DES
RUES
Une fontaine de ciel
révèle l'orient.
Les saules reflètent
en un
enfant-de-ruisseau
le regard sensuel
du corps.
Le long des rues commencent à fourmiller
les soucis,
des hommes
plein la bouche.
A la périphérie les peupliers
portent sur leurs
épaules
des sentiers.
LARMES DE FER
De quelles souffrances
se compose la vérité?
(questions maculées
de sang
sur le visage).
Les soldats versent des larmes
de fer
(c'est un passage par les
choses
de la douleur).
Un oeil penche sa main
au dehors:
l'on voit nos traces
sur le
temps.
SEUL PARMI LES ÉTOILES
Comme une jeune fille alanguie,
le soir tombe à genoux
auprès du
carreau.
Ciel aux yeux noirs.
Dans les tympans la tranquillité
fait son lit pour dormir.
Les choses,
toutes, sont devenues égales
à elles-mêmes...
Une libellule se débat
encore
vigoureusement
en une clepsydre...
0. S'il vous plaît, ne m'attendez point, je m'attarderai un peu parmi les
étoiles.
DE LA LUMIÈRE NOUS RECUEILLERONS TOUT LE MIEL
Mai en fleur
suspendu à un rameau.
Une usine
de sentiments
commence son travail,
décharné et
ardent
l'oeillet
brise sa tête
contre soleil,
au visage doucement
suinte
notre rêve matinal.
De la lumière
nous recueillerons tout le miel --
sans gaspillage!
MON SANG EST UN VOYAGEUR
Place propos
sur propos
pour la montée,
ou pour les non-propos.
La pente n'est
qu'un chemin
dans le Chemin initial.
Mon sang est
un voyageur,
qui t'attire
sur le rivage.
EN CET OISEAU SE TROUVE UN ENVOL
Explosion du champ
en perce-neige
(l'oeil de verre
regarde
au
dehors).
De symboliques graines
en marche forcée
de la vase extraient
la
lumière.
Sur un rameau incliné,
en cet oiseau se trouve
un envol.
LE DOUX CORPS DE LA POÉSIE
Avant la rivière
le tumulte --
emmitouflé par les hommes.
Entre
les flocons-de-soleil
le sourire édenté
d'un enfant.
Tout à côté de moi,
galopant parmi les mots,
le doux corps
de la
poésie --
au Front voûté
de firmament.
PARC SANS AMOUREUX
... châtaigniers vigoureux
revêtus de haillons.
Sur un banc près du lac
un baiser --
et nulle part des amoureux.
... roses agitées
de pensées.
Et la nuit sublime
se dresse à quatre pattes
sur la lune.
L'eau respire, respire dans les roseaux.
Hélas, l'esprit
heurte le corps.
DE LA COULEUR DES PLEURS
... midi attristé comme une conserve
de poisson abîmé ...
Il y a des rues pleines de creux.
Et la vie est trépas.
Moi je suis le maître de tout
ce qui n'existe pas.
Je vis en mon
dehors.
Le vent tire l'herbe
par la chevelure.
A la poubelle
la pluie est
chat.
Je donne au lavage quelques
vers sordides.
Ce temps
est mon non-temps.
LECTURE A L'ESPRIT
Je suis allongé, la main sous la tête ...
Le titre d'un livre
serpente
comme un cri
au-dessus.
Du désir d'être
lustré par l'absolu,
je commence à lire
accroché de
mots
par les hameçons des yeux:
les lettres bondissent de leur place,
elles me tirent par la main,
apportent l'étranger
sous mes sens,
font tapage et tumulte
et me
piaillent aux oreilles
à la vitesse du siècle.
Se heurtant au tympan
certaines boitent encore
déposant leur cendre
en couches
sur le cerveau
(moi, je loge dans une seconde
inclinée
légèrement vers le parfait).
Entre les lignes, une voix
me jette des fleurs
(sa chaleur traverse
mon esprit).
Quelques personnages,
chacun classé par séries
d'après leur nom ou
leur aspect
s'éveillent devant moi
m'invitant à la discussion,
puis
sortent en hâte de la page.
Comme un enfant
le temps saute sur les degrés des ans
de feuille en
feuille,
en avant et en arrière
de guerre lasse les jaunissant.
Finalement je me réveille en lisant
la même page depuis deux fois.
ÉCOUTE LA TEMPÊTE QUE CHANTE LA DÉMENTE
En putrides gémissements
la mer
par le rivage ceinte.
Neptune y
promène
sa peine.
Ecoute, écoute la tempête
que chante la démente!...
mais la mer
brûle
ses entrailles.
La ville est
dans les fureurs de vent,
les
yeux oints
de pleurs.
AIR AUX YEUX DE BRONZE
Serpents de lumière ...
Dans le ciel d'un nid
public nombreux:
des
oiseaux miroitants
élargissent la nue.
Guêpiers chtoniques
de corydales ...
Des parfums diaphanes par les
vallées
quêtent leur fleur.
Air aux yeux de bronze ...
HISTOIRE DE LA LANGUE ROUMAINE
On a découvert dans le sol
de grands débris de mots
du temps des
Thraco-Gètes.
(Ces mots que, pour engendrer la chaleur,
nous
brisons
et livrons au feu
près de la tempe).
Ils chuchotent des étoiles, des plantes, des animaux,
pleurent la rosée
et sourient aux bourgeons.
Ils taisent le silence, chantent le merle
et
font germer l'herbe
et souffler la brise des régions orientales
du
coeur.
FORMULES POUR L'ESPRIT
L'effigie hideuse
du temps
sur le front.
Fébrilement je cherche
des formules
(qui n'existent pas)
pour
l'esprit.
Le cerveau
transpire sur les tempes.
A subsisté le reflet --
temple
où je me rencontre
avec moi-même.
L'AMOUR AUX LONGS CHEVEUX
Je lis aussi les rivières, les arbres,
l'air, la mer.
Je lis les rivières et les écris
avec des pierres,
je lis les arbres
et les
écris avec des feuilles,
je lis l'air et
l'écris avec des nuages,
je lis
la mer et l'écris
avec des méduses.
J'écris aussi avec des pierres, des feuilles,
des nuages, des méduses.
Je lis l'amour aux longs cheveux --
et pour écrire
je trempe ma
plume dans les larmes,
dans les larmes.
DE SA MÉLODIE JAILLISSENT DES SOURCES
Sur la colline les bouleaux
s'éclaircissent d'argent.
Les acacias éclatent
en rires
de bourgeons,
les lumières
s'assemblent
en orangers.
Vois-tu cet oiseau-là?
Ses ailes s'appuient
sur l'azur.
De sa
mélodie
jaillissent des sources.
LEITMOTIVE
Il pleut à plus infini....
Ma présence parmi les hommes
est absente.
Les gouttes tombent sur l'asphalte
telles des grenades,
l'herbe est si
lâche
qu'elle penche à tout vent.
Eh, que ne prendrais-je le temps par les cornes
comme un taureau
et
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