Comte du Pape | Page 8

Hector Malot
pouvais me charger de cette cause �� plaider qu'en prenant parti dans la querelle qui vous divise, vous et M. votre beau-p��re, et c'e?t ��t�� une inconvenance de ma part.
Madame de la Roche-Odon ne r��pondit pas un mot, et madame Pr��tavoine ne tira de cette tentative qu'un doute de plus. ��tait-ce seulement parce qu'il lui d��plaisait de recommencer des proc��s, que madame de la Roche-Odon ne voulait pas ��manciper sa fille? ��tait-ce au contraire parce qu'elle attendait la mort prochaine du comte de la Roche-Odon, si bien qu'elle aurait pendant un certain temps l'administration de la fortune, que sa fille non ��mancip��e, recueillerait dans cet h��ritage?
Comme madame Pr��tavoine, d��cid��e �� en rester l�� pour cette premi��re visite, s'��tait lev��e et allait prendre cong�� de Madame de la Roche-Odon, un jeune homme entra dans le salon.
Il pouvait avoir vingt ans environ; il ��tait de haute taille, avec une grosse t��te blonde sur de larges ��paules; le visage ��tait imberbe, sans m��me un l��ger duvet; le nez ��cras��, l'oeil petit, rond, mais brillant, la bouche largement fendue, avec des dents blanches et pointues; en tout un ��tre baroque et qui �� premi��re vue ��tait loin d'inspirer la sympathie.
--Mon fils le prince Michel Sobolewski, dit madame de la Roche-Odon.
Puis se tournant vers madame Pr��tavoine:
--Madame Pr��tavoine de Cond��-le-Chatel, qui veut bien nous apporter des nouvelles de B��reng��re.
Tout d'abord le prince Michel avait regard�� cette vieille femme v��tue de noir, d'un coup d'oeil indiff��rent qu'on accorde �� une domestique ou �� une fournisseuse.
Cette pr��sentation amena un sourire sur ses l��vres pales.
--Et comment est-elle, la petite soeur?
Ce fut madame de la Roche-Odon qui r��pondit �� cette question en r��sumant en quelques mots tout ce que madame Pr��tavoine venait de lui dire.
--Ah bah! si jolie que cela. Quel age a-t-elle donc maintenant?
--Seize ans, r��pondit madame Pr��tavoine.
--Seize ans et jolie. Alors j'esp��re qu'elle tra?ne toute une troupe de soupirants derri��re elle; mais qu'elle ne fasse pas la b��tise de choisir un mari. Je lui ��crirai. Il ne faut pas qu'elle se marie avant d'avoir vu le monde. Et nous le lui montrerons, n'est-ce pas, m��re? Son mari doit avoir un grand nom ou une grande situation et ��tre un peu b��ta, afin qu'elle le m��ne par le bout du nez: je lui trouverai ?a.

V
Apr��s avoir d��pos�� sa m��re �� la porte de madame de la Roche-Odon, Aur��lien, achevant d'user son heure de voiture, s'��tait fait conduire au palais Colonna, �� l'ambassade de France.
Mais c'est l'ambassadeur qui occupe le palais Colonna; quant aux bureaux, on les a install��s dans des communs, anciennes ��curies, remises ou cuisines, qui ouvrent leur porte borgne sur une ruelle appel��e la via della Pilotta.
Aur��lien trouva son ancien camarade M. de Vaunoise dans une salle basse, enfonc�� dans un grand fauteuil, et lisant un num��ro du _Sport_, derri��re lequel il disparaissait si bien, qu'on ne voyait de sa personne que deux pieds pos��s sur le dossier d'une chaise qui lui servait d'appui.
Il fallut qu'Aur��lien fit le tour de cette chaise pour d��couvrir son ami derri��re le Sport.
--Tiens, Pr��te-Avoine! s'��cria le jeune attach�� en lachant son journal et en posant brusquement ses pieds par terre, Pr��te-Avoine �� Rome!
C'��tait ainsi que M. de Vaunoise avait l'habitude de prononcer ce nom roturier de Pr��tavoine, et il le faisait avec une d��sinvolture tout aristocratique.
Si Aur��lien avait ��t�� encore �� l'Universit�� et s'il n'avait point eu besoin de lui, il lui aurait r��pondu comme il lui r��pondait autrefois:
--Oui, mon cher Balour-Eau.
Mais ce n'��tait pas le moment de blesser celui dont il venait r��clamer les services, et assur��ment ce nom de Balour-Eau ainsi prononc�� n'e?t point resserr�� les liens de leur camaraderie.
En effet, M. le vicomte de Vaunoise se nommait, de son nom patronymique Baloureau, et sa noblesse ��tait de trop fra?che date pour qu'il n'en f?t pas fier comme un paon. Jusqu'en 1830 ses p��res, qui ��taient ardoisiers dans l'Anjou, n'avaient eu d'autre nom que celui de Baloureau, et c'��tait �� cette ��poque que Charles X, ou plus justement M. de Polignac, voulant r��compenser le z��le monarchique et religieux des Baloureau, en avait fait des comtes de Vaunoise. Tout le monde connaissait l'origine et la date de ces lettres de noblesse, et personne n'avait oubli�� le nom de Baloureau, personne except�� ceux qui le portaient, bien entendu.
C'��tait m��me pour que son petit-fils f?t digne de son titre que le vieux p��re Baloureau avait voulu en faire un diplomate. Et par un bienheureux hasard qui ne se rencontre pas souvent, il s'��tait trouv�� que le jeune h��ritier des ardoisiers avait quelques-unes des qualit��s de la profession qu'on lui imposait; de la finesse, de la politesse, du bon sens, beaucoup d'entregent, une affabilit�� qui le faisait tout �� tous, de l'esprit, une extr��me curiosit�� de tout savoir, l'amour de l'intrigue pour le plaisir de l'intrigue, de la r��serve sous une apparence de
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 127
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.