lAutomne dune femme | Page 4

Marcel Prévost
de lueurs pass��rent dans les yeux innocents de Mme Surg��re. Elle sentait riv�� sur elle le regard de l'abb��, condens�� pour ainsi, dire par les lunettes. Lasse de se contraindre, son inqui��tude, son chagrin, ses remords remont��rent de son coeur �� ses l��vres et �� ses yeux; sans un sanglot, elle s'appuya du coude au coin du bureau, et fondit en pleurs. L'abb�� Huguet la laissa pleurer quelques minutes. Il l'observait, il r��fl��chissait. Comme il les connaissait, les pauvres ames de ces Parisiennes, ballott��es par la houle des compromissions et des lachet��s ambiantes, sans fond solide o�� ancrer leurs r��sistances! Il connaissait cette ame-ci particuli��rement, ��tant le confident en titre de ses menues fautes, et il l'aimait parce qu'elle se refl��tait vraiment dans l'innocence et la tendresse de ces beaux yeux.
Mme Surg��re ne sanglotait pas, ne remuait pas. M��me son visage, que sa main laissait �� demi d��couvert, �� la lueur de la lampe, ��tait �� peine rougi par les pleurs.
L'abb�� Huguet se leva, se pencha, et mettant sa main sur le bras de la jeune femme:
--Qu'y a-t-il, mon enfant? Vous souffrez?
D��j�� il tirait d'un tiroir un flacon de cristal rose taill��, soulevait la capsule de vieil argent, car son m��tier de pasteur d'ames f��minines l'avait depuis longtemps muni de tout l'attirail destin�� �� combattre, �� calmer les nerfs des femmes.
Mais Mme Surg��re fit ?non? de la t��te; elle essuyait ses yeux et souriait d��j��.
--Merci, je vous demande pardon... J'ai si mal aux nerfs depuis quelques jours! Il me semble, �� certains moments, que j'ai un poids sur le coeur, une sorte de boule tr��s lourde qui l'��crase, p��se sur lui et se soul��ve alternativement. Puis cela remonte �� ma t��te et cela se fond en larmes, comme tout �� l'heure.
L'abb�� murmura du ton d'un homme qui attend:
--Vous avez raison; c'est nerveux.
Mme Surg��re achevait d'essuyer ses larmes. Elle dit:
--Je voudrais justement, monsieur l'abb��, vous parler �� ce sujet.
La phrase ��tait vague; l'abb�� la comprit.
--Est-ce que vous d��sirez que je vous entende au saint tribunal?
--Oh! non. Je veux seulement vous consulter, vous demander conseil... Je suis tr��s troubl��e en ce moment.
L'abb�� vit que des larmes lui remontaient aux yeux. Il lui prit la main.
--Voyons, ma ch��re fille, ayez confiance... Parlez-moi... C'est le confesseur qui vous ��coute.
Et comme pour remplacer le d��cor absent du confessionnal, de l'��glise silencieuse et sombre, de la grille qui s��pare les visages, il ��loigna la lampe, mod��ra la flamme, appuyant un mouchoir sur sa tempe, cachant ses yeux.
--Je vous ��coute.
Elle parla, entrant dans son aveu par les voies les plus lointaines, comme font toutes les femmes, s'attardant aux menues circonstances, glissant sur les faits... ?Vous savez, mon p��re, ma situation vis-��-vis de mon mari. J'ai bien souffert autrefois �� cause de lui, puis j'ai pris mon parti de la s��paration effective... Sa maladie l'a rendue toute naturelle. Nous vivons tranquillement l'un pr��s de l'autre, et la pr��sence de M. Esquier, notre ami �� tous deux, amortit les chocs. Ce n'est pas, assur��ment, le r��ve du mariage qu'une jeune fille se forme... mais c'est supportable...?
Le pr��tre doucement l'emp��cha de s'��garer.
--Oui, ma ch��re fille, je sais tout cela. Eh bien, y a-t-il quelque chose de nouveau dans votre int��rieur? Est-ce que M. Surg��re a chang�� d'attitude vis-��-vis de vous? Est-ce que...??
Il avait soup?onn�� un instant l'aveu effar�� d'un de ces retours offensifs qu'ont parfois les maris vers leur femme longtemps d��laiss��e: retours plus redout��s de celles-ci que l'abandon et contre lesquels elles recourent tout d'abord �� leurs alli��s naturels, le pr��tre et le m��decin.
Mme Surg��re le comprit.
--Oh! non... fit-elle. Grace �� Dieu, non!... Elle chercha �� reprendre ses confidences, puis, ne trouvant plus, elle se r��solut brusquement et, rejetant sa figure dans ses mains:
--C'est, dit-elle... c'est Maurice Artoy, le jeune homme dont je vous ai parl��... le fils de l'ancien associ�� de mon mari, qui habite le pavillon maintenant...
Le pr��tre pensa:
?J'avais raison d'abord, d��cid��ment.?
Et pour aider l'aveu, il dit tout haut, avec des pauses, avec cette recherche d'expression o�� les pr��tres excellent:
--Ce jeune homme, sans doute, vivant pr��s de vous, a ��t�� frapp�� par votre ext��rieur... sympathique, par votre douceur de caract��re, ma ch��re enfant?... Il vous a entour��e, poursuivie de ses attentions...
Elle le laissait parler, acquies?ant par son silence. Ses larmes s��chaient au bord des paupi��res.
--Sans doute, continua l'abb��, de cette voix blanche qui d��mon��tise les mots, les ��mousse, les annule presque, c'est un jeune homme sans principes religieux, que la pens��e de l'adult��re (il pesa avec intention sur ce mot) ne ferait pas h��siter?
Elle l'interrompit vivement:
--Oh! non, mon p��re! ne dites pas cela... Je vous assure que le pauvre enfant n'est pas coupable!... ou du moins je le suis autant que lui... Mon Dieu! Je ne sais pas comment cela s'est fait. Je l'avais vu plus d'une fois sans prendre garde �� lui. Il vivait �� Cannes
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