Valentine | Page 9

George Sand
je souffrirais un affront de la part de qui que ce f?t?
--Il faudra pourtant bien nous attendre �� essuyer plus d'une impertinence tant que nous serons ses fermiers. Fermiers, toujours fermiers! quand nous avons une propri��t�� au moins aussi belle que celle de madame la comtesse! Mon papa, je ne vous laisserai pas tranquille que vous n'ayez envoy�� promener cette vilaine ferme. Je m'y d��plais, je ne m'y puis souffrir.
Le p��re Lh��ry hocha la t��te.
--Mille ��cus de profit tous les ans sont toujours bons �� prendre, r��pondit-il.
--Il vaudrait mieux gagner mille ��cus de moins et recouvrer notre libert��, jouir de notre fortune, nous affranchir de l'esp��ce de domination que cette femme orgueilleuse et dure exerce sur nous.
--Bah! dit madame Lh��ry, nous n'avons presque jamais affaire �� elle. Depuis ce malheureux ��v��nement elle ne vient plus dans le pays que tous les cinq ou six ans. Encore cette fois elle n'y est venue que par l'occasion du mariage de sa demoiselle. Qui sait si ce n'est pas la derni��re! M'est avis que mademoiselle Valentine aura le chateau et la ferme en dot. Alors nous aurions affaire �� une si bonne ma?tresse!
--Il est vrai que Valentine est une bonne enfant, dit Ath��na?s fi��re de pouvoir employer ce ton de familiarit�� eu parlant d'une personne dont elle enviait le rang. Oh! celle-l�� n'est pas fi��re; elle n'a pas oubli�� que nous avons jou�� ensemble ��tant petites. Et puis elle a le bon sens de comprendre que la seule distinction, c'est l'argent, et que le n?tre est aussi honorable que le sien.
--Au moins! reprit madame Lh��ry; car elle n'a eu que la peine de na?tre, au lieu que nous, nous l'avons gagn�� �� nos risques et peines. Mais enfin il n'y a pas de reproche �� lui faire; c'est une bonne demoiselle, et une jolie fille, da! Tu ne l'as jamais vue, B��n��dict?
--Jamais, ma tante.
--Et puis je suis attach��e �� cette famille-l��, moi, reprit madame Lh��ry. Le p��re ��tait si bon! C'��tait l�� un homme! et beau! Un g��n��ral, ma foi, tout chamarr�� d'or et de croix, et qui me faisait danser aux f��tes patronales tout comme si j'avais ��t�� une duchesse. Cela ne faisait pas trop plaisir �� madame...
--Ni �� moi non plus, objecta le p��re Lh��ry avec na?vet��.
--Ce p��re Lh��ry, reprit la femme, il a toujours le mot pour rire! Mais enfin c'est pour vous dire qu'except�� madame, qui est un peu haute, c'est une famille de braves gens. Peut-on voir une meilleure femme que la grand'm��re!
--Ah! celle-l��, dit Ath��na?s, c'est encore la meilleure de toutes. Elle a toujours quelque chose d'agr��able �� vous dire; elle ne vous appelle jamais que mon coeur, ma toute belle, mon joli minois.
--Et cela fait toujours plaisir! dit B��n��dict d'un air moqueur. Allons, allons, cela joint aux mille ��cus de profit sur la ferme, qui peuvent payer bien des chiffons...
--Eh! ce n'est pas �� d��daigner, n'est-ce pas, mon gar?on? dit le p��re Lh��ry. Dis-lui donc cela, toi; elle t'��coutera.
--Non, non, je n'��couterai rien, s'��cria la jeune fille. Je ne vous laisserai pas tranquille que vous n'ayez laiss�� la ferme. Votre bail expire dans six mois; il ne faut pas le renouveler, entends-tu, mon papa?
--Mais qu'est-ce que je ferai? dit le vieillard ��branl�� par le ton �� la fois patelin et imp��ratif de sa fille. Il faudra donc que je me croise les bras? Je ne peux pas m'amuser comme toi �� lire et �� chanter, moi; l'ennui me tuera.
--Mais, mon papa, n'avez-vous pas vos biens �� faire valoir?
--Tout cela marchait si bien de front! il ne me restera pas de quoi m'occuper. Et d'ailleurs o�� demeurerons-nous? Tu ne veux pas habiter avec les m��tayers?
--Non certes! vous ferez batir; nous aurons une maison �� nous; nous la ferons d��corer autrement que cette vilaine ferme; vous verrez comme je m'y entends!
--Oui, sans doute, tu t'entends fort bien �� manger de l'argent, r��pondit le p��re.
Ath��na?s prit un air boudeur.
--Au reste, dit-elle d'un ton d��pit��, faites comme il vous plaira; vous vous repentirez peut-��tre de ne pas m'avoir ��cout��e; mais il ne sera plus temps.
--Que voulez-vous dire? demanda B��n��dict.
--Je veux dire, reprit-elle, que quand madame de Raimbault saura quelle est la personne que nous avons re?ue �� la ferme et que nous logeons depuis trois semaines, elle sera furieuse contre nous, et nous cong��diera d��s la fin du bail avec toutes sortes de chicanes et de mauvais proc��d��s. Ne vaudrait-il pas mieux avoir pour nous les honneurs de la guerre et nous retirer avant qu'on nous chasse?
Cette r��flexion parut faire impression sur les Lh��ry. Ils gard��rent le silence, et B��n��dict, �� qui les discours d'Ath��na?s d��plaisaient de plus en plus, n'h��sita pas �� prendre en mauvaise part sa derni��re objection.
--Est-ce �� dire, reprit-il, que vous faites un reproche �� vos parents d'avoir accueilli madame Louise?
Ath��na?s tressaillit, regarda B��n��dict avec surprise,
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