Voyage du Prince Fan-Federin dans la romancie | Page 3

Guillaume Hyacinthe Bougeant
dans ma ch?te pour m��emp��cher d��y p��rir; et je m��en serois apper?? d��s-lors si j��avois e? toutes les connoissances que j��ai acquises depuis. Mais la pens��e ne m��en vint point, et j��attribuai �� un heureux hasard ce qui ��toit l��effet d��une protection particuliere de quelque f��e, de quelque g��nie favorable, ou de quelqu��une de ces petites divinit��s qui voltigent dans le pays des romans en plus grand nombre que les papillons ne volent au printems dans nos campagnes. On n��aura cependant pas de peine �� comprendre que dans la situation o�� je me trouvai, apr��s avoir lev�� les yeux au ciel pour contempler la hauteur ��norme d��o�� j����tois tomb��, et avoir envisag�� toute l��horreur des lieux qui m��environnoient, je d?s m��abandonner aux plus tristes r��flexions. ?pauvre Fan-F��r��din, que vas-tu devenir dans cette horrible solitude... par o�� sortiras-tu de ces antres profonds... tu vas p��rir...? O que je dis de choses touchantes, et que je me plaignis ��loquemment du destin, de la fortune, de mon ��toile, et de tout ce qui me vint �� l��esprit! Mais on va voir combien j��avois tort de me plaindre; et par le droit que j��ai acquis dans le pays des romans de faire des r��flexions morales, je voudrois que les hommes apprissent une bonne fois par mon exemple, �� respecter les d��crets supr��mes qui reglent leur sort, et �� ne se jamais plaindre des ��v��nemens qui leur semblent les plus contraires �� leurs desirs. Cependant la nuit qui approchoit, redoubloit mon inqui��tude, et je me hatai de profiter du peu de jour et de forces qui me restoient pour sortir, s��il ��toit possible, de l��ab?me o�� j����tois. En vain aurois-je essay�� de gagner les hauteurs: elles ��toient trop escarp��es. Il ne me restoit qu���� chercher dans les fonds une issu? pour me conduire �� quelque endroit habit��, ou du moins habitable. Nul vestige de sentier ne s��offrit �� ma v??. Sans doute j����tois le premier homme qui f?t descendu dans ce pr��cipice. Je f?s ainsi r��duit �� me faire une route �� moi-m��me, et en effet je fis si bien, en grimpant et sautant de rocher en rocher, tant?t m��accrochant aux brossailles, tant?t me laissant couler sur le dos ou sur le ventre, qu��apr��s avoir fait quelque chemin de cette maniere, j��arrivai �� un endroit plus d��couvert et plus spatieux.
Le premier objet qui me frappa la v??, f?t une espece de cimetiere, un charnier, ou un tas d��ossemens d��une espece singuliere. C����toient des cornes de toutes les figures, de grands ongles crochus, des peaux seches de dragons ail��s, et de longs becs d��oiseaux de toute espece. Je me rappellai aussi-t?t ce que j��avois l? dans les romans, des griffons, des centaures, des hippogriffes, des dragons volans, des harpies, des satyres, et d��autres animaux semblables, et je commen?ai �� me flatter que je n����tois pas loin du pays que je cherchois. Ce qui me confirma dans cette id��e, c��est qu��un moment apr��s je vis sortir de l��ouverture d��un antre un centaure, qui venant droit �� l��endroit que j��observois, y jetta une grande carcasse d��hippogriffe qu��il avoit apport��e sur son dos, apr��s quoi il se retira, et s��enfon?a dans l��antre d��o�� il ��toit sorti. Quoique je connusse parfaitement les centaures, par les lectures que j��avois faites, et que d��ailleurs je ne manque point de courage, j��avoue que cette premiere v?? me causa quelque ��motion; je me cachai m��me derriere un rocher pour observer le centaure jusqu���� ce qu��il se f?t retir��; mais alors reprenant mes esprits, et m��armant de r��solution: qu��ai-je �� craindre, dis-je en moi-m��me, de ce centaure? J��ai l? dans tous les romans que les centaures sont les meilleures gens du monde. Loin d����tre ennemis des hommes, ils sont to?jours dispos��s �� leur rendre service, et �� leur apprendre mille secrets curieux, t��moin le centaure Chiron. Peut-��tre celui-ci me portera-t-il au pays des romans; du moins il ne refusera pas de me tirer de ces horribles lieux. Je marchai aussi-t?t vers l��antre, et m��arr��tant �� l��entr��e, je l��appellai �� haute voix en ces termes: ?charitable centaure, si votre coeur peut ��tre touch�� par la piti��, soyez sensible au malheur d��un prince qui implore votre g��n��rosit��. C��est le Prince Fan-F��r��din qui vous appelle?. Mais j��eus beau appeller et ��lever ma voix, personne ne parut.
Plein d��inqui��tude et d��une frayeur secrete, j��entrai dans la caverne, et je vis que c����toit un chemin so?terrain qui s��enfon?oit beaucoup sous la montagne. Quel parti prendre? Je n��en trouvai pas d��autre que de suivre le centaure, jugeant qu��il n����toit pas possible que je ne le rencontrasse, ou que je ne me fisse bien-t?t entendre �� lui. Mais avouerai-je ici ma foiblesse, ou ne l��avouerai- je pas? Faut-il parler ou me taire? Voil�� une de ces situations difficiles, o�� j��ai souvent v? dans les romans les h��ros qui racontent leurs avantures, et dont
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