à l'assaut. En conséquence, on lui apporta une échelle qu'il pla?a contre la poutre.
Au moment où il s'apprêtait à monter, ses camarades lui crièrent en coeur de se conduire en homme; puis, ils le recommandèrent à saint Georges qui, chacun le sait, dompta jadis le dragon.
Quand il fut parvenu aux trois quarts de l'échelle, la chouette qui s'aper?ut qu'on en voulait à sa noble personne, et que d'ailleurs les clameurs de la foule avait effarouchée, ne sachant de quel c?té s'enfuir, se mit soudain à rouler de grands yeux, hérissa ses plumes, déploya ses vastes ailes, déserra son bec hideux, et poussa trois cris sauvages, d'une voix rauque et effrayante.
--Frappez-la de votre lance! s'écrièrent au même instant du dehors les bourgeois électrisés.
--Je voudrais bien vous voir à ma place, répondit le belliqueux aventurier; je gage qu'alors vous ne seriez pas si braves.
Toutefois, il monta encore d'un degré sur l'échelle; après quoi, la peur s'empara de lui, si bien qu'il lui resta tout au plus assez de force pour redescendre jusqu'au bas.
Dès lors, il ne se trouva plus personne pour affronter le danger.
--Au moyen de sa seule haleine et par la fascination de son regard, disaient-ils tous, cet horrible monstre a pénétré de son venin et blessé à mort le plus robuste d'entre nous; à quoi nous servirait donc de nous exposer à une mort certaine?
D'accord sur ce point, ils tinrent conseil à l'effet de savoir ce qu'il y avait à faire pour préserver la ville d'une ruine imminente. Pendant longtemps tous les moyens avaient été jugés insuffisants, lorsqu'enfin par bonheur le bourgmestre eut une idée.
--Mon avis est, dit ce respectable citoyen, que nous dédommagions, au nom de la commune, le propriétaire de cette grange; que nous lui payions la valeur de tous les sacs d'orge et de blé qu'elle renferme; puis, que nous y mettions le feu, aux quatre coins, ce qui ne co?tera la vie à personne. Ce n'est pas dans une circonstance aussi périlleuse qu'il faut se montrer avare des deniers publics; et d'ailleurs il s'agit ici du salut commun.
L'avis du bourgmestre fut adopté à l'unanimité.
En conséquence, le feu fut mis aux quatre coins de la grange, qui bient?t fut entièrement consumée, tandis que la chouette s'envolait par le toit.
Si vous doutez de la vérité de ce récit, allez sur les lieux vous en informer vous-même.
LES TROIS FRèRES.
Un vieillard avait trois fils, mais comme il ne possédait pour tout bien qu'une maison, et que cette maison lui avait été léguée par son père, il ne pouvait se résoudre à la vendre pour en partager le produit entre ses enfants. Dans cette incertitude, il lui vint une bonne idée:
--Risquez-vous par le monde, leur dit-il un jour; allez apprendre chacun un métier qui vous fasse vivre, et, votre apprentissage terminé, hatez-vous de revenir; celui qui me donnera alors la preuve la plus convaincante de son savoir-faire, héritera de ma maison.
En conséquence, le départ des trois fils fut arrêté. Ils décidèrent qu'ils deviendraient, l'un maréchal-ferrant, l'autre barbier, et le troisième ma?tre d'armes.
Ils fixèrent ensuite un jour et une heure où ils se retrouveraient dans la suite, pour revenir ensemble sous le toit paternel. Ces conventions arrêtées, ils partirent.
Or, il arriva que les trois frères eurent le bonheur de rencontrer chacun un ma?tre consommé dans le métier qu'ils voulaient apprendre. C'est ainsi que notre maréchal-ferrant ne tarda pas à être chargé de ferrer les chevaux du roi; aussi pensa-t-il dans sa barbe:
--Mes frères seront bien habiles s'ils me disputent la maison.
De son c?té, le jeune barbier eut bient?t pour pratiques les plus grands seigneurs de la cour, si bien qu'il se flattait aussi d'hériter de la maison à la barbe de ses frères.
Quant au ma?tre d'armes, avant de conna?tre tous les secrets de son art, il dut recevoir plus d'un bon coup d'estoc et de taille; mais la récompense promise soutenait son courage, en même temps qu'il exer?ait son oeil et sa main.
Quand l'époque fixée pour le retour fut arrivée, les trois frères se réunirent à l'endroit convenu, puis ils regagnèrent ensemble la maison de leur père.
Le soir même de leur retour, tandis qu'ils étaient assis tous quatre devant la porte, ils aper?urent un lièvre qui accourait à travers champs de leur c?té.
--Bravo! dit le barbier, voici une pratique qui vient fort à propos pour me fournir l'occasion de montrer mon savoir-faire!
En pronon?ant ces mots, notre homme prenait savon et bassin et préparait sa blanche mousse.
Quand le lièvre fut parvenu à proximité, il courut à sa poursuite, le rejoignit, et tout en galopant de concert avec le léger animal, il lui barbouilla le nez de savon, puis d'un seul coup de raseoir il lui enleva la moustache, sans lui faire la plus petite coupure, et sans oublier le plus petit poil.
--Voilà qui est travaillé! dit le père, il faudra que tes frères
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