mes larmes, et que ma langue desséchée bénisse Dieu en disant: tout est fini...
--Ma fille, prends courage et patience, cesse de pleurer et de gémir. Quand la violette est cueillie, aucune rosée, aucune pluie bienfaisante ne peut la réjouir; elle se fane et pour toujours.
Le bonheur s'envole avec la rapidité de l'hirondelle qui fuit sur ses ailes légères: pourquoi donc retenir ainsi le chagrin qui écrase notre coeur sous sa masse de plomb; laisse-le s'éloigner! Ce qui est mort est mort!
--Oh! non, non! respectable frère, ne mets point de bornes à ma douleur. Si je souffrais pour celui que j'aimais tout ce qu'une femme peut souffrir, ce ne serait pas trop!
Je ne le verrai donc plus! malheureuse! jamais! La tombe le couvre, la neige et la pluie y tombent: l'herbe siffle sur lui.
Azur de ses yeux rose de ses joues; douceur ineffable de ses lèvres, où êtes-vous? La tombe a tout dévoré, que le chagrin me dévore à mon tour!
--Ma fille, ne t'afflige pas ainsi. Ignores-tu que l'homme doit être prêt au bonheur comme à la peine, et qu'il est exposé à tout?
Tu es aimable et constante, et pourtant peut-être votre union n'e?t pas été heureuse: il était jeune; la jeunesse est changeante comme le temps d'avril.
--Oh! non, non! respectable frère; ne parle pas ainsi. Mon ami était fidèle et franc comme l'or: jamais la fausseté n'altéra sa candeur.
Ah! puisque la tombe l'encha?ne dans ses noirs ab?mes, je renonce à ma patrie, j'irai porter au loin le baton de pèlerinage.
Mais avant, je veux m'agenouiller sur son tombeau, je veux que l'herbe y croisse plus verte, arrosée de mes larmes et rafra?chie de mes soupirs.
--Ma fille, entre d'abord pour te reposer. Entends-tu le vent mugir autour de cette enceinte, et la pluie froide retentir sur les vitraux?
--Oh! non, non! respectable frère, ne me retiens pas; laisse tomber la pluie sur moi, car toute la pluie du ciel ne laverait pas ma faute.
--Ah! ma douce amie, reste et console-toi! Regarde-moi, ne connais-tu donc pas le frère gris? Hélas! c'est moi qui suis ton ami.
Dans la douleur d'un amour sans espoir, je revêtis ce vêtement. Bient?t un serment éternel allait exiler ma vie et mes chagrins dans la solitude.
Mais, Dieu soit béni! l'année du noviciat n'est pas encore expirée! Ma tendre amie, si tu as été sincère et si tu veux me donner ta main, nous partirons ensemble.
Dieu soit loué! Dieu soit béni! Fuyez chagrins et soucis! Salut, bonheur et joie: viens, mon ami, viens sur mon coeur. La mort seule pourra nous séparer.
L'ENLèVEMENT
?écuyer, selle mon cheval favori; je veux chercher le repos que je ne puis trouver dans ce chateau: j'y suis trop à l'étroit pour pouvoir respirer? Ainsi s'écriait le chevalier Charles d'Eichenhorst, le coeur rempli d'un noir pressentiment et agité comme un homme souillé de quelque forfait.
Il s'élance au galop du haut de la montagne; les étincelles jaillissaient sous les pieds de son cheval: il jette un regard dans la plaine, et la suivante de Gertrude se montre à ses yeux. Il frissonne de la tête aux pieds, comme saisi d'un accès de fièvre br?lante.
?Dieu vous garde, noble seigneur, qu'il vous donne la paix et la prospérité! Ma pauvre ma?tresse m'envoie vers vous pour la dernière fois, elle est à jamais perdue pour vous. Son père l'a promise au chevalier Plump, de Poméranie; il lui a donné sa parole.
Charles, s'est-il écrié, j'en jure par ma lance et par mon épée, si tu oses penser encore à elle, les souterrains de mon chateau te serviront de demeure, et les reptiles qui l'habitent seront tes compagnons. Je ne prendrai de repos ni jour ni nuit avant de t'avoir terrassé, et de t'avoir arraché le coeur!
La malheureuse fiancée est maintenant devant lui; elle laisse couler ses larmes et appelle la mort à grands cris. Le Seigneur exaucera bient?t ses voeux: si vous entendez le glas funèbre des cloches, vous comprendrez bien leur langage.
Va, dis-lui que je vais mourir, s'écriait-elle tout en pleurs. Porte-lui ce dernier adieu. Va, sous la garde de Dieu; donne-lui cet anneau et cette écharpe: qu'il les conserve pour l'amour de moi.?
Cette terrible nouvelle éclata à ses oreilles, semblable au fracas du tonnerre; ses yeux s'obscurcirent, et les montagnes semblèrent chanceler autour de lui. Mais aussit?t, s'élan?ant comme la tempête, il fit voler un nuage de poussière, et le désespoir lui rendit ses forces.
?Dieu te récompense, fidèle suivante; qu'il te récompense, puisque je ne puis moi-même te payer ton zèle, qu'il te comble de ses bénédictions: va, cours vers elle, dis-lui que je la sauverai; f?t-elle chargée de mille cha?nes.
Ne crains rien, hate-toi; quand des géants veilleraient sur elle, je voudrais encore la leur enlever. Dis-lui qu'à minuit je serai sous les murs du chateau. Il arrivera ce qu'il pourra: bonheur ou malheur, je brave le destin.
Pars, hate-toi.? à ces
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