par là, combien peu il était disposé à flatter bassement la multitude.
Dès le mois de juillet, il posa nettement, dans son journal et à la tribune des Jacobins, la question de la déchéance et de la convocation d'une Convention nationale. ?Est-ce bien Louis XVI qui règne? écrivit-il. Non, ce sont tous les intrigants qui s'emparent de lui tour à tour. Dépouillé de la confiance publique, qui seule fait la force des rois, il n'est plus rien par lui-même.?
?... Au-dessus de toutes les intrigues et de toutes les factions, la nation ne doit consulter que les principes et ses droits. La puissance de la cour une fois abattue, la représention nationale régénérée, et surtout la nation assemblée, le salut public est assuré.?
Le 10 ao?t, le peuple fit violemment ce que Robespierre aurait voulu voir exécuter par la puissance législative. Il le félicita de son heureuse initiative et complimenta l'Assemblée d'avoir enfin effacé, au bruit du canon qui détruisait la vieille monarchie, l'injurieuse distinction établie, malgré lui, par la Constituante entre les citoyens actifs et les citoyens non actifs.
Dans la soirée même, sa section, celle de la place Vend?me, le nomma membre du nouveau conseil général de la commune. élu président du tribunal institué pour juger les conspirateurs, il donna immédiatement sa démission en disant qu'il ne pouvait être juge de ceux qu'il avait dénoncés, et qui, ?s'ils étaient les ennemis de la patrie, s'étaient aussi déclarés les siens?.[3]
[Note 3: Lettre insérée dans le Moniteur du 28 ao?t 1792.]
Nommé également membre de l'assemblée électorale chargée de choisir les députés à la Convention nationale, Il prit peu de part aux délibérations de la Commune. Le bruit des affreux massacres de septembre vint tardivement le frapper au milieu de ses fonctions d'électeur. A cette nouvelle, il se rendit au conseil général où, avec Deltroy et Manuel, il re?ut la mission d'aller protéger la prison du Temple qui fut, en effet, épargnée par les assassins.[4]
[Note 4: Procès-verbaux du conseil général de la commune de Paris. Archives de la ville, v. 22, carton 0.70.]
Jusqu'ici, rien de sanglant n'appara?t ni dans ses actes ni dans ses paroles. Maintenant, jusqu'où doit aller, devant l'histoire, sa part de responsabilité dans les mesures sévères, terribles que, pour sauver la Révolution et la patrie, la Convention allait bient?t prendre ou ratifier? C'est ce dont le lecteur jugera d'après ce récit, écrit d'après les seules sources officielles, authentiques et originales.
IV
élu membre de la Convention nationale par les électeurs de Paris, Robespierre fut, dès les premières séances, l'objet d'une violente accusation de la part des hommes de la Gironde. Déjà Guadet, aux Jacobins, lui avait reproché amèrement d'être l'idole du peuple, et l'avait exhorté na?vement à se soustraire par l'ostracisme à cette idolatrie. Lasource l'accusa d'aspirer à la dictature. A l'accusation dirigée contre lui, il opposa toute sa vie passée. ?La meilleure réponse à de vagues accusations est de prouver qu'on a toujours fait des actes contraires. Loin d'être ambitieux, j'ai toujours combattu les ambitieux. Ah! si j'avais été l'homme de l'un de ces partis qui, plus d'une fois, tentèrent de me séduire, si j'avais transigé avec ma conscience et trahi la cause du peuple, je serais à l'abri des persécutions....?
Barbaroux et Louvet vinrent à la rescousse. Le frivole auteur de Faublas, devan?ant les Thermidoriens, voulait absolument que la Convention frappat d'un acte d'accusation l'adversaire de son parti, parce qu'on l'avait proclamé l'homme le plus vertueux de France et que l'idolatrie dont un citoyen était l'objet pouvait être mortelle à la patrie, parce qu'on l'entendait vanter constamment la souveraineté du peuple, et qu'il avait abdiqué le poste périlleux d'accusateur public. Malgré le vide et le ridicule de ces accusations, une partie de la Convention applaudit à la robespierride de Louvet, que le ministre Roland fit répandre dans les provinces à quinze mille exemplaires.
écrasante fut la réponse de Robespierre. Il n'eut pas de peine à prouver qu'à l'époque où l'on prétendait qu'il exer?ait la dictature, toute la puissance était entre les mains de ses adversaires. Après avoir reproché à ceux-ci de ne parler de dictature que pour l'exercer eux-mêmes sans frein, il termina par un appel à la conciliation, ne demandant d'autre vengeance contre ses calomniateurs ?que le retour de la paix et le triomphe de la liberté?.
Mais sourds à cet appel à la conciliation, les imprudents Girondins ne firent que redoubler d'invectives et d'animosité à l'égard de Robespierre et de Danton. La lutte entre la Gironde et la Montagne s'envenimait chaque jour et ne devait se terminer que par l'extermination d'un des deux partis. Mais d'où vinrent les attaques passionnées et les premiers traits empoisonnés? La justice nous commande bien de le dire, elles vinrent des Girondins.
Le jugement du roi, dans lequel Girondins et Montagnards votèrent en grande majorité pour la mort, fut à peine une halte au milieu de cette lutte sans
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