des menaces de Dumouriez, et des mouvements de la Vendee.
L'humeur de Dumouriez s'etait accrue avec ses revers. Il venait d'apprendre que l'armee de Hollande se retirait en desordre, abandonnait Anvers et l'Escaut, en laissant dans Breda et Gertruydenberg les deux garnisons francaises; que d'Harville n'avait pu garder le chateau de Namur, et se repliait sur Givet et Maubeuge; que Neuilly enfin, loin de pouvoir se maintenir a Mons, s'etait vu oblige de se retirer sur Conde et Valenciennes, parce que sa division, au lieu de prendre position sur les hauteurs de Nimy, avait pille les magasins et pris la fuite. Ainsi, par suite des desordres de cette armee, il voyait s'evanouir le projet de former en Belgique un demi-cercle de places fortes, qui aurait passe de Namur en Flandre et en Hollande, et au centre duquel il se serait place pour agir avec plus d'avantage. Il n'avait bientot plus rien a offrir en echange aux Imperiaux, et il tombait sous leur dependance en s'affaiblissant. Sa colere augmentait en approchant de la France, en voyant les desordres de plus pres, et en entendant les cris qui s'elevaient contre lui. Deja il ne se cachait plus; et ses paroles, proferees en presence de son etat-major, et repetees dans l'armee, annoncaient les projets qui fermentaient dans sa tete. La soeur du duc d'Orleans et Mme de Sillery, fuyant les proscriptions qui les menacaient, s'etaient rendues en Belgique pour chercher une protection aupres de leurs freres. Elles etaient a Ath, et ce fut un nouvel aliment donne aux soupcons.
Trois envoyes jacobins, un nomme Dubuisson, refugie de Bruxelles, Proly, fils naturel de Kaunitz, et Pereyra, juif portugais, se rendirent a Ath, sous le pretexte faux ou vrai d'une mission de Lebrun. Ils se transporterent aupres du general en espions du gouvernement, et n'eurent aucune peine a decouvrir des projets que Dumouriez ne cachait plus. Ils le trouverent entoure du general Valence et des fils d'Orleans, furent fort mal recus, et entendirent les paroles les moins flatteuses pour les jacobins et la convention. Cependant le lendemain ils revinrent et obtinrent un entretien secret. Cette fois Dumouriez se decela entierement: Il commenca par leur dire qu'il etait assez fort pour se battre devant et derriere; que la convention etait composee de deux cents brigands et de Six cents imbeciles, et qu'il se moquait de ses decrets, qui bientot n'auraient plus de valeur que dans la banlieue de Paris. "Quant au tribunal revolutionnaire, ajouta-t-il avec une indignation croissante, je saurai l'empecher, et tant que j'aurai trois pouces de fer a mes cotes, cette horreur n'existera jamais." Ensuite il s'emporta contre les volontaires, qu'il appelait des laches; il dit qu'il ne voulait plus que des troupes de ligne, et qu'avec elles il irait mettre fin a tous les desordres de Paris. "Vous ne voulez donc pas de constitution? lui demandent alors les trois interlocuteurs.--La nouvelle constitution imaginee par Condorcet est trop sotte.--Et que mettrez-vous a la place? --L'ancienne de 1791, toute mauvaise qu'elle est.--Mais il faudra un roi, et le nom de Louis fait horreur.--Qu'il s'appelle Louis ou Jacques, peu importe.--Ou Philippe, reprend l'un des envoyes. Mais comment remplacerez-vous l'assemblee actuelle?" Dumouriez cherche un moment, puis ajoute: "Il y a des administrations locales, toutes choisies par la confiance de la nation; et les cinq cents presidens de districts seront les cinq cents representans.--Mais avant leur reunion, qui aura l'initiative de cette revolution?--Les Mameluks, c'est-a-dire mon armee. Elle emettra ce voeu, les presidens de district le feront confirmer, et je ferai la paix avec la coalition, qui, si je ne m'y oppose, est a Paris dans quinze jours."
Les trois envoyes, soit, comme l'a cru Dumouriez, qu'ils vinssent le sonder dans l'interet des jacobins, soit qu'ils voulussent l'engager a se devoiler davantage, lui suggerent alors une idee. Pourquoi, lui disent-ils, ne mettrait-il pas les jacobins, qui sont un corps deliberant tout prepare, a la place de la convention? Une indignation melee de mepris eclate a ces mots sur le visage du general, et ils retirent leur proposition. Ils lui parlent alors du danger auquel son projet exposerait les Bourbons qui sont detenus au Temple, et auxquels il parait s'interesser. Dumouriez replique aussitot que, periraient-ils tous jusqu'au dernier, a Paris et a Coblentz, la France trouverait un chef et serait sauvee; qu'au reste, si Paris commettait de nouvelles barbaries sur les infortunes prisonniers du Temple, il y serait sur-le-champ, et qu'avec douze mille hommes il en serait le maitre. Il n'imiterait pas l'imbecile de Broglie, qui, avec trente mille hommes, avait laisse prendre la Bastille; mais avec deux postes, a Nogent et a Pont-Saint-Maxence, il ferait mourir les Parisiens de faim. "Au reste, ajoute-t-il, vos jacobins peuvent expier tous leurs crimes; qu'ils sauvent les infortunes prisonniers, et chassent les sept cent quarante-cinq tyrans de la convention, et ils sont pardonnes."
Ses interlocuteurs lui
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