les bords du lac L��man, dans une pension situ��e �� quelques pas de Lausanne, et que, si le comte de Penneville s'y pr��sentait, il n'aurait pas besoin de frapper deux fois �� la porte pour qu'elle s'ouvrit. Il ��tait parti comme une fl��che, il ��tait accouru d'une seule traite �� Lausanne. Il avait ��crit de l�� �� Mme de Penneville une lettre de douze pages, o�� il lui racontait son heureuse aventure avec des effusions de tendresse et de joie bien propres �� la d��sesp��rer.
L'oncle et la ni��ce employ��rent toute leur soir��e �� causer, �� d��lib��rer, �� discuter. Comme il arrive d'ordinaire en pareil cas, on r��p��tait jusqu'�� vingt fois les m��mes choses; cela n'avance �� rien, mais cela soulage. M. de Miraval, qui prenait rarement les choses au tragique, s'appliquait �� consoler la comtesse; elle ��tait inconsolable.
?En bonne foi, disait-elle, pouvez-vous esp��rer que j'envisage de sang-froid la perspective d'avoir pour bru une cr��ature sortie on ne sait d'o��, la fille d'un homme tar��, une demoiselle de rien, qui a ��pous�� un homme de peu et qui s'en est s��par��e pour aller courir la bague �� Paris, une femme dont le nom a tra?n�� dans la _Gazette des tribunaux_, une femme qui d��crit des brouillards, qui compose des sonnets et qui, j'en suis certaine, a eu dix aventures au moins?
--Je ne sais pas si le compte y est, r��pondait le marquis, mais il est certain qu'on a dit longtemps avant nous que les ��tres les plus dangereux de cet univers sont les serpents �� sonnettes et les femmes �� sonnets. Il y a dix �� parier contre un que celle-ci est une intrigante et que voil�� une affaire bien d��sagr��able.
--Horace, d��solant Horace, s'��criait la comtesse, quel chagrin tu me causes! Ce cher gar?on a le coeur le plus noble, le plus g��n��reux; par malheur, il n'a jamais eu le sens commun; mais pouvais-je m'attendre?...
--H��las! oui, il fallait s'y attendre, interrompait le marquis. On ne saurait trop se d��fier des sagesses pr��coces; elles finissent souvent par des catastrophes. Je t'ai dit cent fois, ma ch��re Mathilde, que ton fils m'inqui��tait, qu'il nous m��nageait quelque facheuse surprise. Nous naissons tous avec un certain fonds de folie �� d��penser; heureux qui le d��pense en d��tail dans sa jeunesse! Horace a tout gard�� jusqu'�� vingt-huit ans, capital et int��r��ts, et voil��, le beau fruit de ses ��conomies. Les petites folies multipli��es sauvent des grandes; quand on n'en fait qu'une, elle est presque toujours ��norme et le plus souvent irr��parable. J'ai su me servir de ma jeunesse, moi qui te parle; j'aurais cru manquer �� mes devoirs les plus sacr��s si je l'avais laiss��e en friche. A vingt-deux ans, les femmes n'avaient plus grand'chose �� m'apprendre; je savais par coeur ce bel animal.
--Ah! mon oncle, permettez! s'��cria la comtesse un peu scandalis��e.
--Mille excuses. Je voulais seulement te faire entendre que, grace �� des exp��riences r��p��t��es, j'avais termin�� mon apprentissage avant l'age o�� l'on se marie, et que, si j'avais rencontr�� une Mme Corneuil, je me serais donn�� beaucoup de peine pour lui plaire; mais du diable si j'aurais song�� �� l'��pouser!?
Mme de Penneville pr��senta au marquis une tasse de th��, qu'elle avait sucr��e de sa blanche main, et elle lui dit d'une voix caressante:
?Mon cher oncle, vous seul pouvez nous sauver.
--Et le moyen? demanda-t-il.
--Horace a pour vous tant de respect, tant de d��f��rence! Vous avez toujours exerc�� une grande autorit�� sur lui.
--Bah! nous ne vivons plus sous le r��gime autoritaire.
--Aussi bien, vous lui avez toujours permis de se consid��rer comme votre h��ritier; cela vous cr��e des droits, ce me semble.
--Allons donc! les gar?ons qui comme ton fils voyagent dans les espaces renoncent facilement �� un h��ritage. Qu'est-ce que cent mille livres de rente au prix d'un joli scarab��e, embl��me de l'immortalit��?
--Mon oncle, mon cher oncle, je suis persuad��e que, si vous consentiez �� partir pour Lausanne...?
Le marquis fit un bond:
?Seigneur Dieu! dit-il, Lausanne est bien loin.?
Et il poussa un soupir en pensant �� la terrasse de son cercle.
?R��signez-vous �� cette corv��e, et je vous en serai �� jamais reconnaissante. Vous ferez entendre raison �� ce cher enfant.
--Ma ch��re Mathilde, je relis quelquefois mes po��tes latins. J'en connais un qui a dit que le propre de l'amour est de d��raisonner, et que pr��cher la raison �� un amoureux, autant vaut lui demander d'extravaguer avec sagesse, ut cum ratione insaniat.
--Horace a du coeur. Vous lui repr��senterez que ce mariage me r��duirait au d��sespoir.
--Il s'en doute, ma ch��re, puisqu'il n'a pas os�� venir t'embrasser en arrivant d'��gypte, et sois s?re qu'il ne viendra pas avant que tu lui aies donn�� ton consentement. On a beau aimer et respecter sa m��re, quand un homme est vraiment allum��... Et il l'est bien, juste ciel! Sa lettre en fait foi; c'est une prose qui sent la fi��vre et qui br?le le
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