de vingt minutes, le temps s'��claircit ... le jour commen?ait �� poindre, et Waldine se d��cidant enfin, sortit gravement comme elle ��tait venue.
L'air frais p��n��trait alors dans la hutte avec les mille parfums du lierre, de la mousse, du ch��vrefeuille, ranim��s par la pluie. Les oiseaux des bois, le rouge-gorge, la grive, le merle s'��gosillaient sous le feuillage humide.... C'��taient des frissons d'amour ... des fr��missements d'ailes �� vous ��panouir le coeur.
Alors ma?tre Bernard, sortant de sa r��verie, fit quatre pas au dehors, leva les yeux et vit quelques nuages blancs voguer en caravanes vaporeuses dans le ciel d��sert.... Il vit aussi sur la c?te oppos��e, tout le troupeau de boeufs, de vaches et de g��nisses abrit��s sous la roche creuse.... Les uns, majestueusement ��tendus, les genoux ploy��s, l'oeil endormi ... les autres, le cou tendu, mugissant d'une voix solennelle.... Quelques jeunes b��tes contemplaient les festons de ch��vrefeuille pendus au granit, et semblaient en aspirer les parfums avec bonheur.
Toutes ces formes diverses, toutes ces attitudes se d��tachaient vigoureusement sur le fond rougeatre de la pierre, et la vo?te immense de la caverne, toute charg��e de sapins et de ch��nes aux larges serres incrust��es dans le roc, donnait �� ce tableau un air de grandeur magistrale.
?Eh bien! ma?tre Bernard, s'��cria Christian, voici le jour ... voici le moment du d��part....?
Puis s'adressant �� Fuldrade toute r��veuse:
?Fuldrade, dit-il �� demi-voix, ce bon vieillard de la ville n'aime pas le kirsch-wasser.... Je ne puis cependant lui offrir de l'eau.... N'auriez-vous pas autre chose??
Fuldrade prenant alors un petit baquet de ch��ne dans lequel le s��gare mettait son eau, regarda ma?tre Bernard avec douceur et sortit.
?Attendez, fit-elle, je reviens tout de suite.?
Elle traversa rapidement la prairie humide; l'eau des grandes herbes tombait sur ses petits pieds en gouttelettes cristallines. A son approche de la grotte, les plus belles vaches se lev��rent comme pour la saluer.... Elles les caressa toutes, l'une apr��s l'autre, et s'��tant assise, elle se mit �� traire l'une d'elles ... une grande vache blanche, qui se tenait immobile, les paupi��res demi-closes et semblait bienheureuse de sa pr��f��rence.
Quand le cuveau fut plein, Fuldrade s'empressa de revenir, et le pr��sentant �� ma?tre Bernard:
?Buvez �� m��me, fit-elle en souriant, le lait chaud se prend ainsi dans la montagne.?
Ce que fit le bonhomme, en la remerciant mille fois et vantant la qualit�� sup��rieure de ce lait ��cumeux, aromatique, form�� des plantes sauvages du Schn��eberg.
Fuldrade paraissait contente de ses ��loges, et Christian, qui venait de mettre sa blouse, debout derri��re eux, le baton �� la main, attendit la fin de ses compliments pour s'��crier:
?En route, ma?tre, en route!... Nous avons de l'eau maintenant.... La roue de la scie va tourner six semaines sans s'arr��ter.... Il faut que je sois de retour pour neuf heures.?
Et ils partirent, suivant le sentier sablonneux qui longe la c?te.
?Adieu, dit ma?tre Bernard �� la jeune fille, en se retournant tout ��mu, que le ciel vous rende heureuse!?
Elle inclina doucement la t��te sans r��pondre, et, les ayant suivis du regard jusqu'au d��tour de la vall��e, elle rentra dans la hutte et fut s'asseoir �� c?t�� de la vieille.
Le lendemain, vers six heures du matin, Bernard Hertzog, de retour �� Saverne, ��tait assis devant son bureau, et consignait au chapitre des antiquit��s du Dagsberg sa d��couverte des armes m��rovingiennes dans la hutte du s��gare du Nideck.
Plus tard, il d��montra que les mots Triboci, Tribocci, Tribunci, Tribochi et Triboques, se rapportent tous au m��me peuple et d��rivent des mots germains drayen b��chen, qui signifient trois h��tres. Il en cita comme preuve ��vidente les trois arbres et les trois crapauds du Nideck dont nos rois ont fait dans la suite les trois fleurs de lis.
Tous les antiquaires d'Alsace lui envi��rent cette magnifique d��couverte; son nom ne fut plus invoqu�� sur les deux rives du Rhin que pr��c��d�� des titres: doctus, doctissimus, eruditus Bernardus ... chose qui le gonflait d'aise et lui faisait prendre une physionomie presque solennelle.
Maintenant, mes chers amis, si vous ��tes curieux de savoir ce qu'est devenue la vieille Irmengarde, ouvrez le tome II des Annales arch��ologiques de Bernard Hertzog, et vous trouverez �� la date du 16 juillet 1849 la note suivante:
?La vieille diseuse de l��gendes Irmengarde, surnomm��e l'Ame des ruines, est morte la nuit derni��re, dans la hutte du s��gare Christian.
?Chose ��tonnante, �� la m��me heure, et, pour ainsi dire, �� la m��me minute, la grande tour du Nideck s'est ��croul��e dans la cascade....
?Ainsi disparait le plus antique monument de l'architecture m��rovingienne, dont l'historien Schlosser a dit: etc., etc., etc.?
LE TISSERAND DE LA STEINBACH
?Vous parlez de la montagne, me dit un jour le vieux tisserand Heinrich, en souriant d'un air m��lancolique, mais si vous voulez voir la haute montagne, ce n'est pas ici, pr��s de Saverne, qu'il faut rester; prenez la route du Dagsberg, descendez au Nideck, �� Haslach, montez �� Saint-Di��, ��
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