de n'��tre plus aim��; il souffrait plus encore d'��tre jaloux. Sans doute, aux premi��res et belles heures de son amour, il n'avait pas ignor�� que F��licie e?t un amant, Girmandel, huissier rue de Provence; et il en avait ��t�� malheureux. Mais, ne le voyant jamais, il s'en faisait une id��e si confuse et si mal d��termin��e que sa jalousie se perdait dans le vague. F��licie lui disait qu'avec Girmandel elle n'avait jamais pris aucune part �� ce qui se passait, ni m��me essay�� de feindre; il la croyait. Et c'��tait pour lui une vive satisfaction. Elle lui disait encore que depuis longtemps, depuis des mois, Girmandel n'��tait pour elle qu'un ami, et il la croyait. Enfin, il trompait l'huissier et sentait agr��ablement cet avantage. Il avait appris aussi que F��licie, qui achevait sa seconde ann��e de Conservatoire, ne s'��tait pas refus��e �� son professeur. Mais la peine qu'il en avait ressentie ��tait adoucie par la consid��ration d'un usage auguste et s��culaire. Maintenant, Robert de Ligny lui causait d'intol��rables souffrances. Depuis quelque temps, il le trouvait sans cesse pr��s d'elle. Qu'elle aimat Robert, il n'en pouvait douter. Et si parfois il pensait qu'elle ne s'��tait pas encore donn��e �� cet homme, c'��tait sans raison et seulement pour soulager de temps en temps sa souffrance.
Des applaudissements r��guliers ��clat��rent au fond du th��atre et quelques messieurs de l'orchestre, avec un l��ger murmure des l��vres, battirent des mains lentement et sans bruit. Nanteuil venait de donner sa derni��re r��plique �� Jeanne Perrin.
--Brava! brava! Elle est d��licieuse, cette petite, soupira madame Doulce.
Dans sa jalouse rage, Chevalier fut mauvais camarade. Il posa un doigt sur son front:
--Elle joue avec ?a.
Puis, ��tendant la main sur son coeur:
--C'est avec ?a qu'il faut jouer.
--Merci, mon ami, merci! murmura madame Doulce, reconnaissant dans ces maximes sa louange manifeste.
Elle disait, en effet, qu'on ne joue bien qu'en jouant avec son coeur elle professait que, pour exprimer fortement une passion, il faut l'��prouver, et qu'il est n��cessaire de sentir les impressions qu'on doit rendre. Elle se donnait volontiers en exemple. Reine tragique, apr��s avoir vid�� sur la sc��ne une coupe de poison, elle avait eu toute la nuit les entrailles en feu. Elle disait n��anmoins: ?L'art dramatique est un art d'imitation, et l'on imite d'autant mieux un sentiment qu'on ne l'��prouve pas.? Et, pour illustrer cette maxime, elle trouvait encore des exemples dans sa carri��re triomphale.
Elle poussa un long soupir:
--Cette petite est admirablement dou��e. Mais il faut la plaindre: elle vient dans de mauvais jours. Il n'y a plus de public, plus de critique, plus de pi��ces, plus de th��atres, plus d'artistes. C'est la d��cadence de l'art.
Chevalier secoua la t��te:
--Ne la plaignez pas: elle aura tout ce qu'on peut d��sirer, le succ��s, la fortune. Elle est rosse. La rosserie m��ne �� tout. Tandis que les gens de coeur n'ont qu'�� se mettre une pierre au cou et �� se jeter dans la rivi��re. Mais moi aussi, j'irai loin, moi aussi, je monterai haut. Moi aussi, je serai rosse.
Il se leva et sortit sans attendre la fin du spectacle. Il ne remonta pas �� la loge de F��licie, de peur d'y rencontrer Ligny dont la vue lui ��tait insupportable, et parce que, de la sorte, il pouvait s'imaginer que Ligny n'y ��tait pas revenu.
��prouvant un malaise physique �� s'��loigner d'elle, il fit cinq ou six tours sous les galeries ��teintes et d��sertes de l'Od��on, descendit les degr��s dans la nuit et prit la rue de M��dicis. Les cochers sommeillaient sur leurs si��ges, en attendant la fin du spectacle, et, sur la cime des platanes, la lune courait dans les nu��es. Gardant un reste d'espoir absurde et doux, cette nuit-l�� comme les autres nuits, il allait attendre F��licie chez sa m��re.
III
Madame Nanteuil habitait avec sa fille, au cinqui��me ��tage d'une maison du boulevard Saint-Michel, un petit appartement dont les fen��tres s'ouvraient sur le jardin du Luxembourg. Elle re?ut Chevalier avec bienveillance, lui sachant gr�� d'aimer F��licie et de n'��tre pas aim�� d'elle, et ignorant, par principe, qu'il e?t ��t�� l'amant de sa fille. Elle le fit asseoir pr��s d'elle, dans la salle �� manger o�� br?lait dans le po��le un feu de coke. A la clart�� de la lampe, des revolvers d'ordonnance, des sabres avec la dragonne �� glands d'or, luisaient sur le mur, autour d'une cuirasse de femme, arm��e de rondelles de fer-blanc �� l'endroit des seins, pi��ce d'armure que, l'hiver pr��c��dent, F��licie, encore ��l��ve du Conservatoire, avait port��e pour repr��senter Jeanne d'Arc chez une duchesse spirite. Veuve d'officier et m��re d'actrice, madame Nanteuil, de son vrai nom madame Nanteau, conservait ces troph��es.
--F��licie n'est pas encore rentr��e, monsieur Chevalier. Je ne l'attends pas avant minuit. Elle est en sc��ne jusqu'�� la fin du spectacle.
--Je le sais: j'��tais de la premi��re pi��ce. J'ai quitt�� le th��atre apr��s le ?un? de la M��re confidente.
--Oh! monsieur
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