Alcools | Page 6

Guillaume Apollinaire
je gouvernais?Un mort parlait avec une jeune femme?V��tue d'une robe jaune?D'un corsage noir?Avec des rubans bleus et d'un chapeau gris?Orn�� d'une seule petite plume d��fris��e
Je vous aime?Disait-il?Comme le pigeon aime la colombe?Comme l'insecte nocturne?Aime la lumi��re
Trop tard?R��pondait la vivante?Repoussez repoussez cet amour d��fendu?Je suis mari��e?Voyez l'anneau qui brille?Mes mains tremblent?Je pleure et je voudrais mourir
Les barques ��taient arriv��es?A un endroit o�� les chevau-l��gers?Savaient qu'un ��cho r��pondait de la rive?On ne se lassait point de l'interroger?Il y eut des questions si extravagantes?Et des r��ponses tellement pleines d'��-propos?Que c'��tait �� mourir de rire?Et le mort disait �� la vivante
Nous serions si heureux ensemble?Sur nous l'eau se refermera?Mais vous pleurez et vos mains tremblent?Aucun de nous ne reviendra
On reprit terre et ce fut le retour?Les amoureux s'entr'aimaient?Et par couples aux belles bouches?Marchaient �� distances in��gales?Les morts avaient choisi les vivantes?Et les vivants?Des mortes?Un gen��vrier parfois?Faisait l'effet d'un fant?me
Les enfants d��chiraient l'air?En soufflant les joues creuses?Dans leurs sifflets de viorne?Ou de sureau?Tandis que les militaires?Chantaient des tyroliennes?En se r��pondant comme on le fait?Dans la montagne
Dans la ville?Notre troupe diminua peu �� peu?On se disait?Au revoir?A demain?A bient?t?Bient?t entraient dans les brasseries?Quelques-uns nous quitt��rent?Devant une boucherie canine?Pour y acheter leur repas du soir
Bient?t je restai seul avec ces morts?Qui s'en allaient tout droit?Au cimeti��re?O��?Sous les Arcades?Je les reconnus?Couch��s?Immobiles?Et bien v��tus?Attendant la s��pulture derri��re les vitrines
Ils ne se doutaient pas?De ce qui s'��tait pass��?Mais les vivants en gardaient le souvenir?C'��tait un bonheur inesp��r��?Et si certain?Qu'ils ne craignaient point de le perdre
Ils vivaient si noblement?Que ceux qui la veille encore?Les regardaient comme leurs ��gaux?Ou m��me quelque chose de moins?Admiraient maintenant?Leur puissance leur richesse et leur g��nie?Car y a-t-il rien qui vous ��l��ve?Comme d'avoir aim�� un mort ou une morte?On devient si pur qu'on en arrive?Dans les glaciers de la m��moire?A se confondre avec le souvenir?On est fortifi�� pour la vie?Et l'on n'a plus besoin de personne
CLOTILDE
L'an��mone et l'ancolie?Ont pouss�� dans le jardin?O�� dort la m��lancolie?Entre l'amour et le d��dain
Il y vient aussi nos ombres?Que la nuit dissipera?Le soleil qui les rend sombres?Avec elles dispara?tra
Les d��it��s des eaux vives?Laissent couler leurs cheveux?Passe il faut que tu poursuives?Cette belle ombre que tu veux
CORT��GE
A M. L��on Bailby
Oiseau tranquille au vol inverse oiseau?Qui nidifie en l'air?A la limite o�� notre sol brille d��j��?Baisse ta deuxi��me paupi��re la terre t'��blouit?Quand tu l��ves la t��te
Et moi aussi de pr��s je suis sombre et terne?Une brume qui vient d'obscurcir les lanternes?Une main qui tout �� coup se pose devant les yeux?Une vo?te entre vous et toutes les lumi��res?Et je m'��loignerai m'illuminant au milieu d'ombres
Et d'alignements d'yeux des astres bien-aim��s
Oiseau tranquille au vol inverse oiseau?Qui nidifie en l'air?A la limite o�� brille d��j�� ma m��moire?Baisse ta deuxi��me paupi��re?Ni �� cause du soleil ni �� cause de la terre?Mais pour ce feu oblong dont l'intensit�� ira s'augmentant?Au point qu'il deviendra un jour l'unique lumi��re
Un jour?Un jour je m'attendais moi-m��me?Je me disais Guillaume il est temps que tu viennes?Pour que je sache enfin celui-l�� que je suis?Moi qui connais les autres?Je les connais par les cinq sens et quelques autres?Il me suffit de voir leur pieds pour pouvoir refaire ces gens �� milliers?De voir leurs pieds paniques un seul de leurs cheveux?De voir leur langue quand il me pla?t de faire le m��decin?Ou leurs enfants quand il me pla?t de faire le proph��te?Les vaisseaux des armateurs la plume de mes confr��res?La monnaie des aveugles les mains des muets?Ou bien encore �� cause du vocabulaire et non de l'��criture?Une lettre ��crite par ceux qui ont plus de vingt ans?Il me suffit de sentir l'odeur de leurs ��glises?L'odeur des fleuves dans leurs villes?Le parfum des fleurs dans les jardins publics?O Corneille Agrippa l'odeur d'un petit chien m'e?t suffi?Pour d��crire exactement tes concitoyens de Cologne?Leurs rois-mages et la ribambelle ursuline?Qui t'inspirait l'erreur touchant toutes les femmes?Il me suffit de go?ter la saveur de laurier qu'on cultive pour que j'aime ou que je bafoue?Et de toucher les v��tements?Pour ne pas douter si l'on est frileux ou non?O gens que je connais?Il me suffit d'entendre le bruit de leurs pas?Pour pouvoir indiquer �� jamais la direction qu'ils ont prise Il me suffit de tous ceux-l�� pour me croire le droit?De ressusciter les autres?Un jour je m'attendais moi-m��me?Je me disais Guillaume il est temps que tu viennes?Et d'un lyrique pas s'avan?aient ceux que j'aime?Parmi lesquels je n'��tais pas?Les g��ants couverts d'algues passaient dans leurs villes?Sous-marines o�� les tours seules ��taient des ?les?Et cette mer avec les clart��s de ses profondeurs?Coulait sang de mes veines et fait battre mon coeur?Puis sur cette terre il venait mille peuplades blanches?Dont chaque homme tenait une rose �� la main?Et le langage qu'ils inventaient en chemin?Je l'appris de leur bouche et je le parle encore?Le cort��ge passait et j'y cherchais mon corps?Tous ceux qui survenaient et n'��taient pas moi-m��me?Amenaient un �� un les morceaux de moi-m��me?On me batit
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