Ce que vaut une femme | Page 4

Éline Roch
Les affections et les exemples de la famille sont de tous les plus fortifiants. Une femme, une jeune fille, qui sauront cr��er au mari, au p��re, au fr��re, un int��rieur tout de tendresse, de gaiet��, de confort relatif, auront de grandes chances de les retenir aupr��s d'elles et d'��viter ces divisions, ces luttes intimes, qui rendent parfois l'existence en famille si dure et si p��nible �� supporter.
Il y avait chez mes parents, et j'en ai fid��lement gard�� le souvenir, quoique je fusse alors tr��s jeune, un ouvrier que l'on renommait pour son habilet�� et ses rares talents. Y avait-il un ouvrage press��, exigeant de l'exp��rience et de l'adresse, c'��tait �� lui que l'on avait recours. Honn��te homme, excellent camarade, il ��tait aim�� de tous �� l'atelier: malheureusement il avait ce d��faut, si fr��quent parmi les ouvriers des ��tats libres, il s'adonnait �� la boisson, et alors adieu le travail; tant que durait l'argent de la quinzaine, on ��tait s?r de ne pas le revoir. Que de fois n'avions-nous pas vu sa pauvre femme, d��sesp��r��e, venir le jour de la paie supplier qu'on lui rem?t l'argent de son mari, et mon p��re y consentait de grand coeur, certain que B... n'oserait pas opposer de r��sistance et sachant aussi que c'��tait le seul moyen de le voir revenir le lundi suivant. Depuis, nous l'avions compl��tement perdu de vue, nous avions bien entendu dire qu'il avait une petite fille et nous plaignions la malheureuse femme, laborieuse et propre pourtant, que l'inconduite de son mari allait, pensions-nous, plonger dans la mis��re avec son enfant.
Derni��rement, ayant besoin d'un sp��cialiste pour un ouvrage de peu d'importance, je m'informai o�� je pourrais le trouver, et celui que l'on m'indiqua fut pr��cis��ment notre ancien ouvrier. Je m'attendais �� trouver chez lui la d��sunion et la mis��re. Quels ne furent pas mon ��tonnement et ma satisfaction en le voyant dans une situation telle que je pouvais �� peine y croire. La maison propre et bien tenue respirait un air de confort, la m��re et la jeune fille paraissaient heureuses et gaies. B... qui parut me revoir avec plaisir, m'expliqua qu'il s'��tait ��tabli �� son compte et qu'ayant beaucoup d'ouvrage il gagnait sa vie largement. C'est ma fille qui m'a sauv��, me dit-il.--Un jour que j'avais d��pens�� tout l'argent de ma paie, nous ��tions sans un sou �� la maison lorsque la petite tomba dangereusement malade. Comment faire pour la soigner, nous ��tions endett��s dans le quartier et le pharmacien ne me connaissait pas. Pour la premi��re fois de ma vie, je compris toute l'��tendue de mes torts et je me fis horreur: si ma fille ��tait morte, certainement je me serais tu��. Je jurai de ne plus boire, mais combien d'abord ce fut difficile. Je me conduisais mieux cependant, et plus jamais ne manquais �� l'atelier. Et puis en grandissant ma fillette devenait si caressante et si gentille, elle avait pour moi tant d'aimables pr��venances que je m'attachai �� elle de plus en plus. Je me dis qu'apr��s avoir failli ne pas pouvoir la soigner, il me deviendrait impossible de la bien ��lever, de la marier plus tard convenablement. D��s que j'eus fait ces r��flexions, je cessai compl��tement de boire, et vous, madame, qui m'avez connu, vous pouvez ��tre ��tonn��e de ce changement, c'est �� ma femme et �� ma fille que je le dois. Et je sentais qu'�� l'affection qu'il leur porte se m��lait une grande reconnaissance.
Cet exemple et beaucoup d'autres que bien certainement vous aurez rencontr��s, prouve combien est forte l'influence de la femme dans la famille et combien dans la plupart des cas il lui serait facile de ramener l'homme �� l'accomplissement de ses devoirs. Il n'existe pas, �� notre avis, de plus l��gitime fiert�� que celle de l'enfant qui pourrait avoir cette intime conviction d'avoir moralement sauv�� ses parents, de les avoir aid��s �� se relever �� leurs propres yeux et �� ceux des autres.
Si nous avons des fr��res et soeurs, aimons-les tendrement, int��ressons-nous �� tout ce qui les concerne. S'ils sont plus jeunes que nous, ayons �� coeur d'aider nos parents �� les bien ��lever, �� leur inspirer de bons sentiments, ne leur donnons nous-m��mes que de bons exemples. Prot��geons-les en toute occasion, et rempla?ons aupr��s d'eux notre m��re, si des circonstances malheureuses viennent �� les en priver. S'ils sont nos a?n��s reconnaissons-leur une certaine part d'autorit�� sur nous, acceptons leurs conseils; en tous cas ��vitons de les taquiner, de leur causer de la peine. N'agissons jamais envers eux avec cette acrimonie qui am��ne parfois de si regrettables divisions entre les enfants d'une m��me famille. Habituons-nous de bonne heure �� supporter et �� nous pardonner mutuellement nos d��fauts de caract��re. Que de relations gat��es ou irr��m��diablement perdues qui auraient pu ��tre les meilleures de notre vie, parce que nous n'avons pas su resserrer les
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