Une femme d'argent, by Hector
Malot
The Project Gutenberg EBook of Une femme d'argent, by Hector Malot
This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
with this eBook or online at www.gutenberg.net
Title: Une femme d'argent
Author: Hector Malot
Release Date: January 27, 2005 [EBook #14820]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK UNE
FEMME D'ARGENT ***
Produced by Miranda van de Heijning, Renald Levesque and the
Online Distributed Proofreading Team. This file was produced from
images generously made available by the Bibliothèque nationale de
France (BnF/Gallica)
UNE FEMME D'ARGENT
PAR HECTOR MALOT
I
Après avoir occupé une des premières places à la tête de la banque
parisienne pendant la Restauration et sous le règne de Louis-Philippe,
la maison Charlemont avait vu son importance s'amoindrir assez vite
lorsque, de la direction de Hyacinthe Charlemont, elle était passée sous
celle d'Amédée Charlemont, fils de son fondateur.
C'était toujours la même maison cependant, le même nom, mais ce
n'était plus du tout le même homme, et si le fils succédait au père en
vertu du droit d'héritage, il ne le remplaçait pas.
Né dans une famille de pauvres gens des Ardennes, Hyacinthe
Charlemont était arrivé à Paris avec trois francs en poche pour
commencer l'apprentissage de la vie dans une boutique de la rue aux
Ours, et c'était de là qu'il était parti pour devenir successivement petit
commis dans une maison de banque, caissier, puis directeur de cette
maison, régent de la Banque de France, président de la Chambre de
commerce de Paris, député, ministre et pair de France. Et partout à sa
place, toujours au-dessus de la position qu'il avait conquise à force de
travail, de volonté, d'application, d'intelligence, de hardiesse, et aussi,
jusqu'à un certain point, par des qualités naturelles qui avaient aidé ses
efforts: un caractère facile, une humeur gaie, des manières liantes. Mais
ce qui plus que tout encore avait fait sa fortune, ç'avait été la façon dont
il avait compris le rôle que les circonstances lui permettaient de remplir:
à une époque où le crédit public existait à peine, il avait largement mis
ses capitaux, ceux de sa maison aussi bien que les siens propres, au
service de ses idées et de son parti; et si son parti ne les lui avait pas
toujours rendus, il lui en avait au moins payé les intérêts en renommée,
si bien que dix journaux, vingt journaux dont il payait les amendes ou
dont il faisait le cautionnement avaient tous les jours célébré ses
mérites et chanté sa gloire. «Notre grand financier Charlemont, notre
grand citoyen Charlemont», était une phrase qu'on aurait pu clicher
dans les imprimeries des journaux libéraux. Comme avec cela ses
rivaux ou ses ennemis étaient obligés de rendre justice à la supériorité
en même temps qu'à la droiture avec laquelle il traitait les affaires, cette
renommée avait été universellement acceptée, et Charlemont était
devenu populaire autant pour ses opinions qui étaient celles de la partie
la plus remuante du pays, que pour ses richesses dont il faisait
réellement un noble usage, secourant toutes les infortunes, soutenant
tout ce qui méritait d'être encouragé, même chez ses adversaires, pour
le plaisir de bien faire et sans arrière-pensée d'intérêt personnel. Chose
rare, le succès ne l'avait point grisé et quand Louis-Philippe, à qui il
avait rendu des services de toutes sortes, avait voulu les lui payer
économiquement en le faisant baron, il avait refusé: «Je mets mon
orgueil dans mon humble origine», avait-il répondu à son roi. En effet,
bourgeois il avait été toute sa vie, bourgeois il voulait rester; c'était
chez lui affaire de coquetterie et de vanité; le mot «bourgeois» était
celui qu'il répétait à tout propos, il ne voyait rien au-dessus ni au delà;
ses idées, ses opinions, ses ambitions, son existence avaient été
bourgeoises, rien que bourgeoises, et dans son vaste cabinet de travail il
avait pour toute oeuvre d'art un grand dessin, splendidement encadré,
qui résumait bien ses goûts et ses idées: c'était une copie qu'il avait fait
faire par un homme de talent du Banquet de la garde civique, ce
tableau célèbre du musée d'Amsterdam dans lequel Van der Helst a
peint de grandeur nature une trentaine de bourgeois à table, où les
différents types du bourgeois sont fidèlement représentés avec toute
leur vigueur et aussi toute leur vulgarité: grands, solides, bien nourris,
contents de la vie et d'eux-mêmes, au caractère énergique, laborieux,
avisé, audacieux et prudent, aventureux et timide, aussi dur à soi-même
qu'à autrui. Pour lui c'étaient là des ancêtres dans lesquels il se
retrouvait avec un sentiment non avoué qu'il leur était supérieur.
Quand
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.