Boullan, la
hantise, l'obsession, la douleur persécutrice de ces menaces.
Je ne veux pas en dire plus, mais ce que je dis là, je le maintiens
entièrement. Le soir de mon article, M. J.-K. Huysmans a été plus
particulièrement atteint par les fluides...»
Stanislas de Guaita protesta, par une note parue dans le Figaro, contre
ces accusations d'envoûtement.
Jules Bois répliqua, dans le Gil Blas du 13 janvier, en ces termes:
«M. Stanislas de Guaita prétend que les envoûtements ne sont point son
fait.
«Eh bien, en voici un qui est très clairement avoué, et par lui-même,
dans son propre livre Le Serpent de la Genèse, à la page 477. Cet
envoûtement--le plus terrible parce qu'il est collectif--était dirigé depuis
longtemps déjà contre l'abbé Boullan, dit le docteur Baptiste, ce
vieillard à qui les douleurs et les épreuves de sa vie avaient enlevé bien
des forces.
«M. de Guaita a écrit ceci:
«... Dès le retour de M. Wirth, examen fait des pièces nouvelles, les
occultistes réunis en Tribunal d'honneur, prononcèrent la condamnation
du docteur Baptiste à l'unanimité des voix (23 mai 1889). Elle lui fut
signifiée le lendemain...»
«... Que M. de Guaita ne vienne pas nous dire que sa condamnation
était une condamnation platonique... La haine inexorable qu'il avait
vouée au docteur Boullan, haine dont il avait créé le réseau serré et
menaçant dans le coeur de tous ses amis, à lui Guaita, cette haine
inexorable se resserrait de plus en plus, comme un étau de courroux
contre cette victime solitaire.
«De cette condamnation, il y a l'une de ces trois conclusions à tirer:
«1º Ou M. de Guaita a plaisanté... il n'y avait pas de quoi et je dois dire
que ce n'est point son habitude...;
«2º Ou M. de Guaita est insensé, condamnant quelqu'un en l'air, sans
efficacité, sans qu'il y ait une sanction à ses paroles;
«3º Ou M. de Guaita a écrit, en toute connaissance de cause et d'effet,
une sentence dont il savait la portée et dont il pouvait diriger les
funestes applications. Condamnant Boullan, il était sûr, dans ce cas, de
faire exécuter cette condamnation. Et alors je laisse à mes lecteurs et à
lui-même, Stanislas de Guaita, le soin de qualifier une aussi cruelle
conduite...»
Cette fois, de Guaita s'émut. Aux accusations de Huysmans et de Jules
Bois, il répondit, dans le Gil Blas du 15 janvier:
«Voici plusieurs jours que la presse colporte sur mon compte certains
ragots, d'un ridicule plus infamant, en vérité, pour les malveillants ou
les naïfs qui ont lancé ce canard, que pour moi-même, aux trousses
duquel il s'acharne.
«Nul n'ignore plus que je me livre aux pratiques de la plus odieuse
sorcellerie; que je suis à la tête d'un Collège de Rose-Croix, fervents du
Satanisme, et qui dévouent leurs loisirs à l'évocation du Noir Esprit;
que ceux qui nous gênent tombent, l'un après l'autre, victimes de nos
maléfices; que moi, personnellement, j'ai féru à distance nombre de
mes ennemis, qui sont morts envoûtés, en me désignant pour leur
assassin... Ce n'est pas tout. Je manipule et dose les plus subtils poisons
avec un art infernal, c'est convenu; je les volatilise avec un bonheur
particulier, en sorte d'en faire affluer, à des centaines de lieues
d'éloignement, la vapeur toxique, vers les narines de ceux-là dont le
visage me déplaît; je joue les Gilles de Rais au seuil du vingtième
siècle; j'entretiens des relations d'amitié et autres avec le redoutable
Docre, le chanoine chéri de M. Huysmans; enfin, je tiens prisonnier en
un placard un esprit familier qui en sort visible sur mon ordre!
«Est-ce assez?--Point. Tous ces beaux renseignements ne sont qu'une
préface. L'affaire où l'on en veut venir, c'est que l'ex-abbé Boullan--ce
thaumaturge lyonnais dont la mort récente a fait quelque bruit--n'a
succombé qu'à mes infâmes pratiques, à mes efforts combinés avec
ceux de mes noirs confrères, les Frères de la Rose-Croix.
«On va même jusqu'à laisser entendre qu'il serait expédient de pratiquer
l'autopsie du défroqué, de qui certaines lettres, rendues publiques avec
l'assentiment de M. J.-K. Huysmans leur destinataire, me dénoncent
positivement comme le magicien provocateur de la crise cardiaque qui
a ravi au monde des démoniaques son «Roi des Exorcistes».
«Car il faut bien dire que M. Boullan, dont j'ai démasqué dans mon
dernier livre (avec preuves à l'appui) les oeuvres et les doctrines,
souffrait dès longtemps d'une double atteinte au coeur et au foie. Cette
affection suivait son cours normal, avec des hauts et des bas. Mais, à
chaque nouvelle atteinte, notre pontife criait à l'envoûtement nouveau.
«M. Boullan est mort: paix à sa cendre!... J'ai dit d'ailleurs ce que j'ai
cru devoir dire, touchant nos relations et les événements qui
succédèrent... Cette parenthèse étant close, revenons à ce qui me
concerne personnellement.
«Les allégations produites dans les journaux, ces jours derniers,
seraient abominables, si

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