Histoire dun baiser | Page 5

Albert Cim
glaces de la devanture, une inscription se d��tachait en l��gende: _Anticoryza,--marque d��pos��e--premi��res m��dailles d'or_. C'��tait cette ?sp��cialit��? pr��cis��ment qui obligeait M. Pichancourt �� se pourvoir de trois aides ou ��l��ves, tandis que les autres pharmaciens de la localit�� se contentaient g��n��ralement d'un seul, qui jouissait m��me de nombreux loisirs.
Fanfar�� par toutes les trompettes de la r��clame, r��pandu �� profusion dans toutes les officines de France et de Navarre, universellement connu et employ��, sans pour cela, j'en ai une vague crainte, que sa r��putation f?t des plus m��rit��es, l'anticoryza ��tait, pour son inventeur tout au moins, une excellente affaire. M. Pichancourt avait d? construire, pour la fabrication de ce rem��de, un laboratoire sp��cial, une v��ritable usine, �� cinq kilom��tres de la ville, au Val d'Ambly, pr��s de la fronti��re suisse. Toutes ses journ��es se passaient dans cet ��tablissement, �� surveiller ouvriers et ouvri��res, comptables et exp��ditionnaires, camionneurs et gar?ons de peine; et comme le contre-choc de cette lourde charge se faisait in��vitablement ressentir jusqu'�� la boutique de la place de la Mairie, jusqu'�� la ?maison m��re?, le pharmacien avait ��t�� contraint d'abord d'obvier �� son absence et se faire remplacer, ensuite de prendre un second ��l��ve; total: trois ?potards?.
Nestor Richefeu, le plus ancien, celui �� qui M. Pichancourt avait d��l��gu�� ses pleins pouvoirs, ��tait un solide gaillard de vingt-quatre ans, trapu, courtaud, largement rabl��, joufflu et rubicond comme une pomme d'api.
Le second, Th��odule-Alcide Lardenois, qui avait un an de moins, ��tait tout aussi solidement ��toff�� et �� peu pr��s aussi mafflu et rougeaud que son sup��rieur. Comme lui, il appartenait �� une famille de paysans bressans.
Le troisi��me, F��lix Cabrillat, entrait dans sa vingt-deuxi��me ann��e et avait pour p��re un ma?tre d'armes de Besan?on. Il ��tait de taille moyenne, palot et maigrelet, avait l'air doux, r��serv��, distingu��, somme toute, et, depuis deux semaines qu'il faisait partie du personnel de la pharmacie Pichancourt, ne s'��tait pas encore regimb�� contre les in��vitables exigences de ses deux a?n��s.
Il y avait pr��s d'une ann��e que ceux-ci vivaient c?te �� c?te, et, jusqu'�� cette soir��e d'octobre, �� part quelques piques insignifiantes, la meilleure intelligence n'avait cess�� de r��gner entre eux. Mais, comme, la poule du fabuliste, Mlle Adrienne Desormeaux survint,
Et voil�� la guerre allum��e
entre nos deux coqs, Nestor Richefeu et Th��odule-Alcide Lardenois.
* * * * *
Le lendemain matin, sur les neuf heures, �� son retour de la messe, Mlle Desormeaux, escort��e de sa gouvernante, p��n��trait de nouveau dans la pharmacie. Il faut croire que le baume ?souverain? n'avait produit que fort peu d'effet, car la jeune fille tenait, pli��e dans son livre de pri��res, une ordonnance du docteur Morel.
Cette fois, ce fut Th��odule Lardenois qui s'avan?a. Nestor Richefeu, ?monsieur le joli coeur?, ��tait �� son tour absent de la boutique et occup�� dans le laboratoire.
--Monsieur votre p��re ne va donc pas mieux, mademoiselle?
--Non, monsieur, h��las! Il n'a pu fermer l'oeil de la nuit. Toujours son rhumatisme dans l'��paule! Et puis la fi��vre qui s'est d��clar��e, une grosse fi��vre... M. Morel est venu d��s le matin...
--Heureusement que c'est sans gravit��! crut devoir all��guer Lardenois pour la tranquilliser.
--C'est ce qu'assure aussi M. Morel. Il n'y a aucun danger, rien de s��rieux �� redouter. N'emp��che que papa souffre bien... Nous avons eu beau le frictionner, Na?s et moi, avec ce que le... ce que votre... le monsieur qui ��tait l��, nous a apport�� hier soir, rien n'y a fait. M. Morel a m��me d��clar�� qu'il aurait mieux valu ne rien faire du tout et attendre sa visite. Aussi vous serai-je infiniment reconnaissante de pr��parer l'ordonnance sans tarder...
--Mais tout de suite, mademoiselle, �� l'instant m��me! Et je vous la porterai moi-m��me aussit?t!
--Vous serez bien aimable, monsieur.
Juste au moment o�� Adrienne et sa gouvernante Na?s quittaient la pharmacie, Richefeu y entrait par la porte oppos��e �� celle de la rue, la porte du laboratoire.
--Tiens, mais... c'est Mlle Desormeaux qui ��tait ici?... Ah! veinard!
--Oui, elle-m��me, avoua Lardenois, qui ��tait d��j�� en train d'ex��cuter l'ordonnance du docteur Morel.
Lorsqu'il eut fini, il mit la fiole et les deux petits paquets de drogues dans sa poche, et, comme avait fait Richefeu la veille, s'appr��ta �� sortir, mais ostensiblement, par la porte du magasin et non par celle du corridor.
--O�� vas-tu donc? demanda le rempla?ant de M. Pichancourt.
--Porter l'ordonnance Desormeaux.
--Et Vincent, �� quoi sert-il alors? C'est la besogne du gar?on de laboratoire, et non celle des ��l��ves, de porter les ordonnances �� domicile.
--Tu y es bien all�� hier, toi, porter celle de Mlle Desormeaux!
--Moi, je suis all��? Qu'en sais-tu? ?a n'est pas vrai d'abord!
--Tu as un fier toupet! s'��cria Lardenois. Nous t'avons vu, Cabrillat et moi, te faufiler... Et puis Mlle Desormeaux vient encore de me le confirmer �� l'instant!... M��me que le docteur Morel a trouv�� que tu aurais mieux fait de te tenir tranquille plut?t que de te m��ler de soigner ses malades!...
--Je te dis
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