LA. B. C. du libertaire | Page 5

Jules Lermina
à l'état de
dogme.
L'égalité existe entre les hommes, au point de départ, c'est-à-dire que
tous les hommes viennent sur la terre avec la volonté de vivre, avec des
besoins matériels et moraux qui sont égaux en principe: l'homme qui a
faim est l'égal de l'homme qui a faim. Les nécessités primordiales de
l'existence sont les mêmes, et il y a égalité parfaite et complète dans

cette formule indiscutable:
--Tous les hommes, sans exception, ont la volonté et le droit de
satisfaire leurs besoins et d'utiliser leurs facultés, physiques et morales.
La mesure individuelle de ces besoins et de ces facultés est accessoire.
Le fait mathématique--la volonté et le droit de vivre--est égal pour tous.
En cela et en cela seul consiste vraiment l'égalité, et c'est elle qui doit
être respectée par l'exercice--appartenant à tous--de ce droit de vivre.
* * *
Ici, Camarade, tu trouves sous tes pieds un terrain solide: fils de la
nature, tu as--comme tous tes congénères, ni plus ni moins, mais autant
qu'eux--le droit de vivre et ce droit nul ne peut t'empêcher--ni empêcher
autrui--de l'exercer.
Or d'où peuvent te venir les moyens de vivre, sinon de la terre. Donc la
terre est à toi, comme à tous tes semblables. La faculté de l'exploiter et
d'en tirer subsistance est inhérente à ton être, et nul n'a droit de la
supprimer.
Donc quiconque s'approprie une partie de cet instrument collectif de
travail qu'est la terre commet un acte contraire au principe humain,
donc la propriété, c'est-à-dire la main-mise de qui que ce soit sur une
portion de terre, est un vol commis au préjudice de la collectivité.
Et voici que la propriété--sacro-sainte--t'apparaît avec son véritable
caractère d'accaparement et de spoliation, voici que ce dogme
intangible se révèle en son évidence de brutalité et de crime antisocial.
La terre est l'instrument de travail--c'est-à-dire de vie--de tous les
hommes. Quiconque se l'approprie vole l'humanité, et quand il prétend
donner à ce vol la sanction de la perpétuité, il commet un acte à la fois
si illogique et si monstrueux qu'on s'étonne à bon droit qu'il ait pu être
perpétré.

Mais pour autoriser, pour éterniser cette iniquité, la Société, depuis des
siècles, a créé cette autre iniquité, l'autorité, c'est-à-dire l'appel à la
force contre le droit, le recours à la violence contre les justes
revendications.
En s'appuyant sur l'idée de Dieu, créateur et propriétaire universel, elle
a imaginé, par un habile procédé d'escroquerie, la concession faite par
cette puissance mystérieuse au profit de quelques-uns de la terre divisée
en parcelles, et de cette injustice première, toutes les injustices ont
découlé.
Donc, Camarade, nie la propriété du sol comme tu as nié Dieu, comme
tu vas nier tout à l'heure toutes les fantaisies criminelles et persécutrices
dont la propriété est la source.
* * *
Par la propriété, la liberté a disparu, depuis le droit d'aller et de venir
arrêté par des murs et barrières que défendent des gendarmes et des
magistrats, jusqu'à la liberté du travail, le propriétaire étant maître de
laisser ses terres en friche et de refuser à quiconque la faculté d'en
extraire les éléments nécessaires à l'existence.
La propriété n'est pas seulement le vol, elle est le meurtre, car c'est
d'elle que procède l'exploitation de l'homme par l'homme, le droit
mensonger du possédant à ne concéder le droit au travail qu'à son profit,
en échange d'un salaire dérisoire; elle est la créatrice du prolétariat, la
faiseuse de misère, la manifestation atroce et cruelle de l'égoïsme, de
l'avidité et du vice, elle est la grande tueuse d'hommes.
La propriété est le meurtre, car c'est en vertu de ce droit prétendu,
appuyé uniquement sur la spoliation, sur la conquête et par conséquent
sur la force, que des groupes d'hommes se sont déclarés seuls jouisseurs
d'une portion plus ou moins vaste du sol, s'en sont prétendus les maîtres
absolus, élevant entre leurs territoires respectifs des barrières sous le
nom de frontières, et ont créé chez ces groupes, décorés du nom de
nations, des sentiments de haine, de rivalité qui se traduisent
perpétuellement par les pires violences, assassinats en nombre,

incendies, viols et autres manifestations de la bestialité humaine.
C'est le mensonge: car, alors qu'il est inscrit dans les constitutions
particularistes que nous subissons que le droit de propriété est sacré et
que nul n'en peut être privé, des millions d'hommes sont dépouillés de
leur droit à la terre, au profit d'une caste dominatrice et exploiteuse.
La propriété est l'expression de l'égoïsme à sa plus haute puissance:
c'est l'usurpation brutale du bien de tous, de la terre qui appartient à la
collectivité et sous aucun prétexte légitime ne peut être féodalisée au
profit de quelques-uns. C'est d'elle que naissent toutes les injustices,
tous les crimes, tous les forfaits dont l'histoire s'ensanglante...
Elle se perpétue par l'héritage qui n'est que la continuation dans le
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