tout. Voici ce qu'il m'a ��crit:
?Fernande, je vous envoie les derniers enseignements que m'a laiss��s mon p��re en mourant.
Lisez, mon amie; quand vous aurez lu, vous comprendrez. Je n'ai pas le courage de vous raconter le malheur qui nous frappe... Je vous aime, Fernande! En cet instant o�� je vous ��cris, je suis bien d��sesp��r��, et j'ai des sanglots au coeur. Je n'ai jamais aim��, et je n'aimerai jamais que vous. Mais je suis de ceux qui tiennent leur serment, dussent-ils en mourir. J'en mourrais, Fernande, si mon devoir qui m'ordonne de tuer mon amour ne m'ordonnait aussi de vivre.
Je n'ai eu que votre image dans le coeur, que votre nom sur les l��vres, depuis le premier jour o�� je vous ai vue...
Aujourd'hui, tout est fini: l'esp��rance et le bonheur. Je dois plus que mon sang �� ceux que je sers; je me dois tout entier. Mon p��re m'a donn��: je n'ai pas le droit de me reprendre.
Adieu, Fernande... Le pass�� ne doit plus exister pour nous. Dieu ne le veut pas...
Ah! tenez, je m'��tais promis de rester froid en vous ��crivant; je m'��tais promis... Non, je vous aime, Fernande... je vous aime... et je me meurs de ne pouvoir vous aimer! Que tout soit fini; soit! Mais sachez, ? ma fianc��e, que je pleure en tra?ant ces lignes, o�� j'ai mis tout ce que j'ai en moi!
Adieu.
JEAN.?
A mesure que la jeune fille lisait, sa voix devenait plus triste et plus bris��e. On e?t dit qu'en agitant ses souvenirs, le pass�� revenait plus amer �� sa pens��e, de m��me qu'en remuant un vase, on fait remonter la lie du vin �� la surface. Madame ��tait ��mue. Elle prit la main de la jeune fille: cette main ��tait glac��e.
--Ainsi, ajouta-t-elle, mon p��re nous s��parait encore... mais cette fois tout ��tait fini. Sa volont�� pouvait fl��chir: celle du mort ne le pouvait pas. D��sormais entre Jean et moi, il y avait un ab?me... Il est parti... Je n'ai pas essay�� de le retenir. Mais ma vie ��tait un long supplice. Un jour j'ai rev��tu des v��tements de paysan, et je suis venue le rejoindre. Il m'a reconnue... j'allais m'��loigner de lui �� jamais, quand cet humble soldat que vous avez vu m'a conseill�� d'aller...
Mais, Madame, il faut que je termine l'aveu: aveu cruel, car c'est �� vous, la petite-fille de Louis XVI, que je dois le faire. Ce n'est plus seulement la douleur, c'est la honte qui m'abat... la honte, car je vais humilier �� vos pieds, en implorant le pardon d'un crime, celui dont je sors...
Elle se recula, puis mettant un genou en terre:
--Madame, je suis la fille du citoyen Lucien Gr��goire, le r��gicide!
III
LES CONS��QUENCES DU PLAN D'AUBIN PLOGUEN
L'affabilit�� et la bont�� de Madame sont rest��es l��gendaires. Les rares M��moires publi��s en 1830 rapportent que le secr��taire de ses commandements recevait chaque matin plus de deux cents demandes d'audience, dont bien peu demeuraient sans r��ponse.
Cependant, elle recula de deux pas en entendant l'aveu de la jeune fille.
Peut-��tre se rappelait-elle le mot de Charles X, qu'il n'est pas inopportun de consigner ici, mot que pronon?a le vieux roi, comme pour se consoler d'une des fautes que lui fit commettre le loyal, mais parlementaire M. de Martignac.
Ce ministre pr��sentait �� la signature de Sa Majest�� une ordonnance qui nommait le fils d'un r��gicide �� une pr��fecture importante.
Charles X regarda le nom, puis, se tournant vers M. de Martignac:
--Est-ce que son p��re?... demanda-t-il...
Le ministre s'inclina.
--Oui, Sire, r��pondit-il.
Et comme le pauvre souverain constitutionnel h��sitait �� signer l'ordonnance, M. de Martignac entreprit de prouver que cette nomination serait un acte de bonne politique qui ferait voter avec le centre deux ou trois influents d��put��s de la gauche.
--Apr��s tout, reprit le roi en soupirant, ce n'est pas de sa faute... Je puis nommer pr��fet le fils d'un r��gicide: je ne nommerais pas son gendre; car on choisit son beau-p��re, et on ne choisit pas son p��re.
Et il signa...
... Il y eut un silence de quelques minutes, pendant lequel la princesse regardait fixement Fernande. Elle lut tant de douleurs, tant d'angoisses sur ce visage pali par les larmes, qu'elle eut piti��.
--Venez, mon enfant, et dites moi ce que je puis faire pour vous, pronon?a-t-elle doucement.
--Oh! Madame! Madame! s'��cria Fernande, qui se pr��cipita �� ses genoux en pleurant.
Elle pressa la main de la duchesse et la baisa.
--Allons, mon enfant, reprit Madame, asseyez-vous l��, et parlez-moi comme �� une amie.
Cette phrase toucha d'autant plus Fernande que la princesse r��p��tait ainsi, connaissant sa condition, la m��me phrase qu'elle avait dite quand elle l'ignorait encore.
--H��las! Madame, nous avons lutt��, nous avons ��t�� vaincus, ou, du moins, moi j'ai ��t�� vaincue, je vous l'ai avou��. Je l'aime et il me serait impossible de vivre sans lui.
Quand je faisais le sacrifice de mon bonheur, quand je me d��cidais �� me retirer dans un couvent,
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