sa beauté. Elle avait pour amie et compagne la signera Emilia Pia da
Carpi, veuve du comte Antonio da Montefeltro, frère naturel du duc,
dame dont le Castiglione, le Bembo, le Bibbiena et d'autres encore
vantent les qualités brillantes et le sens exquis. La présence d'autres
femmes également distinguées ajoutait encore à l'agrément de ces
réunions: on y remarquait Marguerite et Constance Fregose, filles de
Gentile da Montefeltro, soeur du duc, Marguerite et Hippolyte
Gonzague, fort recherchées du Bembo, qui a dit de cette dernière dans
une de ses lettres latines à Frédéric Fregose: Ducibus ambobus, et
Aemilioe meis verbis multam salutem, et lepidissimoe Margaritoe, et
multorum amantium Hippolitoe[19]. Il y avait encore une certaine
signora Rafaella, dame d'honneur de la duchesse, qui paraît avoir été
fort avant dans les bonnes grâces du Castiglione[20].
[Note 19: Noies de l'abbé Serassi, à la suite des Lettres du Castiglione,
t. 11, p. 339.]
[Note 20: Id., ibid., p. 268.]
Il régnait à la cour d'Urbin une douce liberté que la seule présence de la
duchesse suffisait pour contenir dans les bornes de la discrétion et de la
politesse, tant était grand le respect, qu'elle inspirait. Ces assemblées
n'étaient pas seulement consacrées aux danses, à la musique et aux
autres divertissements qui d'ordinaire occupent la vie des personnages
de haut rang; mais, ce qui fait l'éloge de la cour d'Urbin, et ce qui la
distingue parmi tant d'autres à cette époque et depuis, c'est que souvent,
dans ces réunions, on agitait des questions intéressantes sur les arts, les
lettres, les usages des cours, et même les différentes formes de
gouvernement.
Parmi les hôtes habituels de la cour d'Urbin[21], on distinguait les deux
frères Frégose, Ottaviano et Federico, nobles Génois, alors bannis de
leur patrie. Ottaviano, accueilli avec bienveillance, dès sa jeunesse, par
Guidobalde, s'était exercé au métier des armes sous sa conduite, et se
faisait remarquer par son courage. Après la mort du duc, appelé à faire
de grandes choses, il délivra la ville de Gènes, sa patrie, de la
domination française, et nommé doge, il donna des preuves éclatantes
de sa valeur; particulièrement lorsque les Fieschi et les Adorai, chefs de
la faction qui lui était opposée, ayant pénétré une nuit dans la ville avec
l'espoir de le surprendre, il les repoussa avec tant de vigueur, qu'ayait
fait prisonniers Sciribaldo et Girolamo, l'un Fiesque et l'autre Adorno,
il mit en fuite les partisans armés qui les suivaient. Son courage le
rendit cher au pape Léon X, lequel, comme on peut le voir dans ses
brefs écrits en son nom par le Bembo, en fit de grands éloges, et le
confirma dans l'investiture du fief de sainte Agathe, qui lui avait été
conféré par Guidobalde. Au milieu du bruit des armes, il ne méprisa
pas les lettres: ce qui lui valut l'éloge et l'amitié du Bembo et du
Castiglione.
[Note 21: J'emprunte ces détails à l'historien Baldi, Vita di Guidobaldo,
lib. undº, t. II, p. 206 et suiv.]
Frédéric Frégose, son frère, ne fut pas moins remarquable par sa
grandeur d'âme et par son courage. Toutefois, il eut moins d'occasions
de montrer sa valeur, ayant embrassé, dès sa jeunesse, la carrière
pacifique de l'Église. Le pape Jules II, qui appréciait les qualités de son
esprit, le fit archevêque de Salerne. Il sut si bien se distinguer dans le
gouvernement de cette Église, qu'il reçut, comme récompense de Paul
III, le chapeau de cardinal. Mais ce qu'il y a de plus remarquable dans
sa vie, c'est qu'ayant' été fait amiral de la flotte génoise contre Cortogli,
audacieux corsaire qui infestait toutes ces mers, non-seulement il le mit
en fuite après avoir coulé à fond une partie de ses navires, mais l'ayant
poursuivi avec la plus grande vigueur jusque sur les côtes d'Afrique, il
dévasta et brûla les forêts de Biserte, refuge et résidence de cet écumeur
de mer. Il était doué d'une grande éloquence, et profondément versé
dans les lettres sacrées et profanes. La lettre qu'il écrivit au pape Jules
II sur la maladie et la mort de Guidobalde, est un monument qui atteste
le degré de perfection avec lequel il savait se servir de la langue latine.
Parmi les autres familiers du duc, on distinguait Julien de Médicis,
alors banni de Florence, que la noblesse de son esprit et sa générosité
ont fait surnommer le Magnifique comme son père Laurent. Il était
frère du cardinal Jean de Médicis, qui fut élu pape quelques années plus
tard, après la mort de Jules II, et qui prit le nom de Léon X. Julien était
très-aimé de Guidobalde qui faisait le plus grand cas de l'élévation de
son coeur, de la noblesse de ses manières et de la vivacité de son esprit.
L'auteur des Asolani, le Vénitien Pietro Bembo, qui devint plus tard un
des secrétaires des brefs
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