Germinal | Page 8

Emile Zola
les voir? reprit le p��re au bout d'un silence.
La m��re pin?a la bouche, d'un air de doute d��courag��.
--Oui, ils m'ont rencontr��e, ils portent des v��tements aux enfants pauvres... Enfin, je m��nerai ce matin chez eux L��nore et Henri. S'ils me donnaient cent sous seulement.
Le silence recommen?a. Maheu ��tait pr��t. Il demeura un moment immobile, puis il conclut de sa voix sourde:
--Qu'est-ce que tu veux? c'est comme ?a, arrange-toi pour la soupe... ?a n'avance �� rien d'en causer, vaut mieux ��tre l��-bas au travail.
--Bien s?r, r��pondit la Maheude. Souffle la chandelle, je n'ai pas besoin de voir la couleur de mes id��es.
Il souffla la chandelle. D��j��, Zacharie et Jeanlin descendaient; il les suivit; et l'escalier de bois craquait sous leurs pieds lourds, chauss��s de laine. Derri��re eux, le cabinet et la chambre ��taient retomb��s aux t��n��bres. Les enfants dormaient, les paupi��res d'Alzire elle-m��me s'��taient closes. Mais la m��re restait maintenant les yeux ouverts dans l'obscurit��, tandis que, tirant sur sa mamelle pendante de femme ��puis��e, Estelle ronronnait comme un petit chat.
En bas, Catherine s'��tait d'abord occup��e du feu, la chemin��e de fonte, �� grille centrale, flanqu��e de deux fours, et o�� br?lait constamment un feu de houille. La Compagnie distribuait par mois, �� chaque famille, huit hectolitres d'escaillage, charbon dur ramass�� dans les voies. Il s'allumait difficilement, et la jeune fille qui couvrait le feu chaque soir, n'avait qu'�� le secouer le matin, en ajoutant des petits morceaux de charbon tendre, tri��s avec soin. Puis, apr��s avoir pos�� une bouillotte sur la grille, elle s'accroupit devant le buffet.
C'��tait une salle assez vaste, tenant tout le rez-de-chauss��e, peinte en vert pomme, d'une propret�� flamande, avec ses dalles lav��es �� grande eau et sem��es de sable blanc. Outre le buffet de sapin verni, l'ameublement consistait en une table et des chaises du m��me bois. Coll��es sur les murs, des enluminures violentes, les portraits de l'Empereur et de l'Imp��ratrice donn��s par la Compagnie, des soldats et des saints, bariol��s d'or, tranchaient cr?ment dans la nudit�� claire de la pi��ce; et il n'y avait d'autres ornements qu'une bo?te de carton rose sur le buffet, et que le coucou �� cadran peinturlur��, dont le gros tic-tac semblait emplir le vide du plafond. Pr��s de la porte de l'escalier, une autre porte conduisait �� la cave. Malgr�� la propret��, une odeur d'oignon cuit, enferm��e depuis la veille, empoisonnait l'air chaud, cet air alourdi, toujours charg�� d'une acret�� de houille.
Devant le buffet ouvert, Catherine r��fl��chissait. Il ne restait qu'un bout de pain, du fromage blanc en suffisance, mais �� peine une lichette de beurre; et il s'agissait de faire les tartines pour eux quatre. Enfin, elle se d��cida, coupa les tranches, en prit une qu'elle couvrit de fromage, en frotta une autre de beurre, puis les colla ensemble: c'��tait ?le briquet?, la double tartine emport��e chaque matin �� la fosse. Bient?t, les quatre briquets furent en rang sur la table, r��partis avec une s��v��re justice, depuis le gros du p��re jusqu'au petit de Jeanlin.
Catherine, qui paraissait toute �� son m��nage, devait pourtant r��vasser aux histoires que Zacharie racontait sur le ma?tre-porion et la Pierronne, car elle entrebailla la porte d'entr��e et jeta un coup d'oeil dehors. Le vent soufflait toujours, des clart��s plus nombreuses couraient sur les fa?ades basses du coron, d'o�� montait une vague tr��pidation de r��veil. D��j�� des portes se refermaient, des files noires d'ouvriers s'��loignaient dans la nuit. ��tait-elle b��te, de se refroidir, puisque le chargeur �� l'accrochage dormait bien s?r, en attendant d'aller prendre son service, �� six heures! Et elle restait, elle regardait la maison, de l'autre c?t�� des jardins. La porte s'ouvrit, sa curiosit�� s'alluma. Mais ce ne pouvait ��tre que la petite des Pierron, Lydie, qui partait pour la fosse.
Un bruit sifflant de vapeur la fit se tourner. Elle ferma, se hata de courir: l'eau bouillait et se r��pandait, ��teignant le feu. Il ne restait plus de caf��, elle dut se contenter de passer l'eau sur le marc de la veille; puis, elle sucra dans la cafeti��re, avec de la cassonade. Justement, son p��re et ses deux fr��res descendaient.
--Fichtre! d��clara Zacharie, quand il eut mis le nez dans son bol, en voil�� un qui ne nous cassera pas la t��te!
Maheu haussa les ��paules d'un air r��sign��.
--Bah! c'est chaud, c'est bon tout de m��me.
Jeanlin avait ramass�� les miettes des tartines et trempait une soupe. Apr��s avoir bu, Catherine acheva de vider la cafeti��re dans les gourdes de fer-blanc. Tous quatre, debout, mal ��clair��s par la chandelle fumeuse, avalaient en hate.
--Y sommes-nous �� la fin! dit le p��re. On croirait qu'on a des rentes!
Mais une voix vint de l'escalier, dont ils avaient laiss�� la porte ouverte. C'��tait la Maheude qui criait:
--Prenez tout le pain, j'ai un peu de vermicelle pour les enfants!
--Oui, oui! r��pondit Catherine.
Elle avait recouvert le feu, en calant, sur un
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