En famille | Page 8

Hector Malot
il n��y avait qu���� suivre le chemin de fer jusqu���� la gare.
En entendant parler d��un m��decin fameux qui faisait les visites en voiture, elle eut peur de n��avoir pas assez d��argent pour le payer, et timidement, avec confusion, elle questionna Grain de Sel en tournant autour de ce qu��elle n��osait pas dire. �� la fin il comprit:
?Ce que tu auras �� payer? dit-il. Dame, c��est cher. Pas moins de quarante sous. Et pour ��tre s?re qu��il vienne, tu feras bien de les lui remettre d��avance.?
En suivant les indications qui lui avaient ��t�� donn��es, elle trouva assez facilement la rue Riblette, mais le m��decin n����tait point encore lev��, elle dut attendre, assise sur une borne dans la rue, �� la porte d��une remise derri��re laquelle on ��tait en train d��atteler un cheval: comme cela elle le saisirait au passage, et en lui remettant ses quarante sous, elle le d��ciderait a venir, ce qu��il ne ferait pas, elle en avait le pressentiment, si on lui demandait simplement une visite pour un des habitants du Champ Guillot.
Le temps fut ��ternel �� passer, son angoisse se doublant de celle de sa m��re qui ne devait rien comprendre �� son retard; s��il ne la gu��rissait point instantan��ment, au moins allait-il l��emp��cher de souffrir. D��j�� elle avait vu un m��decin entrer dans leur roulotte, lorsque son p��re avait ��t�� malade. Mais c����tait en pleine montagne, dans un pays sauvage, et le m��decin que sa m��re avait appel�� sans avoir le temps de gagner une ville, ��tait plut?t un barbier avec une tournure de sorcier qu��un vrai m��decin comme on en trouve �� Paris, savant, ma?tre de la maladie et de la mort, comme devait l����tre celui-l��, puisqu��on le disait fameux.
Enfin la porte de la remise s��ouvrit, et un cabriolet de forme ancienne, �� caisse jaune, auquel ��tait attel�� un gros cheval de labour, vint se ranger devant la maison et presque aussit?t le m��decin parut, grand, gros, gras, le visage rougeaud encadr�� d��une barbe grise qui lui donnait l��air d��un patriarche campagnard.
Avant qu��il f?t mont�� en voiture, elle ��tait pr��s de lui et lui exposait sa demande.
?Le champ Guillot, dit-il, il y a eu de la batterie.
-- Non monsieur, c��est ma m��re qui est malade, tr��s malade.
-- Qu��est-ce que c��est ta m��re?
-- Nous sommes photographes.?
Il mit le pied sur le marchepied.
Vivement elle tendit sa pi��ce de quarante sous.
?Nous pouvons vous payer.
-- Alors, c��est trois francs.?
Elle ajouta vingt sous �� la pi��ce; il prit le tout et le fourra dans la poche de son gilet.
?Je serai pr��s de ta m��re d��ici un quart d��heure.?
Elle f?t en courant le chemin du retour, joyeuse d��apporter la bonne nouvelle:
?Il va te gu��rir, maman, c��est un vrai m��decin celui-l��.?
Et vivement elle s��occupa de sa m��re, lui lava le visage, les mains, lui arrangea les cheveux qui ��taient admirables, noirs et soyeux, puis elle mit de l��ordre dans la roulotte; ce qui n��eut d��autre r��sultat que de la rendre plus vide et par l�� plus mis��rable encore.
Elles n��eurent pas une trop longue attente �� endurer: un roulement de voiture annon?a l��arriv��e du m��decin et Perrine courut au- devant de lui.
Comme en entrant il voulait se diriger vers la maison, elle lui montra la roulotte.
?C��est dans notre voiture que nous habitons?, dit-elle.
Bien que cette maison n��eut rien d��une habitation, il ne laissa para?tre aucune surprise, ��tant habitu�� �� toutes les mis��res avec sa client��le; mais Perrine qui l��observait remarqua sur son visage comme un nuage lorsqu��il vit la malade couch��e sur son matelas, dans cet int��rieur d��nud��.
?Tirez la langue, donnez-moi la main.?
Ceux qui payent quarante ou cent francs la visite de leur m��decin n��ont aucune id��e de la rapidit�� avec laquelle s����tablit un diagnostic aupr��s des pauvres gens; en moins d��une minute son examen fut fait.
?Il faut entrer �� l��h?pital?, dit-il.
La m��re et la fille pouss��rent un m��me cri d��effroi et de douleur.
?Petite, laisse-moi seul avec ta maman?, dit le m��decin d��un ton de commandement.
Perrine h��sita une seconde; mais, sur un signe de sa m��re, elle quitta la roulotte, dont elle ne s����loigna pas.
?Je suis perdue? dit la m��re �� mi-voix.
-- Qui est-ce qui parle de ?a: vous avez besoin de soins que vous ne pouvez pas recevoir ici.
-- Est-ce qu���� l��h?pital j��aurais ma fille?
-- Elle vous verrait le jeudi et le dimanche.
-- Nous s��parer! Que deviendrait-elle Sans moi, seule �� Paris? que deviendrai-je sans elle? Si je dois mourir, il faut que ce soit sa main dans la mienne.
-- En tout cas on ne peut pas vous laisser dans cette voiture o�� le froid des nuits vous est mortel. Il faut prendre une chambre; le pouvez-vous?
-- Si ce n��est pas pour longtemps, oui peut-��tre.
-- Grain de Sel en loue qu��il ne vous fera pas payer cher. Mais la chambre n��est pas tout, il faut des m��dicaments, une bonne nourriture, des soins: ce
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