Essai sur la littérature merveilleuse des noirs, suivi de Contes indigènes de lOuest afr | Page 8

François-Victor Équilbecq

d'enseignement moral.
I.--Récits merveilleux.
Les récits uniquement merveilleux sont les plus nombreux. Il serait trop
long de les énumérer. Aussi me bornerai-je à indiquer qu'ils se
subdivisent en 3 classes principales et à donner quelques exemples, afin
de mieux préciser la pensée qui a présidé à cette sous-classification.
Ce sont:
I° Les hallucinations individuelles où le conteur rapporte ses propres
visions, nées d'un état d'exaltation tel que la terreur de l'obscurité ou
même une folie commençante. Les contes d'Amadou Diop ne sont
guère que cela. Je citerai notamment: La fille d'Aoua Gaye--Service de
nuit--Le cabri--Une ronde impressionnante. C'est encore le cas pour La
guiloguina et quelques autres contes correspondant à des impressions
réelles de gens affolés par un sentiment de la nature que l'on vient
d'indiquer. Dans ces derniers récits le conteur rapporte un événement
arrivé à d'autres qu'à lui (voir Le konkoma--Le chasseur de
Ouallalane--Les maîtres de la nuit, etc.).
2° Le merveilleux ordinaire où jouent leur rôle tous les êtres fabuleux
créés par l'imagination des noirs: génies, hafritt, taloguina, nains, ogres,
animaux-génies, etc. Ces contes sont très nombreux. Nous en
étudierons les personnages en détail au chapitre III (personnages des
contes).
3° Le merveilleux macabre. On en trouve des exemples moins
nombreux que ceux de la subdivision précédente. (Voir les contes
«d'Ybilis» de «La flûte d'Ybilis», du Cadavre ambulant», de «La fille
qui voulait apprendre à chanter», du «Vieillard, son fils et les 7 têtes»,
de «La moqueuse», de «La créance de la Mort» de, «La sorcière punie»,

de «L'implacable créancier», du «Vampire»). Les races gourmantié,
haoussa et bambara surtout, semblent, comme la race bretonne en
France, très hantées de l'idée de la mort[21].
Il existe un conte gourmande: «La femme enceinte» analogue au conte
haoussa de «L'implacable créancier» mais l'impression d'effroi y est
moins intense. De même, pour une variante malinké de «La flûte
d'Ybilis» où la substitution de Thyène au démon Ybilis atténue
l'horreur du conte bambara.
[Note 21: Cf. aux contes sur Ybilis: Le Ciel, l'araignée et la Mort
(Delafosse op. cit.).]
II--Contes anecdotiques et romanesques.
A côté de ces récits fantastiques ou simplement merveilleux se placent
ceux ayant pour base un événement romanesque ou même une anecdote
sans portée. C'est le caractère de la majorité des contes recueillis par
Bérenger-Féraud dans ses Contes populaires de la Sénégambie et d'un
conte du Dr Barot. (Lanséni et Maryama.) Parmi ceux du présent
recueil je citerai tant comme romanesques qu'anecdotiques: Bala et
Kounandi--La Mauresque--Les inséparables--Le couard devenu
brave--Les deux intimes.
D. Contes à intentions didactiques.
Ces contes, que l'on pourrait appeler aussi contes moraux--car leur
didactisme s'inspire généralement d'un prosélytisme moral--sont de
deux sortes: les contes de morale idéale (religieuse et musulmane le
plus souvent) ou théorique et ceux de morale pratique ou réelle. Ces
derniers contes ont un grand rapport avec les fables et ne s'en
différencient que par la nature humaine de leurs personnages.
1° Contes de morale théorique.
J'ai dit que les contes de morale théorique présentent le plus souvent un
caractère religieux. Il convient cependant de noter que cette religion
n'est pas toujours l'Islam. Ainsi «Une leçon de bonté» est sûrement

d'inspiration fétichiste, ainsi que le conte du
«Riz-de-la-bonne-épouse»[22], celui de «La femme fatale» ou du
«Mariage de Niandou» qui préconisent le respect dû aux parents et aux
personnes âgées.
[Note 22: Cf. Le riz blanc.]
Dans ces divers contes, il n'y a pas intervention divine comme dans les
contes islamiques. Les génies seuls assurent le respect des principes.
Dans d'autres récits au contraire c'est Dieu qui intervient sous divers
noms (Allah, Outênou, Ouinndé etc.) soit directement, soit par
l'entremise de ses serviteurs. Il prend le rôle de ces êtres surnaturels qui
semblent d'anciennes personnifications des forces de la Nature dans le
panthéisme dit «fétichisme» (Voir notamment les contes intitulés:
Mâdiou le charitable--Le barké--Le marabout et le fama[23]--Les
obligés ingrats de Ngouala--Le ngortann--L'enterré-vif--Le melon
révélateur, etc).
[Note 23: V. Bérenger-Féraud (op. cit.). Légende du bracelet rapporté
par le poisson.]
2° Contes de morale pratique.
Cette catégorie peut, au point de vue forme, se subdiviser en apologues
symboliques et en contes proprement dits. Parmi les apologues
symboliques il y a lieu de citer: Le guehuel et le damel--Kahué
l'omniscient--La tête de mort--Trois frères en voyage--Le fils du
sérigne--Le choix d'un lanmdo, etc. Ces contes, généralement
sentencieux--ne sont pas toujours aisément intelligibles.
Pour les contes proprement dits où le récit offre un élément d'intérêt
plus accentué, se reporter, entre autres, à ceux-ci après désignés: Le
pardon du guinnârou--Le bien qui vous vient en dormant--Le lâri
reconnaissant--et divers contes de Bérenger-Féraud[24], de Froger[25]
et de Moussa Travélé[26].
[Note 24: V. Bérenger-Féraud (id.) Le cavalier qui soignait mal son
cheval--Le sage qui ne mentait jamais--L'homme qui avait beaucoup

d'amis--L'ami indiscret.]
[Note 25: Connaître par soi-même--Enseignements d'un père à son fils.]
[Note 26: Le cultivateur et son fils.]
E. Fables.
On
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