ces
vingt dernières années.
L'histoire de Gênes a, pour plusieurs siècles, des fondements certains: ce sont des
chroniques originales qui commencent à l'an 1101. Elles furent d'abord écrites par
Caffaro qui, dans cette année, faisait partie d'une expédition à la terre sainte, et qui
raconte naïvement ce qu'il a vu avec ses Génois. Entré, à son retour, dans les plus grandes
affaires de la république, il tint note des événements de chaque année, et, dans une
assemblée publique, il donna une lecture de ses commentaires. Il recueillit les
applaudissements de ses concitoyens et leur témoignage de sa véracité, avec l'ordre
formel de continuer son ouvrage. Caffaro, qui mourut en 1197, tint la plume jusqu'en
1194. Après lui, les chanceliers successifs de la république continuèrent la narration
jusqu'en 1264. Alors on chargea des commissaires spéciaux du soin de rédiger la suite de
ces annales. Ces commissions, renouvelées cinq fois en trente ans, et dont les travaux
étaient à mesure soumis à l'approbation du gouvernement, atteignirent l'année 1294. Là, il
paraît que les temps devinrent trop difficiles. Au gré des révolutions du pays, ce qu'on
avait loué la veille il fallait le diffamer le lendemain. Les chroniques officielles
s'arrêtèrent; du moins il ne nous en est plus parvenu.
C'est au savant et infatigable Muratori que nous devons la publication de ces précieux
originaux. Ce sont des notes sèches mais naïves, fort incomplètes pour notre curiosité,
mais en tout d'excellents guides. Muratori, d'ailleurs, dans sa vaste collection recueillie en
fouillant tant d'archives italiennes, fournit souvent les moyens de contrôler les
témoignages les uns par les autres, et d'éclaircir le récit tronqué des historiographes
génois. Ainsi il a donné les commentaires de Jacques de Varagine, archevêque de Gênes,
mêlés de fables sur les temps antérieurs, mais révélant des faits importants.
Après les chroniques viennent les historiens du pays; ceux-ci sont encore des originaux,
car si pour les temps antérieurs ils ont puisé dans les annales publiques, ils ont poussé
leurs écrits jusqu'à leur propre temps. C'est encore Muratori qui a recueilli les oeuvres de
ceux qui ont précédé l'invention de l'imprimerie. Les principaux sont les deux Stella et
Senarega.
Stella l'ancien écrivait dans les premières années du XVe siècle. Sa narration va jusqu'en
1410; il avertit que depuis 1396 il ne raconte que ce qu'il a vu. En remontant en arrière, il
dit avoir eu entre les mains les mémoires familiers d'hommes de partis opposés. Il
s'appuie aussi du témoignage des vieillards. Il prend soin de déclarer qu'il parle de son
chef, librement, et sans mission de personne. C'est en général un écrivain judicieux, qui
montre médiocrement de préjugés sans aucune partialité.
Le récit de Stella est continué par son fils jusqu'en 1435. Ce dernier a vécu jusqu'en 1461.
Il était devenu secrétaire de la république. C'est peut-être pour cela qu'il cessa d'être
historien.
Senarega a, dans la collection de Muratori, un précis historique qui embrasse la période
de 1314 à 1488. Lui aussi déclare, comme Stella, qu'il écrit librement, à la prière de son
savant ami Colutio Salutati.
Grâce à l'imprimerie, les écrits du XVIe siècle n'ont pas, comme les précédents, le risque
de rester ensevelis dans une bibliothèque.
Augustin Giustiniani, homme fort érudit, qui avait professé en France, compila en italien
des annales génoises jusqu'en 1528, époque d'une grande révolution et de la constitution
du gouvernement moderne des Génois. L'ouvrage a été accusé de quelque partialité. On
peut aussi reprocher à l'auteur de n'avoir pas rejeté les traditions fabuleuses. Quant à la
composition et au style, ce sont des annales et non pas une histoire.
Au contraire, Foglietta et Bonfadio, écrivant dans une latinité élégante, sont des
historiens qui appartiennent à la littérature. Le premier dans sa jeunesse s'était fait exiler
pour un traité italien de la république génoise, ouvrage de parti fort hostile au
gouvernement. Mais plus tard il composa dans un esprit très-différent l'histoire de Gênes
en latin. L'auteur mourut avant d'avoir pu raconter la révolution de 1528. Son frère, qui
servit d'éditeur à l'oeuvre posthume, emprunta, pour remplir cette lacune, quelques pages
qu'on a su depuis appartenir à Bonfadio.
Celui-ci, excellent écrivain, n'était pas Génois. Venu à Gênes pour y professer les lettres,
le nouveau gouvernement de 1528 le choisit pour son historiographe, et, en
renouvellement de l'antique usage, lui ordonna d'écrire les grandes choses que la
république régénérée se flattait sans doute d'accomplir. Bonfadio s'acquitta de ce soin, et
son histoire est tenue en grande estime chez les Italiens sous les rapports littéraires; elle
commence à 1528, elle est interrompue en 1550: au milieu de cette année l'auteur fut mis
à mort pour une cause restée obscure.
Nous retombons ici dans des chroniques semi-officielles; mais du moins celles-ci sont
précises et détaillées jusqu'à la minutie. Dans le XVIIe siècle, Philippe Casoni avait été
employé dans les chancelleries génoises. Son
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