De linfluence des passions sur le bonheur des individus et des nations | Page 4

Anne Louise Germaine Necker Baronne de Stael-Holstein
qu'il faut longtemps pour r��unir toutes les connaissances, pour faire toutes les recherches qui doivent servir de base �� ce travail; mais si les accidents de la vie ou les peines du coeur bornaient le cours de ma destin��e, je voudrais qu'un autre accompl?t le plan que je me suis propos��. En voici quelques aper?us incomplets qui ne permettent pas de juger de l'ensemble:
Il faudrait d'abord, en analysant les gouvernements anciens et modernes, chercher dans l'histoire des nations ce qui appartient seulement �� la nature de la constitution qui les dirigeait. Montesquieu, dans son sublime ouvrage Sur les Causes de la grandeur et de la d��cadence des Romains, a trait��, tout ensemble, les causes diverses qui ont influ�� sur le sort de cet empire; il faudrait apprendre dans son livre et d��m��ler dans l'histoire de tous les autres peuples, les ��v��nements qui sont la suite imm��diate des constitutions, et peut-��tre trouverait-on que tous les ��v��nements d��rivent de cette cause: les nations sont ��lev��es par leurs gouvernements, comme les enfants par l'autorit�� paternelle. Et l'effet du gouvernement n'est pas incertain comme celui de l'��ducation particuli��re, puisque, comme je l'ai d��j�� dit, les chances du hasard subsistent par rapport au caract��re d'un homme, tandis que dans la r��union d'un certain nombre les r��sultats sont toujours pareils. L'organisation de la puissance publique, qui excite ou comprime l'ambition, rend telle ou telle religion plus ou moins n��cessaire, tel ou tel code p��nal trop indulgent ou trop s��v��re, telle ��tendue du pays dangereuse ou convenable; enfin, c'est de la mani��re dont les peuples con?oivent l'ordre social que d��pend le destin de la race humaine sous tous les rapports. La plus grande perfectibilit�� dont elle puisse ��tre susceptible, c'est d'acqu��rir des id��es certaines sur la science politique. Si les nations ��taient en paix au dehors et au dedans, les arts, les connaissances, les d��couvertes en divers genres feraient chaque jour de nouveaux progr��s, et la philosophie ne perdrait pas en deux ans de guerre civile ce qu'elle avait acquis pendant des si��cles tranquilles. Apr��s avoir bien ��tabli l'importance premi��re de la nature des constitutions, il faudrait prouver leur influence par l'examen des faits caract��ristiques de l'histoire des moeurs, de l'administration, de la litt��rature, de l'art militaire de tous les peuples. J'��tudierais d'abord les pays qui, dans tous les temps, ont ��t�� gouvern��s despotiquement, et motivant leurs diff��rences apparentes, je montrerais que leur histoire, sous le rapport des causes et des effets, a toujours ��t�� parfaitement semblable; et j'expliquerais quel effet doit constamment produire sur les hommes la compression de leurs mouvements naturels par une force au dehors d'eux, et �� laquelle leur raison n'a pu donner aucun genre de consentement. Dans l'examen des anarchies d��magogiques ou militaires, il faut montrer aussi que ces deux causes, qui paraissent oppos��es, donnent des r��sultats pareils, parce que dans les deux ��tats les passions politiques sont ��galement excit��es parmi les hommes par l'��loignement de toutes les craintes positives et l'activit�� de toutes les esp��rances vagues. Dans l'��tude de certains ��tats, qui, par leurs circonstances encore plus que par leur petitesse, sont dans l'impossibilit�� de jouer un grand r?le au dehors, et n'offrent point au dedans de place qui puisse contenter l'ambition et le g��nie, il faudrait observer comment l'homme tend �� l'exercice de ses facult��s, comment il veut agrandir l'espace en proportion de ses forces. Dans les ��tats obscurs, les arts ne font aucun progr��s, la litt��rature ne se perfectionne, ni par l'��mulation qui excite l'��loquence, ni par la multitude des objets de comparaison, qui seule donne une id��e fixe du bon go?t. Les hommes priv��s d'occupations fortes se resserrent tous les jours plus dans le cercle des id��es domestiques, et la pens��e, le talent, le g��nie, tout ce qui semble un don de la nature, ne se d��veloppe cependant que par la combinaison des soci��t��s. Le m��me nombre d'hommes divis��, s��par��, sans mobile et sans but, n'offre pas un g��nie sup��rieur, une ame ardente, un caract��re ��nergique; tandis que dans d'autres pays, parmi les m��mes ��tres, plusieurs se seraient ��lev��s au-dessus de la classe commune, si le but avait fait na?tre l'int��r��t, et l'int��r��t l'��tude et la recherche des grands moyens et des grandes pens��es.
Sans s'arr��ter longtemps sur les motifs de la pr��f��rence que la sagesse conseillerait peut-��tre de donner aux petits ��tats comme aux destin��es obscures, il est ais�� de prouver que par la nature m��me des hommes ils tendent �� sortir de cette situation, qu'ils se r��unissent pour multiplier les chocs, qu'ils conqui��rent pour ��tendre leur puissance; enfin, que voulant exciter leurs facult��s, reculer en tout genre les bornes de l'esprit humain, ils appellent autour d'eux, d'un commun accord, les circonstances qui secondent ce d��sir et cette impulsion. Ces diverses r��flexions ne pourraient avoir de prix qu'en les appuyant sur des faits, sur une connaissance d��taill��e de
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