lui est nécessaire et ne serait plus tributaire de l'étranger.
Douloureuse fatalité! Depuis un an, nos ennemis occupent et exploitent nos deux sources les plus abondantes de fer et de houille, le bassin de Briey et les mines du Nord et du Pas-de-Calais. Ils nous ont ainsi privés du plus formidable instrument de guerre! Au jour des règlements, il faudra tenir compte non seulement de la valeur matérielle de ces richesses minérales, mais encore et surtout de la valeur militaire qu'elles auraient eue pour nous pendant les hostilités[1].
Ajoutons un fait d'une grande importance et d'une savoureuse opportunité: c'est que la majeure partie des gisements houillers de la Sarre est la propriété privée de la couronne royale de Prusse et que, en se les appropriant, la France, sans léser les intérêts particuliers, fera seulement payer à la malfaisante dynastie des Hohenzollern une modeste partie de la ran?on de son pays.
Si, de plus, nous annexons la province de Cologne et si le régime douanier de l'Allemagne est renversé à notre profit, nous pourrons faire venir par des voies ferrées la houille de la vallée de la Ruhr et de la région westphalienne, encore plus abondante que celle de la vallée de la Sarre.
La Prusse rhénane au-dessus de l'Eifel est une contrée très peuplée et très riche où le commerce et l'industrie ont pris depuis un siècle un incroyable essor.
En Alsace, on a découvert entre Cernay et Mulhouse, dans la forêt de Nonnenbruck, des gisements de potasse qui, d'après les calculs du spécialiste Foerster, pourraient fournir 300 millions de potasse pure et vaudraient au moins soixante milliards. L'exploitation en est à peine commencée. La concession en a été achetée à l'état par de puissantes sociétés financières de Berlin. Pour ne pas léser les droits des particuliers, on pourrait forcer le gouvernement allemand, à titre d'indemnité de guerre, de rembourser l'argent qu'il a per?u de cette opération, et cette richesse fabuleuse reviendrait alors naturellement à la France.
Mais il est une autre richesse plus précieuse encore: c'est une population de sept à huit millions d'habitants qui s'ajouterait fort avantageusement à la n?tre et augmenterait sérieusement notre puissance militaire. Il y a là pour nous un intérêt vital.
La morale, la religion et le patriotisme gémissent également du fléau de la dépopulation qui sévit de plus en plus en France. Il faut espérer que la conscience publique, douloureusement éclairée par la guerre, comprendra qu'il faut absolument enrayer ce mal, et que les berceaux s'épanouiront bient?t, drus et joyeux, sur nos tombes sanglantes. Mais, en attendant, ce sera pour nous un immense avantage de pouvoir tirer chaque année quelques corps d'armée de cette riche pépinière de guerriers, de cette rive gauche du Rhin, qui en a tant fourni à la France sous l'Empire, sous la Révolution et, même avant son annexion, sous la Monarchie.
[Note 1: Consulter l'intéressant article: L'Allemagne et le fer, de M. Fernand Engerand, député du Calvados. Correspondant du 25 mars 1915.]
#III#
#NOTRE DROIT HISTORIQUE#
L'intérêt corrobore le droit.
Quelques Fran?ais trop scrupuleux pourraient faire cette objection: ?Est-ce que les avantages matériels et même la nécessité de la défense nationale que vous invoquez nous autorisent à occuper les terres de nos voisins? Nous reprochons justement à de Moltke d'avoir dit: ?Il est vrai que l'Alsace et la Lorraine appartiennent à la France, mais, comme nous en avons besoin, nous avons le droit de les prendre.? Or n'est-ce pas le même raisonnement que nous appliquons aux provinces rhénanes? N'est-ce pas la même désinvolture dans la même injustice??
C'est entendu, l'intérêt ne remplace pas le droit et ne le crée pas, mais, quand il s'y ajoute, il le corrobore. Or, c'est bien notre cas. Nous ne devons pas prendre le bien d'autrui; mais la question est précisément, et avant tout, de savoir à qui appartiennent les marches du Rhin, abstraction faite de l'avantage que leur possession peut assurer à l'occupant. Or, comme nous le verrons plus loin, elles ont été gauloises environ deux mille ans avant d'être germaniques.
L'Allemagne ne les a accaparées qu'au Xe siècle après Jésus-Christ, en vertu d'une diplomatie légale, mais arbitraire, d'un droit féodal abusif, qui partageait les nations comme un patrimoine entre les membres d'une même famille régnante, sans tenir compte des sympathies et des affinités électives des populations.
On pourrait dire aussi, sans tomber dans des subtilités de casuistique, qu'un peuple a le droit de vivre et par conséquent de prendre contre ses voisins toutes les mesures de défense que leur perfidie et leur brutalité rendent nécessaires. S'ils en souffrent, ils ne doivent s'en prendre qu'à eux-mêmes. Par conséquent, alors même que la rive gauche du Rhin, ce qui n'est pas, appartiendrait historiquement à l'Allemagne, celle-ci aurait perdu son droit de propriété, par l'usage criminel qu'elle en a fait depuis un demi-siècle; nous aurions le droit de la lui enlever à titre de chatiment pour le passé et de
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.