de Provence, depuis Louis XVIII.
Un autre caract��re excentrique avec lequel me mit en relation cette histoire des Montagnards ��tait l'avocat Deschiens. Celui-l�� n'avait jamais demand�� de t��tes; c'��tait l'indiff��rence politique, l'ordre et l'urbanit�� en personne. Il habitait Versailles o�� il poss��dait plusieurs chambr��es de brochures et de papiers publics, comme on disait au temps de la R��volution. Tous ces documents ��taient class��s, ��tiquet��s. A chaque grande ��poque historique il se rencontre un homme (un, c'est assez) qui s'isole du mouvement g��n��ral des esprits pour se livrer �� des go?ts personnels, et en apparence bizarres; mais, sans lui, o�� trouverait-on les mat��riaux de l'histoire? C'est ce qu'on appelle le collectionneur.
La question que s'adressait �� lui-m��me l'avocat Deschiens, en s'��veillant d��s l'aube (de 89 �� 94) n'��tait pas du tout celle qui pr��occupait alors tout le monde: ?La cour triomphera-t-elle de l'Assembl��e nationale ou est-ce au contraire l'Assembl��e nationale qui aura raison du roi et de la reine? Qui l'emportera aujourd'hui de la Montagne ou de la Gironde? O�� s'arr��tera la terreur? Les Dantonistes d��livreront-ils la France des H��bertistes? Que pense et que fait le Comit�� de salut public? O�� nous conduit la Commune de Paris?? Non, rien de tout cela ne l'int��ressait tr��s-vivement. Sa question �� lui ��tait celle-ci:
?Combien para?tra-t-il aujourd'hui de feuilles nouvelles et de pamphlets?? Alerte et cette pens��e dans la t��te, il parcourait aussit?t les rues de Paris, ��coutant les crieurs, s'arr��tant aux boutiques des libraires, interrogeant les affiches, achetant tout, classant tout avec un soin minutieux. H�� bien! cet homme particulier a rendu un grand service. S'il se f?t laiss�� entra?ner comme tant d'autres par l'ambition de la tribune, nous compterions un pale orateur de plus dans un temps qui regorgeait d��j�� de parleurs et d'hommes d'��tat; tandis que la collection Deschiens �� laquelle j'ai beaucoup puis�� pour ��crire cette histoire ��tait �� peu pr��s unique dans le monde. Malheureusement, si je ne me trompe, cette collection a ��t�� dispers��e, apr��s la mort de celui qui l'avait form��e avec tant de z��le et de pers��v��rance.
Le second Empire ne tenait point du tout �� enrichir notre Biblioth��que nationale des archives de la R��volution Fran?aise.
II
LES GIRONDINS
L'Histoire des Montagnards parut en m��me temps que le premier volume de l'_Histoire de la R��volution Fran?aise_ par Louis Blanc, l'Histoire des Girondins par Lamartine et l'_Histoire de la R��volution Fran?aise_ par Michelet.
Pourquoi ce titre: _Histoire des Montagnards_?
Est-ce �� dire que les Girondins ne comptent point dans le mouvement r��volutionnaire? Aurions-nous par hasard ��t�� insensible aux charmes de leur ��loquence? N'aurions-nous rien compris au caract��re et aux sublimes discours de Vergniaud, �� l'esprit philosophique de Condorcet, le r��v��lateur de la loi du progr��s, �� la fougue patriotique d'Isnard, �� l'��nergie de Barbaroux, �� la science politique de Brissot, �� l'honn��tet�� de P��tion, �� la grande ame de madame Roland? ��tions-nous tellement aveugl�� que nous eussions le parti pris de d��nigrer les hommes de la Gironde au profit des hommes de la Montagne? Non, rien de tout cela.
Les Girondins repr��sentent un c?t�� de la R��volution Fran?aise, les Montagnards en repr��sentent un autre; c'est cet autre c?t�� que nous avons voulu mettre en lumi��re. Voil�� tout.
Autre consid��ration: les Girondins n'ont jou��, dans le grand drame r��volutionnaire, qu'un r?le de courte dur��e. Non-seulement la Montagne leur a surv��cu, mais encore c'est de cette cime formidable, au milieu des ��clairs et des tonnerres, que se sont r��v��l��s les oracles de l'esprit moderne. De ces hauteurs sont parties la force et la lumi��re. A peine si les Girondins ont r��sist��; ils ont pali devant les ��v��nements; ils se sont effac��s dans un rayon d'��loquence. Les Montagnards au contraire ont renouvel�� entre eux, avec le pays et avec le monde entier, la lutte des Titans. Foudroy��s, ils ont enseveli la R��volution dans les plis de leur drapeau, et apr��s eux la R��publique n'a plus ��t�� qu'un fant?me.
Lamartine lui-m��me comprit tr��s-bien que les Girondins n'avaient point tranch�� le noeud gordien de la R��volution: aussi, en d��pit du titre, continua-t-il son histoire jusqu'au 9 thermidor.
On est convenu de regarder les Girondins comme des mod��r��s et les Montagnards comme des buveurs de sang. Fort bien; mais on oublie peut-��tre que ce sont les Girondins qui ont d��clar�� la guerre �� toute l'Europe et vot�� la mort du roi. La v��rit�� est qu'il faut ��tre logique: si la R��volution Fran?aise ��tait, comme le croient encore certains esprits faibles, une abominable lev��e de boucliers contre les dieux et les lois ��ternelles du genre humain, il faudrait condamner tous les hommes qui y ont particip��, �� quelque parti qu'ils appartiennent et sous quelque banni��re qu'ils se soient ralli��s �� l'esprit du mal.
Le crime des Girondins fut d'avoir allum�� la guerre civile dans les d��partements o�� ils s'��taient r��fugi��s apr��s leur chute. Qu'on ait ��t�� injuste envers eux, je le veux bien; que les accusations port��es contre
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