vient cette mani��re de voir? Il existe assur��ment une certaine conformit�� entre les doctrines de l'��vangile et celles de la R��volution Fran?aise.
Dix-sept cents ans avant Voltaire, le fils d'un charpentier, dans un temps o�� plus de la moiti�� du genre humain ��tait esclave, o�� la soci��t�� s'appuyait sur une hi��rarchie de naissance, avait prononc�� ces paroles m��morables: ?Vous ��tes tous fr��res, et vous n'avez qu'un p��re qui est l��-haut.? Cette relation entre les principes du christianisme et ceux de la d��mocratie n'avait point ��chapp�� aux hommes de 93. L'abb�� Maury et l'abb�� Fouchet en firent le texte de touchantes hom��lies. On conna?t le mot de Camille Desmoulins devant le tribunal r��volutionnaire: ?J'ai l'age du sans-culotte J��sus, trente-deux ans.? L'un des hommes qu'on s'attend le moins �� rencontrer sur ce terrain, Marat, qui n'��tait point d��vot, rend lui-m��me justice sur ce point aux croyances chr��tiennes. ?Si la religion, dit-il, influait sur le prince comme sur ses sujets, cet esprit de charit�� que pr��che le christianisme adoucirait sans doute l'exercice de la puissance. Elle embrasse ��galement tous les hommes dans l'amour du prochain; elle l��ve la barri��re qui s��pare les nations et r��unit tous les chr��tiens en un peuple de fr��res. Tel est le v��ritable esprit de l'��vangile.? Oui, mais cet esprit a-t-il ��t�� souvent appliqu�� au gouvernement des affaires humaines?
L'alliance du sentiment religieux et des aspirations r��volutionraires peut ��tre s��duisante; elle flatte les entra?nements de l'esprit et du coeur, elle convient �� la jeunesse; mais nous trouvons cette th��orie �� la fois excessive et incompl��te. Le christianisme a ��t�� une grande chose; la d��mocratie en est une autre; gardons-nous bien de m��ler ces deux courants, si nous tenons �� ne point tomber dans une confusion d'id��es.
Toute la question est de savoir si le christianisme seul, abandonn�� �� ses propres forces, e?t pu faire la R��volution Fran?aise; nous ne le croyons pas. Il fallait la protestation de la dignit�� humaine, viol��e depuis des si��cles par l'insolente domination des classes privil��gi��es. Il fallait le travail lent et souterrain de la raison humaine. Il fallait la libert�� d'examen. N'ayant �� son service que des armes spirituelles, le christianisme n'aurait jamais pu r��aliser un mouvement national qui tenait �� l'ordre philosophique par les principes, �� l'ordre moral par le droit et �� l'ordre mat��riel par la force.
C'est donc dans un autre ordre de faits et d'id��es qu'il nous faut chercher les racines de la R��volution Fran?aise.
Tout le monde sait que, issu de la conqu��te, le gouvernement de la France fut �� la fois militaire et th��ocratique. Le pouvoir ��tait divis�� entre une foule de petits tyrans locaux. C'est ce qu'on appelle la f��odalit��. La guerre ��tait l'occupation des hommes libres: guerre entre les ��tats, guerre entre les provinces, guerre de chateau �� chateau, de seigneur �� seigneur. Au milieu de ces troubles et de ces chocs perp��tuels, que devenait le pauvre vassal? Son champ ��tait ravag��, sa famille sans cesse sur le qui-vive, le fruit de son dur travail pill�� par des bandes arm��es. Je glisse tr��s-rapidement sur ces origines bien connues.
Le grand ��v��nement du moyen age, c'est l'affranchissement des communes. A l'ombre des chateaux forts s'��taient form��s dans les villes et les bourgs populeux des groupes d'artisans qui avaient besoin d'une certaine s��curit�� pour exercer leur industrie. Avec le temps, et par suite du mouvement naturel qui pousse les races asservies vers la lumi��re et la libert��, ces conf��d��rations r��clam��rent quelques garanties. Elles offrirent m��me d'acheter leurs franchises, soit du roi, soit du haut et puissant seigneur dont elles d��pendaient. Aimant mieux se priver d'un morceau de pain que de vivre sans droits, les ouvriers, les petits d��bitants des villes s'impos��rent les plus durs sacrifices, et m��me, dans quelques localit��s, se soulev��rent pour conqu��rir la dignit�� d'hommes. D'un autre c?t��, les nobles tenaient �� remplir leurs coffres-forts, et Louis le Gros avait int��r��t �� favoriser le d��veloppement des communes pour s'en faire un rempart contre les entreprises de certains seigneurs f��odaux. Il importe surtout de constater que le sentiment religieux fut tout �� fait ��tranger �� ces transactions; la politique seule y joua un r?le. A partir de ce jour, les communes, ces associations libres et r��guli��res, jouirent d'une juridiction �� elles et tinrent de la sanction royale le droit d'avoir un ��chevin, un tribunal, un sceau, un beffroi, une cloche, une garde mobile. En temps de guerre, elles ne devaient pr��ter qu'au roi de France leurs soldats, qui, banni��re en t��te, rejoignaient les corps d'arm��e.
Qui ne voit d'ici l'importance de cette r��volution accomplie sans bruit, sans ��clat, sans une goutte de sang vers��, par une sorte d'��lan spontan��, mais dont les cons��quences devaient s'��tendre de si��cle en si��cle! Avec le temps, en effet, l'industrie et le commerce, d��livr��s de leurs entraves, purent se redresser; le pauvre s'enrichissait par son ardeur �� l'ouvrage, son
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