de l'homme dont rien ne sort! Visage calme, attitude insignifiante, c'est hypocrisie voulue ou inconsciente. Le visage qui ne dit rien parle en dedans.
Celui-l��--avec ses cheveux gris, ses yeux bleus, son front haut et sans rides, son pas r��gulier, cette absence totale d'agitation externe--celui-l�� devait avoir des rides en dedans et son coeur devait battre dans sa poitrine d'un heurt saccad��, quelque chose comme le hal��tement f��brile du remords ou le tressautement de la terreur.
Comme je l'espionnai, comme je me glissai furtif aupr��s de lui, comme j'��tudiai chaque inflexion de sa voix!... rien! Pourquoi, apr��s tout, ne pas supposer qu'�� six heures juste il avait pris, dans trente ans d'exercice, l'habitude de quitter son office?... qu'�� cette heure-l�� quelqu'un l'attendait, quelque gouvernante peut-��tre, un peu grondeuse, un peu rev��che, se plaignant que l'eau e?t trop longtemps bouilli dans la Kettle, que les r?ties fussent trop br?l��es?...
Mais non, non, mille fois non. Quelqu'un ne l'attend pas; mais il va trouver quelqu'un, il ne peut faire autrement. Il faut qu'il parte �� six heures. Cela, je ne puis l'expliquer, mais je le r��p��te, je le sais. Cela ne peut pas ne pas ��tre.
Cette pens��e ��tait devenue fixe. J'��tais arriv�� �� consid��rer Golding comme un ennemi dont la vie m'appartenait. Il n'avait pas le droit de garder son secret: car l'anormal qui existait en lui se r��percutait en moi et me causait un malaise continuel. Je r��solus d'en finir.
Justement une circonstance me servit. J'avais pr��par�� cela de longue date. Golding ��tait tr��s obligeant, et--avant six heures--c'��tait un bon vivant, avec lequel bien souvent j'avais bu un verre de sherry et partag�� un plum-cake. Alors, je lui avais dit: Si je gagne mon proc��s, vous me permettrez de vous inviter �� un lunch?
J'avais dit lunch, car ce mot impliquait le matin, et j'avais besoin de l'avoir �� ma table vers midi ou une heure.
Je gagnai mon proc��s. Oh! je vous assure que je ne reculai devant rien pour r��clamer l'ex��cution de sa promesse. J'avais peur qu'il ne se d��fiat, et mon insistance aurait d? lui donner des soup?ons. Je craignais qu'il ne parlat de l'heure �� laquelle il devait se retirer. Mais non, il n'en fut pas question. Et ce fut le visage riant, le front calme, qu'il me suivit �� ma demeure, dans Hamilton-square.
L��, je fis les honneurs de mon mieux. J'��tais fort gai en v��rit��... trop gai peut-��tre pour que ce f?t naturel. Mais lui ne voyait rien, ne devinait rien. Il fredonna m��me le Yankee Doodle, d'une voix qui, ma foi, n'��tait pas sans charme... mais j'attendais le dessert avec impatience afin qu'il b?t du vin... de mon vin �� moi. Je jouais une rude partie, et, �� chaque minute, je frissonnais, je tremblais d'entendre sonner six heures... mais non, j'ai bien le temps.
Enfin! voici les patisseries et les fruits; il m'a tendu son verre, et j'ai vers��: il a port�� un toast aux ��toiles de l'Union, et encore il a bu, deux, trois, six verres... Comme ce que je sais est long �� op��rer!
Mais voil�� que sa t��te s'alourdit, ses yeux se ferment, je le conduis au canap��, j'allume un cigare et j'attends...
Et six heures sonnent...
II
Et il dort, d'un sommeil que je sais pesant et invincible. Il n'a pu rien entendre, d'ailleurs l'heure n'a pas sonn�� �� ma pendule. Je l'ai arr��t��e. Moi, j'��tais trop attentif pour ne pas saisir l'��cho venant de l'horloge voisine. Il n'a pas fait un mouvement.
C'est ��trange. Je m'attendais �� quelque chose. Ce rien me surprend. Et pourtant, non, je ne me suis pas tromp��... j'y songe! Si ce n'��tait pas encore six heures--pour lui! Alors doucement, oh! tout doucement, je me penche et je tire sa montre de son gousset. Comme je fais cela habilement! on dirait un habitu�� des Five-Points[1]... Il n'a pas tressailli. Mes doigts ont ��t�� si l��gers! L��! je regarde, il n'est que six heures moins deux minutes... l'horloge avance... Je puis encore esp��rer... quoi? L'��panouissement de l'inconnu... Voil��, l'aiguille marche, lentement, lentement. Encore deux secondes. D'un mouvement vif, je remets la montre �� sa place et...
[Note 1: Carrefour mal fam�� de New-York, comme l'ancienne place Maubert, �� Paris, ou les Seven Dials, �� Londres.]
Ah! ce fut un curieux spectacle en v��rit�� et que je n'oublierai de ma vie. Est-ce bien Golding qui se dressa tout �� coup, comme si un ressort se f?t tendu dans son ��pine dorsale? Il n'ouvrit pas les yeux, non, mais �� je ne sais quel rayonnement, je m'aper?us qu'il voyait �� travers ses paupi��res ferm��es. Il fit un pas, sans chanceler.
Je pris son chapeau et le mis sur sa t��te... un peu de travers, et j'eus la compassion de placer sa canne entre ses doigts. Et tout cela dut ��tre fait bien vite, car depuis le moment o�� il s'��tait redress��, il n'avait pas
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.