Han dIslande | Page 6

Victor Hugo
sentence: ?Voil�� o�� conduit l'amour!?
Le militaire allait se facher s��rieusement contre ses contradicteurs femelles; il les avait d��j�� appel��es _vieilles sorci��res de la grotte de Quiragoth_, et elles n'��taient pas dispos��es �� endurer patiemment une si grave insulte, quand une voix aigre et imp��rieuse, criant _paix, paix, radoteuses_! vint mettre fin au d��bat. Tout se tut, comme lorsque le cri subit d'un coq s'��l��ve parmi les glapissements des poules.
Avant de raconter le reste de la sc��ne, il n'est peut-��tre pas inutile de d��crire le lieu o�� elle se passait; c'��tait--le lecteur l'a sans doute d��j�� devin��--dans, un de ces ��difices lugubres que la piti�� publique et la pr��voyance sociale consacrent aux cadavres inconnus, dernier asile de morts qui la plupart ont v��cu malheureux; o�� se pressent le curieux indiff��rent, l'observateur morose ou bienveillant, et souvent des amis, des parents ��plor��s, �� qui une longue et insupportable inqui��tude n'a plus laiss�� qu'une lamentable esp��rance. A l'��poque d��j�� loin de nous, et dans le pays peu civilis�� o�� j'ai transport�� mon lecteur, on n'avait point encore imagin��, comme dans nos villes de boue et d'or, de faire de ces lieux de d��p?t des monuments ing��nieusement sinistres et ��l��gamment fun��bres. Le jour n'y descendait pas �� travers une ouverture de forme tumulaire, le long d'une vo?te artistement sculpt��e, sur des esp��ces de couches o�� l'on semble avoir voulu laisser aux morts quelques-unes des commodit��s de la vie, et o�� l'oreiller est marqu�� comme pour le sommeil. Si la porte du gardien s'entr'ouvrait, l'oeil, fatigu�� par des cadavres nus et hideux, n'avait pas, comme aujourd'hui, le plaisir de se reposer sur des meubles ��l��gants et des enfants joyeux. La mort ��tait l�� dans toute sa laideur, dans toute son horreur; et l'on n'avait point encore essay�� de parer son squelette d��charn�� de pompons et de rubans.
La salle o�� se trouvaient nos interlocuteurs ��tait spacieuse et obscure, ce qui la faisait para?tre plus spacieuse encore; elle ne recevait de jour que par la porte carr��e et basse qui s'ouvrait sur le port de Drontheim, et une ouverture grossi��rement pratiqu��e dans le plafond, d'o�� une lumi��re blanche et terne tombait avec la pluie, la gr��le ou la neige, selon le temps, sur les cadavres couch��s directement au-dessous. Cette salle ��tait divis��e dans sa largeur par une balustrade de fer �� hauteur d'appui. Le public p��n��trait dans la premi��re partie par la porte carr��e; on voyait dans la seconde six longues dalles de granit noir, dispos��es de front et parall��lement. Une petite porte lat��rale servait, dans chaque section, d'entr��e au gardien et �� son aide, dont le logement remplissait les derri��res de l'��difice, adoss�� �� la mer. Le mineur et sa fianc��e occupaient deux des lits de granit; la d��composition s'annon?ait dans le corps de la jeune fille par les larges taches bleues et pourpr��es qui couraient le long de ses membres sur la place des vaisseaux sanguins. Les traits de Gill paraissaient durs et sombres; mais son cadavre ��tait si horriblement mutil��, qu'il ��tait impossible de juger si sa beaut�� ��tait aussi r��elle que le disait la vieille Olly.
C'est devant ces restes d��figur��s qu'avait commenc��, au milieu de la foule muette, la conversation dont nous avons ��t�� le fid��le interpr��te.
Un grand homme, sec et vieux, assis les bras crois��s et la t��te pench��e sur un d��bris d'escabelle dans le coin le plus noir de la salle, n'avait paru y pr��ter aucune attention jusqu'au moment o�� il se leva subitement en criant: Paix, paix, radoteuses! et vint saisir le bras du soldat.
Tout le monde se tut; le soldat se retourna et partit d'un brusque ��clat de rire �� la vue de son singulier interrupteur, dont le visage have, les cheveux rares et sales, les longs doigts et le complet accoutrement de cuir de renne, justifiaient amplement un accueil aussi gai. Cependant un murmure s'��levait dans la foule des femmes, un moment interdites:--C'est le gardien du Spladgest [Nom de la morgue de Drontheim].
--Cet infernal concierge des morts!--Ce diabolique Spiagudry!--Ce maudit sorcier...
--Paix, radoteuses, paix! Si c'est aujourd'hui jour de sabbat, hatez-vous d'aller retrouver vos balais; autrement ils s'envoleront tout seuls. Laissez en paix ce respectable descendant du dieu Thor.
Puis Spiagudry, s'effor?ant de faire une grimace gracieuse, adressa la parole au soldat:
--Vous disiez, mon brave, que cette mis��rable femme...
--Le vieux dr?le! murmura Olly; oui, nous sommes pour lui de _mis��rables femmes_, parce que nos corps, s'ils tombent en ses griffes, ne lui rapportent �� la taxe que trente ascalins, tandis qu'il en re?oit quarante pour la m��chante carcasse d'un homme.
--Silence, vieilles! r��p��ta Spiagudry. En v��rit��, ces filles du diable sont comme leurs chaudi��res; lorsqu'elles s'��chauffent, il faut qu'elles chantent. Dites-moi, vous, mon vaillant roi de l'��p��e, votre camarade, dont cette Guth ��tait la ma?tresse, va sans doute se tuer du d��sespoir de l'avoir perdue?...
Ici ��clata l'explosion longtemps comprim��e.--Entendez-vous le m��cr��ant,
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