dix gar?ons de bureau, tra?n�� dans une pi��ce voisine, d��shabill��, fouill��.
J'ai repris mes v��tements; quelqu'un est venu m'apporter mon chapeau et me dire qu'on d��sirait ��touffer l'affaire, mais que je devais quitter imm��diatement la maison. On m'a conduit jusqu'�� la porte. Le lendemain, Oudin m'a rapport�� mon mat��riel de scribe et mes affaires personnelles.
Voil�� cette mis��rable histoire. Je n'aime pas �� la raconter, parce que je ne peux le faire sans ressentir un inexprimable agacement.
II
Notez en outre que l'affaire Sureau marque le d��but de mes malheurs.
Quand je dis ?malheurs?, je n'entends pas surtout les grands d��sagr��ments qui ont r��sult��, pour moi, de la perte de ma place. Je pense plut?t �� la d��tresse morale dans laquelle je patauge depuis cette ��poque et d'o�� je ne sortirai peut-��tre jamais plus.
J'ai, ce jour-l��, mesur��, visit�� des profondeurs dont mon esprit ne peut plus s'��vader. Il s'est fait une d��chirure dans les nuages et, pendant une minute, j'ai tr��s nettement regard�� le fond du fond.
Inutile de raisonner sur des choses d��raisonnables. J'aime encore mieux vous raconter les ��v��nements qui sont arriv��s par la suite. Remarquez en passant qu'appeler ��v��nements des brimborions sans importance, comme tout ce qui est de moi, ?a fait piti�� quand on y pense.
Mon algarade avec les gens de M. Sureau avait eu lieu vers dix heures du matin. Il n'��tait pas dix heures et demie quand je me trouvai dans la rue. Je n'avais plus qu'une chose �� faire: retourner �� la maison.
J'habite avec ma m��re. Je m'aper?ois que vous ne savez rien. Il faut que je vous explique tout, que je vous raconte tout. C'est insupportable, quand on parle de soi, on n'a jamais fini.
Ma m��re est veuve, mon p��re est mort alors que j'��tais encore dans la premi��re enfance, si bien que je ne connais presque rien de lui. Entendez que j'ai tr��s peu de souvenirs Absolument personnels. A part cela, ma m��re m'a racont�� quatre ou cinq cents fois certaines histoires de mon p��re, en sorte que ces histoires font partie int��grante de ma M��moire et que je dois accomplir un r��el effort pour distinguer ces souvenirs-l�� de mes souvenirs �� moi. Mais nous parlerons de mon p��re une autre fois.
Nous avons toujours habit�� notre logement de la rue du Pot-de-Fer. Trois pi��ces et une cuisine, au quatri��me ��tage. J'ai ce logement en horreur et, pourtant, je ne suis bien que l��.
La maison, l'endroit o�� l'on vit d'ordinaire finit par devenir comme une image de l'��tre: on ne conna?t que ?a, et on en voit toute la tristesse, toute l'intol��rable tristesse.
Ma m��re a une tr��s petite rente. Avec ce revenu et le peu que je gagne elle fait tr��s bien marcher la maison. Ma m��re est une femme admirable, la seule personne au monde qui me donne parfois envie de me jeter �� genoux.
Je vous dis cela en passant, mais ?a doit ��tre bien bon de se jeter �� genoux devant quelqu'un, de le v��n��rer, de lui ouvrir son coeur, de s'en remettre �� lui de toutes choses. Quand je pense �� l'humanit��, quand je pense �� tous ces bougres d'hommes, ce que je leur reproche le plus, ce n'est pas le mal qu'ils font; c'est de ne pas s'arranger pour qu'une fois de temps en temps on ait le besoin imp��rieux de se prosterner devant l'un d'eux, de lui embrasser les pieds, de lui jurer fid��lit��, de le servir comme ferait un esclave, ou un chien. Ah bien, oui! Il n'y a rien �� tirer de ces brutes-l��! On leur offrirait son ame toute br?lante, arrach��e toute vive, qu'ils prendraient l'air soup?onneux d'un tripier qui regarde une pi��ce d��mon��tis��e.
Je vous le r��p��te, ma m��re est une femme admirable. Si bonne, si courageuse, si peu semblable �� moi! Car moi, je suis sans doute m��prisable, mais pour des raisons que je reste seul �� conna?tre, je vous prie de le croire; pour des raisons que ne sauraient imaginer ni Oudin, ni M. Jacob, ni m��me Lanoue. Ceux-l��, plut?t que de me m��priser, ils feraient mieux de se regarder en face avec sang-froid. D'ailleurs, ils ne me m��prisent peut-��tre pas, au fond.
A part cela, ma m��re a un petit d��faut. Elle me traite toujours comme si j'��tais demeur�� le bambin qu'elle a dorlot�� et gourmand�� jadis. C'est vexant pour un homme qui approche de la trentaine. A dire juste, ma m��re est de caract��re un peu bougon. Un tr��s petit d��faut, je le sais, et qui, toutefois, m'est extr��mement p��nible, surtout dans certaines occasions.
C'est �� ce travers de ma m��re que je pensais en sortant de la maison Socque et Sureau.
Le grand air m'avait fait du bien. Je commen?ais �� me ressaisir, �� rassembler mes id��es qui tiraient dans tous les sens, comme un attelage d��courag�� par une longue c?te.
Je suivais le quai d'Austerlitz. J'essayais de comprendre
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