avec ce bavard d'Hom��re, cet insens�� de Dante et ce poss��d�� de Michel-Ange.
Et, comme Th��odore riait de l'indignation de notre belle amie, j'ajoutai:
--J'ai fini mon plaidoyer, car je ne vois rien de mieux que la conclusion de Julie. A toutes vos critiques, nous r��pondrons: c'est vrai; et vous voil�� empaill��, cristallis��, momifi�� dans votre victoire avec deux ou trois grands noms, Boileau, Voltaire, Racine, tout au plus.
--Et Rapha?l, s'il vous pla?t! et La Fontaine, et B��ranger, et tant d'autres qui ont du se contenir et se coordonner!
--Oh! certes, vous ��tes en bonne compagnie, et vous nous rendriez jaloux si vous en aviez le monopole: mais vous ne l'avez pas; nous r��clamons.
--Vous n'en avez pas le droit; si vous admirez sinc��rement les miens, vous ne pouvez pas admirer les v?tres sans restriction.
--Il en est pourtant ainsi, et notre tol��rance pour ce que vous appelez nos d��fauts nous rend plus heureux et plus riches que vous puisque �� la liste de votre Panth��on, que nous signons des deux mains, nous pouvons ajouter celle de tous ces pauvres qui s'appellent saint Jean, Hom��re, Shakspeare, Michel-Ange, Puget, Beethoven, Byron, Mozart....
--Celui-l�� est �� moi, je le retiens! s'��cria Th��odore.
--Allons donc! Est-ce qu'il est digne de votre sanctuaire? dit Julie. Et don Juan? Vous ne voyez donc pas que c'est du romantisme?
--Je ne veux pas, r��pondit Th��odore, que vous m'enr��gimentiez dans une ��cole. Je ne suis pas si p��dant que vous croyez, belle anarchiste. Je n'ai jamais fait la guerre qu'�� l'��tiquette plac��e sur l'oeuvre du romantisme, et si l'on n'e?t jamais trait�� Racine de cr��tin, et Despr��aux de monsieur Boileau, j'aurais laiss�� dire qu'il ne fallait plus de lisi��res �� la forme. Mais, sortons de ces distinctions qui deviendraient trop subtiles et insolubles, si nous voulions ranger les grands noms du pass��, et m��me ceux du pr��sent, en deux classes tranch��es. C'est au point de vue philosophique que je veux envisager les choses: c'est �� ce point de vue que je vous avoue ma pr��f��rence pour les g��nies �� id��es nettes et �� volont��s soutenues; c'est �� ce point de vue que je vous demande si, en fait de g��nie, le premier rang appartient, selon vous, �� ceux qui ont le plus de d��fauts et non �� ceux qui en ont le moins?
--Voil�� une question insidieuse et mal pos��e, dit Julie. Il faut nous demander lequel nous pr��f��rons, du g��nie qui a le plus de qualit��s ou de celui qui a le moins de d��fauts. Alors nous vous r��pondrons, c'est le premier. Prenez vos balances, homme sage, et pesez la Nuit de Michel-Ange avec la V��nus de M��dicis; vous trouverez la premi��re beaucoup plus lourde d'invraisemblances et de sublimit��s; la seconde, beaucoup plus l��g��re de toutes fa?ons; l'une r��elle et jolie, qui vous porte �� la sensualit��, l'autre impossible, mais id��ale, et qui vous porte �� l'enthousiasme.
--Est-ce donc �� dire, reprit Th��odore, qu'il n'est possible d'avoir de grandes puissances qu'�� la condition d'avoir de grandes erreurs?
--Eh! eh! peut-��tre, dit Louise, qui semblait lire le journal et ne pas ��couter la conversation. L'inspiration n'est peut-��tre jamais compl��te si elle ne s'est permis, �� ses heures, d'��tre excessive; et il y a longtemps que quelqu'un a dit; L�� o�� il n'y a pas trop, il n'y a jamais assez. Je crois que si l'on ��pluchait tes idoles, mon cher Th��odore, on y trouverait plus d'incorrections et de disproportions que tu n'en veux avouer; et si, dans ce mus��e que tu t'es arrang��, il s'est gliss�� quelqu'un d'incontest��, je crains fort qu'il ne soit pas incontestable, ou qu'il ne soit pas tout �� fait digne d'y prendre place.
--Allons, dit Th��odore, me voil�� battu, puisque la grand'm��re s'en m��le. Qui croirait �� tant d'enthousiasme r��volutionnaire sous ces bons et chers cheveux blancs? Mais encore une fois laissons la question litt��raire, puisque vous voil�� tous contre moi. R��solvez-moi seulement la question philosophique. Dites-moi o�� est la synth��se par vous aper?ue dans ces deux nouveaux volumes.
Somm�� de r��pondre, je r��pondis:
--Ces deux volumes sont une histoire personnelle. Vous demandez une synth��se; eh bien, l'odyss��e intellectuelle d'une existence de po?te, c'est, j'esp��re, une synth��se qui se d��gage et s'affirme. Faut-il y trouver un titre plus explicite pour vous que celui de Contemplations; appelons cela, si vous voulez, ?Journal d'une ame.? Toute analyse bien faite implique une synth��se prochaine, in��vitable. Toutes les fois que vous me peindrez admirablement et fid��lement comment une certitude vous est apparue, j'en conclurai que cette certitude vous est d��j�� acquise; et, quelle qu'elle soit, je ne vous accuserai plus de n'en avoir et de n'en vouloir aucune.
Or, cette analyse s'est faite lentement, �� travers de grandes agitations et de terribles d��sespoirs; raison de plus pour qu'elle prouve. Il ne faut point parler de ces choses-l�� trop �� son aise. La plupart des intellects humains est port��e �� une certaine
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