une r��volution tout enti��re. Laissez-nous en France combattre, vaincre, souffrir, mourir dans nos affections, dans nos penchants les plus chers; rena?tre ensuite, peut-��tre, pour l'��tonnement et l'admiration du monde. Mais laissez un si��cle passer sur nos destin��es; vous saurez alors si nous avons acquis la v��ritable science du bonheur des hommes; si le vieillard avait raison, ou si le jeune homme a mieux dispos�� de son domaine, l'avenir. H��las! n'��tes-vous pas heureux qu'une nation tout enti��re se soit plac��e �� l'avant-garde de l'esp��ce humaine pour affronter tous les pr��jug��s, pour essayer tous les principes? Attendez, vous, g��n��ration contemporaine; ��loignez encore de vous les haines, les proscriptions et la mort; nul devoir ne pourrait exiger de tels sacrifices, et tous les devoirs, au contraire, font une loi de les ��viter.
Qu'on me pardonne de m'��tre laiss�� entra?ner au del�� de mon sujet; mais qui peut vivre, qui peut ��crire dans ce temps, et ne pas sentir et penser sur la r��volution de France?
J'ai trac�� l'esquisse imparfaite de l'ouvrage que je projette. La premi��re partie que j'imprime �� pr��sent est fond��e sur l'��tude de son propre coeur, et les observations faites sur le caract��re des hommes de tous les temps. Dans l'��tude des constitutions, il faut se proposer pour but le bonheur, et pour moyen la libert��: dans la science morale de l'homme, c'est l'ind��pendance de l'ame qui doit ��tre l'objet principal; ce qu'on peut avoir de Bonheur en est la suite. L'homme qui se vouerait �� la poursuite de la f��licit�� parfaite serait le plus infortun�� des ��tres; la nation qui n'aurait en vue que d'obtenir le dernier terme abstrait de la libert�� m��taphysique, serait la nation la plus mis��rable. Les l��gislateurs doivent donc compter et diriger les circonstances, et les individus chercher �� s'en rendre ind��pendants; les gouvernements doivent tendre au bonheur r��el de tous, et les moralistes doivent apprendre aux individus �� se passer de bonheur. Il y a du bien pour la masse dans l'ordre m��me des choses, et cependant il n'est pas de f��licit�� pour les individus; tout concourt �� la conservation de l'esp��ce, tout s'oppose, aux d��sirs de chacun, et les gouvernements, �� quelques ��gards, repr��sentant l'ensemble de la nature, peuvent atteindre �� la perfection dont l'ordre g��n��ral offre l'exemple; mais les moralistes, parlant aux hommes individuellement, �� tous ces ��tres emport��s dans le mouvement de l'univers, ne peuvent leur promettre avec certitude aucune jouissance personnelle, que dans ce qui d��pend toujours d'eux-m��mes. Il y a de l'avantage �� se proposer pour but de son travail sur soi, la plus parfaite ind��pendance philosophique; les essais, m��me inutiles, laissent encore apr��s eux des traces salutaires; agissant �� la fois sur son ��tre tout entier, on ne craint pas, comme dans les exp��riences sur les nations, de disjoindre, de s��parer, d'opposer l'une �� l'autre toutes les parties diverses du corps politique. L'on n'a point, au dedans de soi, de transactions �� faire avec des obstacles ��trangers; l'on mesure sa force, on triomphe ou l'on se soumet; tout est simple, tout est possible m��me; car s'il est absurde de consid��rer une nation comme un peuple de philosophes, il est vrai que chaque homme en particulier peut se flatter de le devenir. Je m'attends aux diverses objections de sentiment et de raisonnement qu'on pourra faire contre le syst��me d��velopp�� dans cette premi��re partie. Rien n'est plus contraire, il est vrai, aux premiers mouvements de la jeunesse, que l'id��e de se rendre ind��pendant des affections des autres; on veut d'abord consacrer sa vie �� ��tre aim�� de ses amis, �� captiver la faveur publique. Il semble qu'on ne s'est jamais assez mis �� la disposition de ceux qu'on aime; qu'on ne leur ait jamais assez prouv�� qu'on ne pouvait exister sans eux; que l'occupation, les services de tous les jours ne satisfassent pas assez au gr�� de la chaleur de l'ame, le besoin qu'on a de se d��vouer, de se livrer en entier aux autres. On se fait un avenir tout compos�� des liens qu'on a form��s; on se confie d'autant plus �� leur dur��e que l'on est soi-m��me plus incapable d'ingratitude; on se sait des droits �� la reconnaissance; on croit �� l'amiti�� ainsi fond��e plus qu'�� aucun autre lien de la terre: tout est moyen, elle seule est le but. L'on veut aussi de l'estime publique, mais il semble que vos amis vous en sont les garants; on n'a rien fait que pour eux, ils le savent, ils le diront: comment la v��rit��, et la v��rit�� du sentiment, ne persuaderait-elle pas? comment ne finirait-elle pas par ��tre reconnue? Les preuves sans nombre qui s'��chappent d'elle de toutes parts doivent enfin l'emporter sur la fabrication de la calomnie. Vos paroles, votre voix, vos accents, l'air qui vous environne, tout vous semble empreint de ce que vous ��tes r��ellement, et l'on ne
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