de Jacques Cartier, l'immortel découvreur de
notre beau pays, aperçut, au matin du 14 septembre 1535, à sept
demi-siècles de notre époque.
[Note 4: "Suivant M. Richer Laflèche, ancien missionnaire (l'évêque
actuel du diocèse des Trois-Rivières) Stadaconé dans la langue des
Sauteurs signifie aile. La pointe de Québec ressemble par sa forme à
une aile d'oiseau." Ferland, Histoire du Canada, Tome Ier, page 90.]
[Note 5: "Ils (les sauvages) appellent une ville: Canada". Voyage de
Jacques Cartier 1535-36, verso du feuillet 48.]
Ces retours au passé historique du Canada ne sont pas seulement un
plaisir de l'esprit, un exercice de la mémoire, une satisfaction d'orgueil
national, ils demeurent encore la préoccupation continue des âmes
grandes, des coeurs bien nés dans la poitrine à la hauteur des faveurs
reçues, et qui se font un devoir sacré, une religion sévère de leur
souvenir; dans la crainte que les aïeux, que les ancêtres ne soient hélas!
pour l'avenir, contraints de compléter la mesure de leurs inestimables
bienfaits en en pardonnant l'ingratitude.
C'était le maître-ès-arts, Charles Honoré Laverdière qui me parlait ainsi,
à Québec, la nuit du vingt-quatre Décembre,
mil-huit-cent-quatre-vingt-cinq. Il pouvait être onze heures et demie du
soir; conséquemment, pour parler le langage moderne, le style rapide
du chemin de fer, nous n'étions plus qu'à trente minutes de Noël;--trente
minutes, un temps égal à la distance qui nous séparait tous deux de la
ville où nous allions rentrer.
Aussi fallait-il marcher très vite pour arriver à Notre-Dame au temps de
la Messe de Minuit. Car nous étions encore loin, très loin même sur la
route, la Grande Allée, la rue fashionable par excellence du quartier à la
mode de notre actuelle cité, l'antique chemin du Cap Rouge, trois fois
centenaire comme la mémoire de Jacques Cartier. L'incomparable
beauté de la nuit, le besoin d'être seul, de penser librement, longuement,
l'idée et la raison d'un livre m'avaient engagé à refaire une fois de plus,
et certes sans regrets, la fascinante promenade du belvédère.
Or, Laverdière était mort le 11 mars 1873. Rien, comme la date précise
de son décès et le quantième de son enterrement, n'était plus facile à
relever dans les régistres de l'état civil. Je dis bien aux régistres de l'état
civil, car, dans la chapelle du Séminaire des Missions Etrangères[6], où
le saint prêtre dormait enterré depuis douze ans, il n'y avait point de
mausolée, de marbre funéraire, pas même une épitaphe gravée à son
nom, qui rappelât à la mémoire distraite des vivants ce mort enseveli
sous le parvis du sanctuaire. En cela, il n'était pas plus maltraité par
l'ingratitude des hommes que son frère illustre d'études et de sacerdoce,
Jean-Baptiste Antoine Ferland, couché, aussi lui, quelque part sous le
choeur de Notre-Dame de Québec, moins oublié même que Messieurs
de Frontenac, de Callières, de Vaudreuil, de la Jonquière [7], quatre des
plus fameux gouverneurs de notre Canada Français, obscurément
enfouis à la Basilique, sous je ne sais plus quelle chapelle latérale [8].
[Note 6: Nous avons pris habitude d'appeler Séminaire de Québec, le
Séminaire des Missions Etrangères à Québec.]
[Note 7: Ce fut en septembre 1796, que les cendres du comte de
Frontenac, du chevalier de Callières, du marquis de Vaudreuil et du
marquis de la Jonquière, furent transportées de l'Église incendiée des
Récollets à la Cathédrale de Québec.
On agita l'idée d'élever dans la cathédrale un modeste marbre funéraire
à chacun de ces grands noms et de ces grands chefs de notre race. La
chose fut mis à l'étude, et ce bel et si bien, que quatre-vingt trois ans
après la translation de ces ossements tout est encore à faire! Frontenac,
Callières, Vaudreuil, La Jonquière dorment dans la ville qui a été le
siège de leur gouvernement sans avoir même une épitaphe pour
rappeler aux vivants où ils sont, et ce qu'ils étaient! Il est vrai que
Champlain, le fondateur de notre ville, n'a pas encore de monument et
que le chevalier de Mésy, autre gouverneur de la Nouvelle France, gît
ignoré dans le cimetière des pauvres de l'Hôtel-Dieu de Québec!
Faucher de Saint Maurice--Relation des Fouilles faites au Collège des
Jésuites, page 11.]
[Note 8: Très probablement la chapelle Notre-Dame de Pitié. L'Histoire
du Canada par Smith, publiée à Québec en 1815, nous a conservé les
inscriptions gravées sur les cercueils de ces quatre Gouverneurs de la
Nouvelle France. Les voici:
I. M. DE FRONTENAC.--Cy gyt le Haut et Puissant Seigneur Louis de
Buade, Comte de Frontenac, Gouverneur Général de la Nouvelle
France, mort à Québec, le 28 Novembre 1698.
II. M. DE CALLIÈRES.--Cy gyst Haut et puissant Seigneur Hector de
Callières, Chevalier de Saint-Louis, Gouverneur et Lieutenant Général
de la Nouvelle France, décédé le 26 mai 1703.
III. M. DE VAUDREUIL.--Cy gist haut et puissant Seigneur Messire
Philippe Rigaud, Marquis de Vaudreuil, Grand Croix de l'ordre
militaire de
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