En Kabylie | Page 4

J. Vilbort
foss�� a dit: C'��tait ��crit! le bourrico l'a pens��, et voil�� pourquoi la grosse b��te est remont��e sur la petite, tandis que celle-ci reprenait le haut du pav��. C'est le fond de l'islamisme et de toutes les doctrines politiques, religieuses ou sociales qui reposent sur le dogme de l'immuable. Pour le g��n��ral de l'ordre de Loyola, l'ame de tous les complots tram��s contre la raison, comme pour le Khalifa des Moule?-Ta?eb qui, dans sa petite ville d'Ouazan, au Maroc, tient le fil de toutes les conspirations africaines contre le progr��s apport�� par la France, cet Arabe et son bourrico atteignent �� la perfection divine et terrestre.
--Tais-toi! Conscrit, fit le G��n��ral en riant, et regarde! Voici mes beaux palmiers du jardin d'Essai! Ah! qu'ils me donnent envie d'��tre au D��sert! mais quel dommage qu'il faille quitter ma ch��re M��diterran��e! Si j'��tais f��e, j'emporterais �� Paris, d'abord cette mer bleue, puis cette lumi��re ��blouissante, la f��te de l'ame comme celle des yeux; enfin ces palmiers, et encore ces superbes orangers charg��s �� la fois de fruits d'or et de fleurs odorantes.
--Est-ce tout? demandai-je.
--Non, non, j'emporterais aussi cet air doux comme une caresse d'enfant, ces grands rochers qui se dressent l��-bas devant nous, et dont les cr��tes aigu?s et neigeuses resplendissent au soleil comme des lances d'argent.
--Le Djurjura! nous n'en sommes plus qu'�� trente-neuf lieues, Madame, et nous y arriverons demain soir.
--Quel bonheur! s'��cria-t-elle en frappant des mains.
Pauvre Alger! d��j�� cette belle inconstante ne te regrettait plus.
Nous laissons �� droite et �� gauche des jardins l��gumiers et des bananeries que prot��ge contre la main des maraudeurs et le souffle sal�� de la mer une haie imp��n��trable de cactus monstrueux: les figuiers de Barbarie dont les ��pines ac��r��es gardent en outre leurs propres fruits, fort pris��s des Arabes. Pr��s du ruisseau A?n-el-Abiad [La fontaine blanche.], nous apercevons, �� moiti�� ensevelie dans les sables de la mer, la Koubba de Sidi-Belal. Ce marabout, v��n��r�� des n��gres d'Alger, pourrait bien n'��tre que le dieu B��lus ou Baal, dont le culte fut import�� par les Ph��niciens dans le Soudan. Les c��r��monies religieuses de ces noirs enfants, qui se piquent d'��tre aussi bons musulmans que les Arabes ou les Maures, ont conserv�� un caract��re tout pa?en. A Alger, vers la fin de mars, nous avions assist��, dans une maison de n��gres, �� des sacrifices sanglants. Nous y v?mes immoler des poulets, des moutons, un boeuf par des sacrificateurs d'��b��ne. Une grande pr��tresse, plus noire que l'enfer, rendait, d'un air tr��s-majestueux, des oracles tir��s du sang fumant des victimes. Le mercredi de chaque semaine, sur la plage de Saint-Eug��ne, hors la porte de Bab-el-Oued, �� la Seba-A?oun [Les sept fontaines.], les Mauresques galantes, toutes celles qui ont �� se plaindre d'un mari ou �� se faire aimer d'un amant, viennent demander des conseils, des augures et des philtres aux Guezzanates [N��gresses sorci��res.]: c'est un carnage de poulets alg��riens. Mais vienne le temps o�� la f��ve commence �� noircir, un effroyable vacarme ��clate dans la haute ville, aux abords de la Kasba [Citadelle.]. Bient?t, par groupes de cinq ou six, les fils de Cham �� la peau de suie descendent dans la ville basse, en dansant sur une musique assourdissante, la Derdeba. Ils la font avec des tambours, des tamtams et des _Karakobs,_ ��normes castagnettes en fer, plus pesantes qu'un boulet de vingt-quatre. Cette danse et cette musique en plein air durent plusieurs jours et du matin au soir. Quels poignets! et quelles jambes!
Ces bons diables montrent toutes leurs dents �� chaque sou qu'on leur donne, mais ils ne tendent point la main. Cet argent fera les frais de l'_a?d-el-foul,_ la f��te des f��ves. Ils viendront la c��l��brer �� la Koubba de Sidi-Belal, le premier mercredi du Nissam, printemps des n��gres. Ce jour-l��, sacrifices sanglants au bord de la mer, danses fr��n��tiques, r��gal et orgie: toute la population noire se pare, mange, crie, gesticule, se d��m��ne et s'amuse vingt-quatre heures durant et pour tout le reste de l'ann��e. Ce sont, la plupart, de tr��s-braves gens, sobres, laborieux et paisibles qui n'ont que rarement maille �� partir avec la police.
Malgr�� leur peau de suie, madame Elvire les pr��f��rait de beaucoup aux Arabes d'Alger, paresseux, sordides et filous, aux Maures �� la face blafarde, aux Koulourlis, fils ��tiol��s des Turcs et des Mauresques, et m��me aux Juifs industrieux, qui ont l'art de s'enrichir o�� tant d'autres s'appauvrissent et poss��dent aujourd'hui la moiti�� de la ville. Elle n'aimait gu��re non plus les Mzabis ou Mozabites, gens au nez pointu, �� la l��vre mince, fanatiques, remuants et perfides, venus du Mzab sous le m��ridien, pour gagner l'argent du Roumi en attendant qu'ils pussent lui couper la gorge. Mais ceux qui avaient su gagner toute sa sympathie, c'��taient le Biskris et surtout les Kabyles, que la mis��re chasse, les premiers, des oasis du Ziban, les
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