Cent-vingt jours de service actif | Page 6

Charles R. Daoust
Syndicate.
A peine les soldats étaient-ils descendus des chars que la, pluie
commença à tomber. Malheureusement il n'y avait aucun abri pour
recevoir tous les soldats et plusieurs compagnies attendirent au-delà
d'une demi-heure exposées à l'intempérie de la saison. Quelques
murmures se firent entendre, mais ça ne dura pas longtemps, car
comme en bien d'autres circonstances semblables plus tard, le bon
esprit des soldats reprit le dessus et bientôt des chante joyeux se firent
entendre. Quelques-uns, chantèrent à contre-coeur, mais tout le monde
chanta.
A deux heures du matin, après avoir bien mangé, les compagnies 2, 3, 4,
5 et 6 se retirèrent dans les hangars de la compagnie du Pacifique,
situés aux environs, tandis que les autres, 1, 7 et 8, remontèrent en
chars et furent conduites au village de Jackfish, où un grand hangar
avait été préparé pour elles. Un bon feu fut entretenu toute la nuit dans
les deux poêles de l'habitation et pour la première fois depuis leur
départ de Montréal, les volontaires dormirent bien et se reposèrent.
À dix heures l'on se réveilla et les compagnies qui avaient couché au
village retournèrent en chars au Syndical pour y prendre le déjeuner.
La maison où se servaient les repas était encore remplie, les autres
compagnies qui avaient couché au Syndicat n'ayant pas encore fini leur
déjeuner. La pluie continuait à tomber de plus belle et les soldats furent
forcés de s'entasser les uns sur les autres dans les hangars.
Pendant l'après-midi, les volontaires se réfugièrent sous des tentes et
l'on s'amusa à chanter pour passer le temps, car la pluie ne cessait pas.
Quelques-uns se dirigèrent vers une vieille masure dont l'enseigne

moins prétentieuse par la forme que par le nom qu'elle portait avait
attiré leur attention. On vendait de la boisson dans ce chantier, la bière
s'y débitait, à 15 contins, et ce qu'on était convenu d'appeler du
"whiskey" à 25 contins le verre.
A quatre heures, le repas du soir fut servi à tout le monde, puis chaque
compagnie rentra dans ses quartiers.
A sept heures, le coucher fut sonné et à huit heures, tout le monde
reposait.
Dès quatre heures, le lendemain matin, les trois compagnies qui avaient
passé la nuit au village, se levèrent et les chars n'arrivant pas, elles se
mirent en marche et traversèrent le lac à pied jusqu'au Syndicat.
Après une heure de marche, ces soldats n'eurent pour tout déjeuner
qu'une tranche de lard entre deux morceaux de pain.
A huit heures a.m. les premiers traîneaux, chargés de soldats, se mirent
en marche et les autres ne tardèrent pas à les suivre. Ce nouveau trajet
le long du lac Supérieur, malgré qu'il se fît en voiture, ne fut guère plus
plaisant que le premier. Le froid était très-grand et les soldats entassés
dans les voitures furent souvent obligés de descendre pour ne pas geler
des pieds. Enfin, vers deux heures de l'après-midi, le premier traîneau
entra dans une baie profonde dont on ne put connaître le nom. Après
une halte d'une heure et demie en cet endroit, le bataillon remonta en
chars plates-formes et continua jusqu'à McKay Harbour où il y avait un
hôpital. Ici, on laissa notre invalide Boucher, en même temps que l'on
prenait à bord le sergent Nelson devenu si fameux depuis l'affaire du
"Toronto News." Il fut installé dans notre char, le premier du train, et
ne connaissant l'individu que par ce qu'il voulait bien nous dire de
lui-même, chacun l'entoura de soins et le traita avec une hospitalité
toute canadienne. Après que les soldats eussent mangé quelques
galettes et de la viande, le train se mit en mouvement et continua
jusqu'à la fin de la ligne du chemin de fer à Michipicoten. Arrivés ici a
sept heures et demie, les soldats durent traverser de nouveau à pied une
longueur de onze milles sur la Baie du Tonnerre et arrivèrent à Red
Rock à onze heures du soir.

Ici des chars à passagers attendaient le régiment, et vers minuit le train
partait.
Cette journée fut une des plus rudes pour les soldats. De quatre heures
du matin à onze heures du soir, on n'avait pas cessé de marcher un seul
moment. Quatorze milles à pied, vingt-deux en traîneaux et plus de
cent milles en mauvais chars découverts, en tout près de cent cinquante
milles parcourus dans la journée.
Vers six heures, jeudi matin, l'on entra dans Port Arthur. Les soldats
furent bientôt éveillés par les cris de la foule qui les attendait à la gare.
Pendant que les compagnies s'éloignaient, chacune de son côté, pour
déjeuner dans les différents hôtels de la ville, les officiers se rendirent à
l'hôtel Brunswick. sur l'invitation du maire de la localité. Après
déjeuner, profitant d'un congé de quelques heures, les soldats visitèrent
les environs de la ville et s'amusèrent beaucoup, étant
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