant eux c'��tait une table d'h?te pour eccl��siastiques,--Mme Astier trouva son mari d��j�� �� table, l'air pr��occup��, presque grognon. D'ordinaire, pourtant, le ma?tre apportait aux repas une s��r��nit�� souriante, ��gale, comme son app��tit aux intactes dents de chien de montagne auxquelles rien ne r��sistait, ni le pain rassis, ni la viande coriace et les noirs contretemps divers dont l'assaisonne chaque journ��e de la vie.
?Le jour de Teyss��dre, sans doute...? pensa Mme Astier, et elle s'assit dans le frou de sa robe de r��ception, un peu surprise de ne pas recevoir le compliment dont il ne manquait jamais d'accueillir, le mercredi, sa toilette pourtant bien minable. Comptant que cette mauvaise disposition se dissiperait aux premi��res bouch��e, elle attendit pour commencer l'attaque. Mais le ma?tre, qui d��vorait quand m��me, montrait une humeur croissante: le vin sentait le bouchon... les boulettes de boeuf bouilli ��taient br?l��es.
?Tout ?a parce que votre M. Fage vous a fait poser ce matin,? cria de la cuisine �� c?t�� Corentine
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.