il n'y a pas �� se g��ner, et c'est un ��tre sans cons��quence, lorsque son escouade n'est pas l��, ba?onnette au bout du fusil, pour vous mener o�� vous n'avez pas envie d'aller.
?Votre parent a-t-il le mal de mer? demanda miss Nevil d'un ton sec.
-- Jamais, mademoiselle; le coeur ferme comme un roc, sur mer comme sur terre.
-- Eh bien, vous pouvez l'emmener, dit-elle.
-- Vous pouvez l'emmener?, r��p��ta le colonel, et ils continu��rent leur promenade.
Vers cinq heures du soir, le capitaine Matei vint les chercher pour monter �� bord de la go��lette. Sur le port, pr��s de la yole du capitaine, ils trouv��rent un grand jeune homme v��tu d'une redingote bleue boutonn��e jusqu'au menton, le teint basan��, les yeux noirs, vifs, bien fendus, l'air franc et spirituel. �� la mani��re dont il effa?ait les ��paules, �� sa petite moustache fris��e, on reconnaissait facilement un militaire; car, �� cette ��poque, les moustaches ne couraient pas les rues, et la garde nationale n'avait pas encore introduit dans toutes les familles la tenue avec les habitudes de corps de garde.
Le jeune homme ?ta sa casquette en voyant le colonel, et le remercia sans embarras et en bons termes du service qu'il lui rendait.
?Charm�� de vous ��tre utile, mon gar?on?, dit le colonel en lui faisant un signe de t��te amical.
Et il entra dans la yole.
?Il est sans g��ne, votre Anglais?, dit tout bas en italien le jeune homme au patron.
Celui-ci pla?a son index sous son oeil gauche et abaissa les deux coins de la bouche. Pour qui comprend le langage des signes, cela voulait dire que l'Anglais entendait l'italien et que c'��tait un homme bizarre. Le jeune homme sourit l��g��rement, toucha son front en r��ponse au signe de Matei, comme pour lui dire que tous les Anglais avaient quelque chose de travers dans la t��te, puis il s'assit aupr��s du patron, et consid��ra avec beaucoup d'attention, mais sans impertinence, sa jolie compagne de voyage.
?Ils ont bonne tournure, ces soldats fran?ais, dit le colonel �� sa fille en anglais; aussi en fait-on facilement des officiers.?
Puis, s'adressant en fran?ais au jeune homme:
?Dites-moi, mon brave, dans quel r��giment avez-vous servi??
Celui-ci donna un l��ger coup de coude au p��re du filleul de son petit-cousin, et, comprimant un sourire ironique, r��pondit qu'il avait ��t�� dans les chasseurs �� pied de la garde, et que pr��sentement il sortait du 7e l��ger.
?Est-ce que vous avez ��t�� �� Waterloo? Vous ��tes bien jeune.
-- Pardon, mon colonel; c'est ma seule campagne.
-- Elle compte double?, dit le colonel. Le jeune Corse se mordit les l��vres.
?Papa, dit miss Lydia en anglais, demandez-lui donc si les Corses aiment beaucoup leur Bonaparte??
Avant que le colonel e?t traduit la question en fran?ais, le jeune homme r��pondit en assez bon anglais, quoique avec un accent prononc��:
?Vous savez, mademoiselle, que nul n'est proph��te en son pays. Nous autres, compatriotes de Napol��on, nous l'aimons peut-��tre moins que les Fran?ais. Quant �� moi, bien que ma famille ait ��t�� autrefois l'ennemie de la sienne, je l'aime et l'admire.
-- Vous parlez anglais! s'��cria le colonel.
-- Fort mal, comme vous pouvez vous en apercevoir.?
Bien qu'un peu choqu��e de son ton d��gag��, miss Lydia ne put s'emp��cher de rire en pensant �� une inimiti�� personnelle entre un caporal et un empereur. Ce lui fut comme un avant go?t des singularit��s de la Corse, et elle se promit de noter le trait sur son journal.
?Peut-��tre avez-vous ��t�� prisonnier en Angleterre? demanda le colonel.
-- Non, mon colonel, j'ai appris l'anglais en France, tout jeune, d'un prisonnier de votre nation.?
Puis, s'adressant �� miss Nevil:
?Matei m'a dit que vous reveniez d'Italie. Vous parlez sans doute le pur toscan, mademoiselle; vous serez un peu embarrass��e, je le crains, pour comprendre notre patois.
-- Ma fille entend tous les patois italiens, r��pondit le colonel; elle a le don des langues. Ce n'est pas comme moi.
-- Mademoiselle comprendrait-elle, par exemple, ces vers d'une de nos chansons corses? C'est un berger qui dit �� une berg��re:
?S'entrassi 'ndru Paradisu santu, santu, E nun truvassi a tia, mi n'esciria.?[2]
Miss Lydia comprit, et trouvant la citation audacieuse et plus encore le regard qui l'accompagnait, elle r��pondit en rougissant: ?Capisco.?
?Et vous retournez dans votre pays en semestre? demanda le colonel.
-- Non, mon colonel. Ils m'ont mis en demi-solde probablement parce que j'ai ��t�� �� Waterloo et que je suis compatriote de Napol��on. Je retourne chez moi, l��ger d'espoir, l��ger d'argent, comme dit la chanson.?
Et il soupira en regardant le ciel.
Le colonel mit la main �� sa poche, et retournant entre ses doigts une pi��ce d'or, il cherchait une phrase pour la glisser poliment dans la main de son ennemi malheureux.
?Et moi aussi, dit-il, d'un ton de bonne humeur, on m'a mis en demi-solde; mais... avec votre demi-solde vous n'avez pas de quoi vous acheter du tabac. Tenez, caporal.?
Et il essaya de faire entrer la pi��ce d'or dans
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