des glaives étincelants!
Les premiers rayons de l'aurore vinrent briller sur leurs lames acérées.
L'écho s'éveilla autour d'eux au cliquetis de leurs armes, et la terre
fumait sous leurs pas.
L'épée du chevalier terrassa son discourtois ennemi comme un coup de
foudre. L'amant de Gertrude ne reçut point de blessure, et Plump ne se
releva plus. Mais, hélas! que le ciel les protège! À peine le combat
était-il terminé, que les autres arrivèrent en toute hâte.
Alors le cor de Charles retentit dans la forêt, et ses vassaux se
précipitèrent de tous côtés. «Arrête, baron, écoute-moi; regarde, vois-tu
ces guerriers? ils sont prêts au combat et n'attendent que mon signal.
Arrête, écoute-moi, évite de longs repentirs. Ta fille m'a donné sa foi
depuis longtemps, elle a reçu la mienne. Pourrais-tu déchirer nos deux
coeurs! Ses larmes et son sang iront-ils t'accuser devant Dieu et les
hommes? Si tu le veux, avance, et nous allons combattre.
Mais écoute encore un instant: je t'en conjure au nom du ciel, avant que
tu te rendes la proie du remords. Mon amour pour ta fille a toujours été
pur et sans tache. Mon père, accorde-moi sa main, le ciel m'a donné des
richesses et surtout une noblesse qui ne craint aucun reproche.»
Oh! comme Gertrude, pleine d'angoisses et de craintes, se flétrit de la
pâleur de la mort! Son père, bouillant de colère, semblait une fournaise
ardente. Elle se jeta à terre, et se tordit les mains en versant un torrent
de larmes.
«Oh! mon père, ayez pitié de votre fille! Que le ciel vous pardonne,
comme vous nous pardonnez! Croyez-moi, mon père, je ne me serais
jamais décidée à fuir, sans mon aversion pour Plump.
Combien de fois m'avez-vous bercée sur vos genoux et portée dans vos
bras! Combien de fois m'avez-vous appelée votre fille chérie, la
consolation de votre vieillesse! Oh! mon père, rappelez-vous ces temps
passés! Ne détruisez pas mon bonheur, et songez que du même coup
vous tuez votre fille!»
Le vieux baron détourna la tête, et passa la main sur son front bruni par
le soleil. Son coeur était touché et son regard attendri; mais il maîtrisa
son émotion pour empêcher les pleurs de faire honte à son caractère de
chevalier.
Enfin, la colère et le ressentiment durent céder à la tendresse paternelle:
un torrent de larmes vint inonder ses yeux. Il releva sa fille prosternée à
ses pieds; et, laissant un libre cours à son amour pour elle, il se sentit
presque défaillir d'un mal doux et enchanteur.
«Eh bien! que Dieu me pardonne mes torts, comme je te pardonne les
tiens. Je te rends toutes mes affections, je te les rends devant le Dieu du
ciel;» et se tournant vers le chevalier: «Qu'elle soit ton épouse, reçois sa
main; et avec elle ma bénédiction!
Viens, sois mon fils, je serai ton père. J'ai déjà oublié toute offense.
Ton père fut jadis mon ennemi mortel, il me causa bien des tourments;
c'était lui que je haïssais dans son fils.
Répare ses erreurs, mon fils, et que ma fille et moi nous trouvions la
récompense de ma bonté dans la bonté de ton coeur. Que celui qui
veille sur nous, que Dieu vous bénisse, dans vous et votre postérité.»
LA CHASSE INFERNALE[12]
Le cor retentit, on entend les cris du départ. Le coursier du comte
hennit et s'élance. Derrière lui se précipitent les valets et les piqueurs;
détachés de la lesse[13], les chiens frappent l'air de leurs aboiements,
ils se jettent à travers les champs, les ronces et les prairies.
C'était le jour consacré au repos et à la prière. Les rayons du soleil
doraient le clocher, tandis que le son harmonieux et mesuré des cloches
appelait les chrétiens à l'office du matin. Déjà s'élevaient vers le ciel les
chants pieux des fidèles assemblés.
Le comte passait à un endroit où les chemins se croisaient, les cris de
ses chasseurs s'élevaient plus joyeux. Tout à coup deux cavaliers sont à
ses côtés. Celui de droite était monté sur un coursier blanc, comme la
neige, celui de gauche sur un coursier, couleur de feu.
Le premier, dans tout l'éclat du printemps de la vie, brillait d'une beauté
céleste. Le second, pâle et livide, lançait des regards pareils aux éclairs
dans la tempête. Ce qu'ils étaient, je le soupçonne; mais, qui pourrait
l'affirmer?
«Soyez les bienvenus, Chevaliers; vous arrivez à propos. Sur la terre ou
dans le ciel il n'est rien de préférable au plaisir de la chasse.» Le comte
parlait ainsi d'un air d'enthousiasme, et exprimait par ses gestes son
ardeur et sa joie.
--Le son du cor s'accorde mal avec la voix pieuse des cloches et les
chants du matin, lui dit d'un ton plein de douceur son compagnon de
droite; reviens sur tes pas, ta chasse ne peut être heureuse
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.