possible avec leurs actions et les laisse libres dans tous les d��tails.
Je me donnai bient?t, par cette conduite une grande r��putation de l��g��ret��, de persiflage, de m��chancet��. Mes paroles am��res furent consid��r��es comme des preuves d'une ame haineuse, mes plaisanteries comme des attentats contre tout ce qu'il y avait de plus respectable. Ceux dont j'avais eu le tort de me moquer trouvaient commode de faire cause commune avec les principes qu'ils m'accusaient de r��voquer en doute: parce que sans le vouloir je les avais fait rire aux d��pens les uns des autres, tous se r��unirent contre moi. On e?t dit qu'en faisant remarquer leurs ridicules, je trahissais une confidence qu'ils m'avaient faite. On e?t dit qu'en se montrant �� mes yeux tels qu'ils ��taient, ils avaient obtenu de ma part la promesse du silence: je n'avais point la conscience d'avoir accept�� ce trait�� trop on��reux. Ils avaient trouv�� du plaisir �� se donner ample carri��re: j'en trouvais �� les observer et �� les d��crire; et ce qu'ils appelaient une perfidie me paraissait un d��dommagement tout innocent et tr��s l��gitime.
Je ne veux point ici me justifier: j'ai renonc�� depuis longtemps �� cet usage frivole et facile d'un esprit sans exp��rience; je veux simplement dire, et cela pour d'autres que pour moi qui suis maintenant �� l'abri du monde, qu'il faut du temps pour s'accoutumer �� l'esp��ce humaine, telle que l'int��r��t, l'affectation, la vanit��, la peur nous l'ont faite. L'��tonnement de la premi��re jeunesse, �� l'aspect d'une soci��t�� si factice et si travaill��e, annonce plut?t un coeur naturel qu'un esprit m��chant. Cette soci��t�� d'ailleurs n'a rien �� en craindre. Elle p��se tellement sur nous, son influence sourde est tellement puissante, qu'elle ne tarde pas a nous fa?onner d'apr��s le moule universel. Nous ne sommes plus surpris alors que de notre ancienne surprise, et nous nous trouvons bien sous notre nouvelle forme, comme l'on finit par respirer librement dans un spectacle encombr�� par la foule, tandis qu'en y entrant on n'y respirait qu'avec effort.
Si quelques-uns ��chappent �� cette destin��e g��n��rale, ils renferment en eux-m��mes leur dissentiment secret; ils aper?oivent dans la plupart des ridicules le germe des vices: ils n'en plaisantent plus, parce que le m��pris remplace la moquerie, et que le m��pris est silencieux.
Il s'��tablit donc, dans le petit public qui m'environnait, une inqui��tude vague sur mon caract��re. On ne pouvait citer aucune action condamnable; on ne pouvait m��me m'en contester quelques- unes qui semblaient annoncer de la g��n��rosit�� ou du d��vouement; mais on disait que j'��tais un homme immoral, un homme peu s?r: deux ��pith��tes heureusement invent��es pour insinuer les faits qu'on ignore, et laisser deviner ce qu'on ne sait pas.
CHAPITRE II
Distrait, inattentif, ennuy��, je ne m'apercevais point de l'impression que je produisais, et je partageais mon temps entre des ��tudes que j'interrompais souvent, des projets que je n'ex��cutais pas, des plaisirs qui ne m'int��ressaient gu��re, lorsqu'une circonstance tr��s frivole en apparence produisit dans ma disposition une r��volution importante.
Un jeune homme avec lequel j'��tais assez li�� cherchait depuis quelques mois �� plaire �� l'une des femmes les moins insipides de la soci��t�� dans laquelle nous vivions: j'��tais le confident tr��s d��sint��ress�� de son entreprise. Apr��s de longs efforts il parvint �� se faire aimer; et, comme il ne m'avait point cach�� ses revers et ses peines, il se crut oblig�� de me communiquer ses succ��s: rien n'��galait ses transports et l'exc��s de sa joie. Le spectacle d'un tel bonheur me fit regretter de n'en avoir pas essay�� encore; je n'avais point eu jusqu'alors de liaison de femme qui p?t flatter mon amour-propre; un nouvel avenir parut se d��voiler �� mes yeux; un nouveau besoin se fit sentir au fond de mon coeur. Il y avait dans ce besoin beaucoup de vanit�� sans doute, mais il n'y avait pas uniquement de la vanit��; il y en avait peut-��tre moins que je ne le croyais moi-m��me. Les sentiments de l'homme sont confus et m��lang��s; ils se composent d'une multitude d'impressions vari��es qui ��chappent �� l'observation; et la parole, toujours trop grossi��re et trop g��n��rale, peut bien servir �� les d��signer, mais ne sert jamais �� les d��finir.
J'avais, dans la maison de mon p��re, adopt�� sur les femmes un syst��me assez immoral. Mon p��re, bien qu'il observat strictement les convenances ext��rieures, se permettait assez fr��quemment des propos l��gers sur les liaisons d'amour: il les regardait comme des amusements, sinon permis, du moins excusables, et consid��rait le mariage seul sous un rapport s��rieux. Il avait pour principe qu'un jeune homme doit ��viter avec soin de faire ce qu'on nomme une folie, c'est-��-dire de contracter un engagement durable avec une personne qui ne f?t pas parfaitement son ��gale pour la fortune, la naissance et les avantages ext��rieurs; mais du reste, toutes les femmes, aussi longtemps qu'il ne s'agissait pas de les ��pouser, lui paraissaient pouvoir, sans
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