Germinal | Page 7

Emile Zola
au fond.
--Ah, ouiche! Philom��ne! r��pondit Zacharie, elle s'en moque, elle dort!... C'est cochon de dormir jusqu'�� six heures!
Il passait sa culotte, lorsqu'il ouvrit une fen��tre, pr��occup�� d'une id��e brusque. Au-dehors, dans les t��n��bres, le coron s'��veillait, des lumi��res pointaient une �� une, entre les lames des persiennes. Et ce fut encore une dispute: il se penchait pour guetter s'il ne verrait pas sortir de chez les Pierron, en face, le ma?tre-porion du Voreux, qu'on accusait de coucher avec la Pierronne; tandis que sa soeur lui criait que le mari avait, depuis la veille, pris son service de jour �� l'accrochage, et que bien s?r Dansaert n'avait pu coucher, cette nuit-l��. L'air entrait par bouff��es glaciales, tous deux s'emportaient, en soutenant chacun l'exactitude de ses renseignements, lorsque des cris et des larmes ��clat��rent. C'��tait, dans son berceau, Estelle que le froid contrariait.
Du coup, Maheu se r��veilla. Qu'avait-il donc dans les os? voil�� qu'il se rendormait comme un propre �� rien! Et il jurait si fort, que les enfants, �� c?t��, ne soufflaient plus. Zacharie et Jeanlin achev��rent de se laver, avec une lenteur d��j�� lasse. Alzire, les yeux grands ouverts, regardait toujours. Les deux mioches, L��nore et Henri, aux bras l'un de l'autre, n'avaient pas remu��, respirant du m��me petit souffle, malgr�� le vacarme.
--Catherine, donne-moi la chandelle! cria Maheu.
Elle finissait de boutonner sa veste, elle porta la chandelle dans le cabinet, laissant ses fr��res chercher leurs v��tements, au peu de clart�� qui venait de la porte. Son p��re sautait du lit. Mais elle ne s'arr��ta point, elle descendit en gros bas de laine, �� tatons, et alluma dans la salle une autre chandelle, pour pr��parer le caf��. Tous les sabots de la famille ��taient sous le buffet.
--Te tairas-tu, vermine! reprit Maheu, exasp��r�� des cris d'Estelle, qui continuaient.
Il ��tait petit comme le vieux Bonnemort, et il lui ressemblait en gras, la t��te forte, la face plate et livide, sous les cheveux jaunes, coup��s tr��s courts. L'enfant hurlait davantage, effray��e par ces grands bras noueux qui se balan?aient au-dessus d'elle.
--Laisse-la, tu sais bien qu'elle ne veut pas se taire, dit la Maheude, en s'allongeant au milieu du lit.
Elle aussi venait de s'��veiller, et elle se plaignait, c'��tait b��te de ne jamais faire sa nuit compl��te. Ils ne pouvaient donc partir doucement? Enfouie dans la couverture, elle ne montrait que sa figure longue, aux grands traits, d'une beaut�� lourde, d��j�� d��form��e �� trente-neuf ans par sa vie de mis��re et les sept enfants qu'elle avait eus. Les yeux au plafond, elle parla avec lenteur, pendant que son homme s'habillait. Ni l'un ni l'autre n'entendait plus la petite qui s'��tranglait �� crier.
--Hein? tu sais, je suis sans le sou, et nous voici �� lundi seulement: encore six jours �� attendre la quinzaine... Il n'y a pas moyen que ?a dure. A vous tous, vous apportez neuf francs. Comment veux-tu que j'arrive? nous sommes dix �� la maison.
--Oh! neuf francs! se r��cria Maheu. Moi et Zacharie, trois: ?a fait six... Catherine et le p��re, deux: ?a fait quatre; quatre et six, dix... Et Jeanlin, un, ?a fait onze.
--Oui, onze, mais il y a les dimanches et les jours de ch?mage... Jamais plus de neuf, entends-tu?
Il ne r��pondit pas, occup�� �� chercher par terre sa ceinture de cuir. Puis, il dit en se relevant:
--Faut pas se plaindre, je suis tout de m��me solide. Il y en a plus d'un, �� quarante-deux ans, qui passe au raccommodage.
--Possible, mon vieux, mais ?a ne nous donne pas du pain... Qu'est-ce que je vais fiche, dis? Tu n'as rien, toi?
--J'ai deux sous.
--Garde-les pour boire une chope... Mon Dieu! qu'est-ce que je vais fiche? Six jours, ?a n'en finit plus. Nous devons soixante francs �� Maigrat, qui m'a mise �� la porte avant-hier. ?a ne m'emp��chera pas de retourner le voir. Mais, s'il s'ent��te �� refuser...
Et la Maheude continua d'une voix morne, la t��te immobile, fermant par instants les yeux sous la clart�� triste de la chandelle. Elle disait le buffet vide, les petits demandant des tartines, le caf�� m��me manquant, et l'eau qui donnait des coliques, et les longues journ��es pass��es �� tromper la faim avec des feuilles de choux bouillies. Peu �� peu, elle avait d? hausser le ton, car le hurlement d'Estelle couvrait ses paroles. Ces cris devenaient insoutenables. Maheu parut tout d'un coup les entendre, hors de lui, et il saisit la petite dans le berceau, il la jeta sur le lit de la m��re, en balbutiant de fureur:
--Tiens! prends-la, je l'��craserais... Nom de Dieu d'enfant! ?a ne manque de rien, ?a t��te, et ?a se plaint plus haut que les autres!
Estelle s'��tait mise �� t��ter, en effet. Disparue sous la couverture, calm��e par la ti��deur du lit, elle n'avait plus qu'un petit bruit goulu des l��vres.
--Est-ce que les bourgeois de la Piolaine ne t'ont pas dit d'aller
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 205
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.