obvier, elle s'advisa de faire
une confession generale de tous ses pechez. Ce qu'ayant faict, jamais le
diable n'approcha d'elle depuis.
"Je ne puis omettre, ajoute-t-il, ce que a ce propos je trouve es archives
de ce monastere ou je reside, qu'un bon religieux plein de foy (1504)
voyant que le diable se meslant parmy les esclairs de tonnerre estoit
entre en l'eglise ou les religieux estoient assemblez pour prier Dieu, et
qu'il vouloit tout renverser et prophaner les choses dediees a Dieu, se
vint constamment presenter arme du signe de la croix et commanda au
nom de crucifix a Sathan de desister et sortir de la maison de Dieu, a la
voix duquel il fut force d'obeir, et se retirer sans aucune offence."
"Mais entre tous les contes, desquels j'aye jamais entendu parler, ou
veu, dit Jean des Caurres[1], cestui-cy est digne de merveille, lequel est
advenu depuis peu de temps a Rome. Un jeune homme, natif de Gabie,
en une pauvre maison, et de parents fort pauvres, estant furieux, de
mauvaise condition et de meschante conversation de vie, injuria son
pere, et luy fit plusieurs contumelies; puis estant agite de telle rage, il
invoqua le diable, auquel il s'estoit voue: et incontinent se partit pour
aller a Rome, et a celle fin entreprendre quelque plus grande
meschancete contre son pere. Il rencontra le diable sur le chemin,
lequel avoit la face d'un homme cruel, la barbe et les cheveux mal
peignez, la robe usee et orde, lequel lui demanda en l'accompagnant la
cause de sa fascherie et tristesse. Il lui respondit qu'il avoit eu quelques
paroles avec son pere, et qu'il avoit delibere de luy faire un mauvais
tour. Alors le diable luy fit reponse que tel inconvenient luy estoit
advenu; et ainsi le pria-il de le prendre pour compagnon, et a celle fin
que ensemble ils se vengeassent des torts qu'on leur avoit faicts. La nuit
doncques estant venue, ils se retirerent en une hostelerie, et se
coucherent ensemble. Mais le malheureux compagnon print a la gorge
le pauvre jeune homme, qui dormoit profondement et l'eust estrangle,
n'eust este qu'en se reveillant il pria Dieu. Dont il advint que ce cruel et
furieux se disparut, et en sortant estonna d'un tel brui et impetuosite
toute la chambre que les solives, le toict et les thuilles en demeurerent
toutes brisees. Le jeune homme espouvante de ce spectacle, et presque
demy mort, se repentit de sa meschante vie et de ses meffaicts, et estant
illumine d'un meilleur esprit, fut ennemy des vices, passa sa vie loing
des tumultes populaires et servit de bon exemple. Alexandre escrit
toutes ces choses."
[Note 1: _Oeuvres morales et diversifiees en histoires, etc._, par Jean
des Caurres. Paris, Guill. Choudiere, 1584, in-8 deg., p. 390.]
"Lorsque j'etudiais en droit en l'academie de Witemberg, dit
Godelman[1], cite par Goulart[2], j'ay ouy souvent reciter a mes
precepteurs qu'un jour, certain vestu d'un habit estrange vint heurter
rudement a la porte d'un grand theologien, qui lors lisoit en icelle
academie, et mourut l'an 1516. Le valet ouvre et demande qu'il vouloit?
Parler a ton maistre, fit-il. Le theologien le fait entrer: et lors cest
estranger propose quelques questions sur les controverses qui durent
sur le fait de la religion. A quoi le theologien ayant donne prompte
solution, l'estranger en mit en avant de plus difficiles, le theologien lui
dit: Tu me donnes beaucoup de peine: car j'avois le present autre chose
a faire et la dessus se levant de sa chaire montre en un livre l'exposition
de certain passage dont ils debatoyent. En cest estrif il apercoit que
l'estranger avoit au lieu de doigts des pattes et des griffes comme
d'oyseau de proye. Lors il commence a lui dire: Est-ce toi donc?
Escoute la sentence prononcee contre toi (lui monstrant le passage du
troisieme chapitre de Genese): La semence de la femme brisera la teste
du serpent. Il adjousta: Tu ne nous engloutiras pas tous. Le malin esprit
tout confus, despite et grondant, disparut avec grand bruit, laissant si
puante odeur dedans le poisle qu'il s'en sentit quelques jours apres, et
versa de l'encre derriere le fourneau."
[Note 1: Jean-George Godelman, docteur en droit a Rostoch, au traite
_De magis, veneficis, lamis, etc._, livre 1, ch. III.]
[Note 2: _Thresor d'histoires admirables et memorables de nostre temps,
recueillies de divers autheurs, memoires et avis de divers endroits._
Paris, 1600, 2 vol. in-12.]
Le meme auteur fournit encore cette autre histoire a Goulart:
"En la ville de Friberg en Misne, le diable se presente en forme
humaine a un certain malade, lui monstrant un livre et l'exhortant de
nombrer les pechez dont il se souviendroit, pour ce qu'il vouloit les
marquer en ce livre. Du commencement le malade demeura comme
muet: mais recouvrant et reprenant ses esprits, il respond. C'est
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