d'inventions cannibalesques, repr��sent��es d'ailleurs m��ticuleusement et presque professionnellement en des fresques d��corant l'��glise paroissiale de Zoutbertinge, par un ��l��ve de Thierry Bouts, le peintre des ��corch��s vifs. La l��gende voulait que les femmes de Smaragdis se fussent particuli��rement distingu��es dans cette tuerie, au point m��me d'ajouter le stupre �� la f��rocit�� et d'en agir avec Olfgar comme les bacchantes avec Orph��e.
Plusieurs fois, dans le cours des si��cles, de sensuelles et subversives h��r��sies avaient lev�� dans ce pays �� bouillant temp��rament et d'une autonomie irr��ductible. Au royaume, devenu tr��s protestant, de Kerlingalande, o�� le luth��rianisme s��vissait comme religion d'��tat, l'impi��t�� latente et parfois explosive de la population de Smaragdis repr��sentait un des soucis du consistoire.
Aussi l'��v��que du dioc��se dont l'?le d��pendait venait-il d'y envoyer un domin��[2] militant, plein d'astuce, sectaire malingre et bilieux, nomm�� Balthus Bomberg, qui br?lait de se distinguer et qui s'��tait un peu rendu �� Smaragdis comme �� une croisade contre de nouveaux Albigeois.
Sans doute en serait-il pour ses frais de cat��chisation. En d��pit de la pression orthodoxe, l'?le pr��servait son fonds originel de licence et de paganisme. Les h��r��sies des anversois Tanchelin et Pierre l'Ardoisier qui, �� cinq si��cles d'intervalle, avaient agit�� les pays voisins de Flandre et de Brabant, avaient pouss�� de fortes racines �� Smaragdis et consolid�� le caract��re primordial.
Toutes sortes de traditions et coutumes, en abomination aux autres provinces, s'y perp��tuaient, malgr�� les anath��mes et les monitoires. La Kermesse s'y d��cha?nait en tourmentes charnelles plus sauvages et plus d��brid��es qu'en Frise et qu'en Z��lande, c��l��bres cependant par la fr��n��sie de leurs f��tes votives, et il semblait que les femmes fussent poss��d��es tous les ans, �� cette ��poque, de cette hyst��rie sanguinaire qui effr��na autrefois les bourr��les de l'��v��que Olfgar.
Par cette loi bizarre des contrastes en vertu de laquelle les extr��mes se touchent, ces insulaires, aujourd'hui sans religion d��finie, demeuraient superstitieux et fanatiques, comme la plupart des indig��nes des autres pays de brumes fant?males et de m��t��ores hallucinants. Leur merveillosit�� se ressentait des th��ogonies recul��es, des cultes sombres et fatalistes de Thor et d'Odin; mais d'apres app��tits se m��laient �� leurs imaginations fantasques, et celles-ci exasp��raient leurs tendresses aussi bien que leurs aversions.
II
Henry, nature passionn��e et de philosophie audacieuse, s'��tait dit, non sans raison, que par ses affinit��s, il se sentirait chez lui dans ce milieu bellement barbare et instinctif.
Il inaugurait m��me son av��nement de ?Dykgrave? par une innovation contre laquelle le domin�� Balthus Bomberg devait infailliblement fulminer, du haut de son pupitre pastoral. En effet, pour flatter le sentiment autochtone, Henry avait invit�� �� sa table non seulement quelques hobereaux et gros terriens, deux ou trois artistes de ses amis de la ville, mais il avait convi�� en masse de simples fermiers, de petits armateurs, d'infimes patrons de chalands et de voiliers, le garde-phare, l'��clusier, les chefs d'��quipe de diguiers et jusqu'�� de simples laboureurs. Avec ces indig��nes, il avait pri�� �� cette cr��maill��re leurs femmes et leurs filles.
Sur sa recommandation expresse, tous et toutes avaient rev��tu le costume national ou d'uniforme. Les hommes se modelaient en des vestes d'un velours mordor�� ou d'un roux aveuglant, ouvrant sur des tricots brod��s des attributs de leur profession: ancres, instruments aratoires, t��tes de taureaux, outils de terrassiers, tournesols, mouettes, dont le bariolage presque oriental se d��tachait savoureusement sur le fond bleu marin, comme des armoiries sur un ��cusson. �� de larges ceintures rouges brillaient des boucles en vieil argent d'un travail �� la fois sauvage et touchant; d'autres exhibaient le manche en ch��ne sculpt�� de leurs larges couteaux; les gens de mer paradaient en grandes bottes goudronn��es, des anneaux de m��tal fin adornaient le lobe de leurs oreilles aussi rouges que des coquillages; les travailleurs de la gl��be avaient le rable et les cuisses brid��s dans des pantalons de m��me velours que celui de leur veste, et ces pantalons, collant du haut, s'��largissaient depuis les mollets jusqu'au coup de pied. Leur petit feutre rappelait celui des basochiens au temps de Louis XI. Les femmes arboraient des coiffes �� dentelles sous des chapeaux coniques �� larges brides, des corsages plus histori��s, aux arabesques encore plus fantastiques que les gilets des hommes, des jupes bouffantes du m��me velours et du m��me ton mordor�� que les vestes et les culottes; des jaserans ceignant trois fois leur gorge, des pendants d'oreille d'un dessin antique quasi byzantin et des bagues au chaton aussi gros que celui d'un anneau pastoral.
C'��taient pour la plupart de robustes sp��cimens du type brun, de cette ardente et pourtant copieuse race de Celtes noirs et nerveux, aux cheveux cr��pus et en r��volte. Paysans et marins hal��s, un peu embarrass��s au d��but du repas, avaient vite recouvr�� leur assurance. Avec des gestes lourds mais non emprunt��s, et m��me de ligne souvent trouv��e, ils se servaient du couteau et de la fourchette. �� mesure que le repas avan?ait, les
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